21-04-2014 01:31 - L’agriculture irriguée : Faut- il toujours compter sur les faveurs Présidentielles

L’agriculture irriguée : Faut- il toujours compter sur les faveurs Présidentielles

Baliou Coulibaly - Le périmètre rizicole Pilote du Gorgol, dont l’exploitation a débuté en 1978, était jusqu’à la fin des années 1990 considéré comme un modèle réussi de production rizicole mais depuis plus d’une décennie , le PPG se meurt et le niveau de vie de ses exploitants, qui sont en majorité des populations autochtones, se dégrade année après année.

Malgré ce constat alarmant, les autorités et les services techniques compétents continuent de dresser un tableau tout reluisant de se secteur. Selon M Mohamed Ould Ismail , le Directeur régional de la Sonader au Gorgol en 2013, le rendement à l’hectare avoisine les six tonnes .

Pourtant, les PPG2 qui compte plus de 1200 ha n’a pas été exploité depuis plus de deux ans et les PPG1 qui compte environs 700 ha n’a lui, été exploité qu’à moitié durant la campagne 2013 avec un retard incompréhensible du démarrage de la campagne dont le respect du calendrier constitue le principal gage de réussite.

Interpelés sur cette situation, les responsables de la Sonader s’expliquent par le refus des paysans de payer leurs dettes.

En fait ce que nos responsable oublient c’est que la dette n’est autre que la conséquence de l’accumulation de plusieurs facteurs ou blocages qui, si ils ne sont pas réglés mettront toujours les paysans dans l’incapacité de pouvoir honorer leurs engagements vis-à-vis des créanciers.

C’est d’ailleurs ce que un groupe de paysans du PPG2 on compris depuis deux ans , en boycottant campagne : « nous avons refusé d’aller en campagne car cela ne fera qu’accroitre nos dettes et enrichir les dirigeants qui sont de connivences avec l’administration » nous a confié Hmeida Ould Ahmed Diabé , un exploitant du PPG2, notable du quartier Wandama.

« Pendant quatre années de suite, nous avons eu à exploiter le périmètre dans ces conditions et à chaque fois nos cultures n’arrivent jamais à maturité à cause du retard dans le démarrage de la campagne et l’arrêt prématuré du pompage d’eau . Ce retard dans calendrier cultural, en plus d’influer négativement sur le développement des plants, nous expose à l’invasion d’oiseaux granivores ce qui annihile toute chance de production même pour les plus courageux d’entre nous. » a t –il ajouté.

D’après ces paysans , il est arrivé plusieurs fois qu’on annonce officiellement le démarrage d’une campagne à l’occasion de la visite d’un ministre alors que cette dernière n’interviendra que deux mois plus tard ; soit pour mettre la pression sur les mauvais payeurs pour recouvrer les dettes, soit par simple manque de tracteurs laboureurs.

A cela il faut ajouter la grande opacité qui entoure l’attribution des marchés aux personnes détentrices de machines de labour. Certains paysans peuvent attendre plus d’un mois pour voir les fantomatiques machines passées ; entretemps, les champs se remplissent de mauvais herbes et contraint certains à l’abandon pur et simple.

Pour des exploitations d’une telle importance, il est impardonnable que de situations pareilles, particulièrement celle relative à la disponibilsation des tracteurs se répète chaque année.

D’après le directeur régional de la Sonader, le Président de la république a décidé d’annuler les dettes pour toutes les coopératives, ce qui veut dire, a-t-il précisé, que leurs dettes vis-à-vis du crédit agricole sont totalement effacées et que les coopératives agricoles sont désormais toutes éligibles au crédit.

L’ensemble des paysans rencontrés se réjouissent de cette décision mais tant que des mesures sérieuses ne sont pas prises, ils finiront malheureusement par retomber encore dans le cycle infernal de l’endettement. Ainsi, ces périmètres rizicoles, dont l’objectif principal était d’améliorer la production céréalière pour assurer à long terme l’autosuffisance alimentaire, failliront totalement à leur mission pour se transformer en officines d’assistance sociale qui seront un fardeau pour le contribuable.

Les Conseils d’administration et les Comités auxquels incombe la gestion des périmètres sont très limités en capacités et souvent exposés aux influences des lobbies affairistes dont le seul objectif est de capter les fonds et subventions destinés aux véritables paysans.

Pour la prochaine campagne, le Directeur de la Sonader a donné l’assurance qu’elle va démarrer en fin juin, cela devait être possible si l’on considère le lever de bouclier de la dette. Mais sur le terrain, rien n’est encore moins sûr, si l’on sait que le diagnostic du problème de fuite d’eau au niveau de la station de pompage, qui selon le responsable des travaux à la Sonader, a été à l’origine de l’inondation des parties basses du PPG1 ces dernières années, n’a pas encore été réglé.

A ce jour, l’équipe chargée de cette opération a juste procédé au blocage des eaux au niveau du fleuve afin d’assécher complètement la station pour pouvoir faire le diagnostic et ainsi commencer les travaux de réparation. « Nous avons exploité ce périmètre depuis plus de 20 ans », a déclaré M. Hamed Limame, un exploitant de la Coopérative Mahmoudé, notable de Gourdiouma, « nous savons ce qu’il peut nous apporter ; il nous est arrivé dans le passé de produire plus de 9 tonnes à l’hectare. Et cela est encore possible si toutes les conditions sont réunies » a-t-il conclu.

Compte tenu de l’importance de ces périmètres pour la sécurité alimentaire des populations rurales du Gorgol en particulier et du développement socio économique de notre pays d’une manière générale il est largement temps de mettre fin à la situation de déliquescence que connait ce secteur stratégique et vital.

Pour commencer, au delà des faveurs Présidentielles, l’ensemble des acteurs devaient se réunir au plus vite autour d’un cadre d’échanges et de réflexion sur les principaux défis auxquels ce secteur est confronté et ainsi proposer des solutions viables et transparentes. Car le chaos qui règne dans ce secteur est imputable à l’absence de clarté dans les responsabilités mais aussi au manque de transparence au niveau des différents postes de gestion.

Mpaly Coulibaly
Journaliste free lance



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Commentaires (1)

  • Ibadou (H) 21/04/2014 10:51 X

    Très belle analyse de la situation du ppg, ce qu'il faut c'est la volonté politique et l'aide de l'état, non pas à annuler des dettes mais à considérer ces paysans, en évitant le deux poids deux mesures. Les paysans de l'Adrar viennent d'être choyés par des mesures significatives de protectionnisme à bon escient.