Radio France - Ce pays d'Afrique centrale est immense, grand comme deux fois la France. Il est également l’un des plus pauvres au monde et l’espérance de vie masculine y dépasse à peine 52 ans.

Le Tchad vote ce lundi. Une élection présidentielle sous tension, scrutée de près par de nombreux pays dont la France...Cette élection présidentielle c'est d'abord l'occasion pour le sortant Mahamat Idriss Déby de légitimer son pouvoir par les urnes.

Il y a trois ans, son père est mort au combat. Après une trentaine d'années passées à la tête du pays, Idriss Déby père est tombé lors d'un affrontement avec des rebelles, près de la frontière entre le Tchad et la Libye. Après avoir annoncé la nouvelle, l'armée a installé son fils à sa place.

Un conseil militaire de transition chargé de préparer la tenue d'élections libres et démocratiques. Le vote aura donc lieu ce lundi, avec beaucoup de retard et du sang versé. Celui de dizaines de manifestants tués en octobre 2022 selon une commission locale des droits de l’homme. Ces soutiens de l’opposition dénonçaient une transition trop longue. Elle ne devait durer que 18 mois. Au final, il aura fallu attendre deux fois plus longtemps pour que le vote ait lieu.

Un scrutin au suspens limité

Parmi la dizaine de concurrents face au président de la transition, le plus sérieux pourrait bien être le premier ministre sortant. Il est difficile de déterminer s'il n'est qu'un opposant prétexte engagé dans un match amical.

Sa fin de campagne sème le doute et annonce peut-être un vrai duel. Après être rentré d'exil et avoir accepté de former un gouvernement d'union au début de l'année, Succès Masra, c'est son nom, a durci sa rhétorique pendant la campagne. Dans la dernière ligne droite avant le scrutin, il galvanise les foules avides de changement et promet une victoire par KO dès le premier tour.

La France fébrile

La France au Tchad c'est plus d'un siècle de présence militaire continue dans le pays. Des opérations extérieures, de l'ingérence quand les militaires ont participé à renverser un pouvoir ou à en protéger un autre et de la coopération avec l'armée tchadienne. Un modèle révolu selon plusieurs observateurs et acteurs politiques locaux.

Après avoir constaté son éviction du Mali et du Burkina Faso, Paris a à peine pu retarder celle du Niger voisin...Un peu plus tôt cette année un l'envoyé personnel du président Macron pour l'Afrique a fait savoir que la France souhaite rester au Tchad. Pendant la séquence électorale, Paris se fait donc discret. Elle guette les déclarations des principaux prétendants sur la présence d'étrangers dans le pays.

Quand la Russie devient un argument de campagne

La série sahélienne va peut être poursuivre son cours. Rien ne permet d'exclure qu' N'djaména, la capitale tchadienne, soit la prochaine à exiger le départ des quelque 1000 soldats français stationnés sur place.

L'utilisation de trois bases dans le pays pour lutter contre le djihadisme dans la région n'est plus une raison suffisante pour se maintenir au Tchad. Sans changement significatif dans sa manière avec les autorités locales, la France risque de n'être perçue que comme une force d'occupation. Il est désormais courant dans cette partie du continent de présenter les militaires français comme une force de prédation et non de libération.

Les Américains l'ont bien compris. Quelques semaines avant le scrutin, ils ont décidé de largement réduire leur empreinte sur place en ne laissant que quelques dizaines de soldats. Le temps de laisser passer un éventuel orage et d'adapter leur posture en fonction du vent qui soufflera après le scrutin.

Afin de plaire à une partie de la foule en jouant le rapport de force avec les Occidentaux, les principaux candidats envisagent ouvertement de nouer des partenariats avec le nouvel acteur majeur dans cette zone : la Russie.

Gallagher Fenwick