22-09-2014 20:30 - Film Timbuktu : Un vecteur de clichés largement relayés

Film Timbuktu : Un vecteur de clichés largement relayés

Journal Tahalil - J’ai vu la première projection en Mauritanie de «Timbuktu», le film d’Abderrahmane Sissagho et j’ai assisté -sans poser ma question- en fin d’après-midi du 21 septembre, à une partie de la conférence de presse donnée par l’auteur.

La projection a connu de l’affluence parce qu’elle a été boostée par la présence du Président Aziz, de son Premier ministre et de ses ministres, dont celle de la Culture qui a parlé d’une «consécration du génie» de l’auteur, lequel, s’est dit à son tour «ému» parce que c’est la deuxième fois en Mauritanie qu’un président assiste à la projection d’un film après Moctar Ould Daddah en 1974.

Auteur d’un millier d’articles et interviewé au moins une centaine de fois sur le sujet du film , je pensais qu’il allait répondre à la question : Comment en est-on arrivé là et qui en est responsable ?

J’avoue avoir été déçu, «Timbuktu» n’ayant été, au finish, qu’un vecteur de clichés largement relayés par une certaine presse qui tait les causes ayant permis à des illuminés de gouverner de pauvres gens qui n’ont pas fui les villes du Mali tombées sous la coupe des groupes armés début 2012.

Pas de scènes où l’on voit la déliquescence à Koulouba , la corruption généralisée, la mainmise des groupes armés sur des pans du territoire malien, le dénuement des populations, leur exode vers les pays du voisinage et le refus d’une armée régulière d’aller se battre jusqu’à ce que des militaires français se décident de le faire à leur place, début 2013.

Le film ignore donc le chaos qui prévalait et se jette sur ses conséquences. Elles lui servent d’ailleurs, d’entrée : Chasse à la gazelle par des miliciens qui ne craignent pas les services des eaux et forêts, hors-la-loi qui criblent des statues de balles et qui viennent à moto en ville imposer le port du voile, interdire la musique, la cigarette, le football, les pantalons longs et procéder à des flagellations et lapidations.

Mais à trop vouloir mettre en évidence l’absurdité des miliciens le film n’aura pu s’empêcher de leur trouver des excuses et même, parfois, des qualités : le milicien noir qui a opté pour un mariage forcé a d’abord demandé la main de sa proie, le nomade blanc qui a assassiné le pécheur noir s’est vu interpeller en un temps record et condamner à mort, les patrouilles qui font la ronde nocturne rencontrent rarement des suspects, parfois, un âne seulement, et les miliciens, eux même, sont des fêtards comme leurs victimes, car il y en a qui fument en cachette et aiment regarder les belles femmes dévoilées.

Plusieurs scènes frappent les esprits dans ce film à merveilleuse musique, notamment, quand une femme flagellée pour avoir chanté s’est mise à le refaire lors de son supplice , puis la séquence où une femme exaspérée tend un couteau à des miliciens et leur demande de lui couper les mains; les jeunes qui ont trouvé l’astuce de jouer au football sans ballon, et le bonheur brisé de la très sympathique petite «Toya» , qui a perdu toute sa paisible famille.

Les milices, c’est connu, prennent toujours le relais là où il y a faillite de l’Etat, pour commettre des crimes contre l’humanité. Mais c’est d’une telle faillite, qu’advient, la non assistance à peuples en danger.

«Timbuktu» ne nous a montré qu’une partie de ce qui s’est passé, et que nous savions déjà.

IOMS



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