27-05-2015 10:35 - Moutons de Panurge

Moutons de Panurge

Le Calame - Alors qu’il a déjà visité quatre régions, dans un vacarme assourdissant de salueurs, voitures, défilés et inaugurations de tout et de rien, lors de spectacles obséquieux que la morale réprouve et d’où suinte la flagornerie et le déshonneur, notre guide éclairé s’apprête à reprendre ses visitations à partir du 28 courant, au Brakna et au Trarza.

Deux régions, comme celles qui les ont précédées, éprouvées par le manque de pluie et une longue période de soudure, tandis que les pauvres populations, mobilisées par de petits roitelets locaux, sont obligées de sortir pour accueillir celui qui « a sauvé le pays d’une dérive certaine en 2008 ».

Partout ce sera le même spectacle : de longues processions d’individus, serrés comme des sardines, généralement sous un soleil de plomb, pour accrocher l’auguste main. Et un président, lunettes noires vissées au visage, qui passe, tendant la main comme un automate, décidé à en finir avec des scènes qui doivent certainement le révulser.

Il en a pourtant vu d’autres, notre génie des sables. Lui qui gravitait dans le giron de Maaouya a vu les mêmes visages se prosterner, courber l’échine et s’humilier, en échange des quelques miettes que le seigneur du moment condescendait à leur jeter.

Dix ans après le départ de celui qu’on affublait de tous les noms, aussi flatteurs les uns que les autres, il est désespérant de constater que son tombeur retombe dans les mêmes travers. D’autant plus que, dans tous les cas, c’est toujours le peuple qui trinque. Affamé, assoiffé, mal logé et mal soigné, celui-ci n’est pas censé attendre grand-chose d’un pouvoir qui le martyrise mais, tel un troupeau de Panurge, il sortira, le jour J, pour accueillir son « héros ». Il faudrait plus qu’une armée de psychanalystes pour expliquer de tels comportements.

Tout aussi déconcertants que ceux en cours au sommet. Le dernier en date remonte à vendredi dernier. Le Président a procédé à un mini-remaniement. Provoqué par le départ de Sidi ould Tah à la BADEA, l’exercice a donné lieu à une énorme surprise : Ould Raïss de retour au gouvernement, par la grande porte, de surcroît ! Renvoyé, il y a quelques mois, de la Banque Centrale, alors qu’il venait à peine d’y entamer son second mandat, on le disait pourtant en disgrâce pour de bon, accusé qu’il était de ne pas avoir pris les mesures idoines, pour éviter la banqueroute de la Maurisbank, et de n’avoir pas donné, au Président, les bons chiffres sur nos réserves en devises.

Une seule explication logique à ce retour : il n’aurait fait qu’exécuter les ordres. A moins que la logique ne soit en rien de mise ici. En Mauritanie nouvelle, rien n’est jamais définitif. On peut être relevé de ses fonctions pour malversations ou détournements et revenir à un poste de responsabilité plus important. On peut être mis en demeure par l’IGE ou la Cour des Comptes de rembourser des sommes détournées et rebondir avant même la fin des échéances. De tels cas sont légion. Tout dépend, de fait, de l’humeur du chef. Elle fait office, en Mauritanie, de raison d’Etat. Un bon expédient, sans doute, pour s’assurer de la docilité des moutons. En dépit de la leçon de la fable ?

Ahmed Ould Cheikh



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Commentaires (8)

  • Le pacte (H) 27/05/2015 21:14 X

    J’ai l’habitude de lire l’éditorial de AOC que je trouve parfois intéressent voire même offensifs. Mais pour ce qui est de son éditorial d’aujourd’hui, j’aimerais tout simplement attirer son attention ainsi que celle des lecteurs que Panurge ne possédait pas de troupeau. Je vous livre l’histoire de panurge telle qu’elle est : Cette expression est née suite au chapitre 7 du Quart Livre de Rabelais. L’auteur y décrit la vengeance de Panurge, qui voulait acheter un mouton au négociant Dindenault. Celui-ci refusa et se moqua longuement de son interlocuteur. Panurge finit par réussir à acquérir un mouton et pour se venger, le jeta dans la mer. Tous les autres moutons du vendeur en firent autant. Dindenault, tentant de retenir le dernier, fut emporté et se noya, tout comme ses bêtes. Le mouton étant réputé pour être un animal faible et peu intelligent, on emploie aujourd’hui cette expression pour désigner une personne qui de plie à un règlement sans réfléchir à son bien-fondé. Ma source : WIKIPEDIA

  • SOMACIRE (H) 27/05/2015 15:59 X

    En fait le vrai probleme c'est les mauritaniens et leurs mentalités auxquelles il faut s'attaquer....Aziz n'en est pour rien...il les a trouvés devant lui et resterons comme tel après lui

  • sybasarr (H) 27/05/2015 15:04 X

    Histoire de pauvre et de misere. A une personne proche, j'ai demande quand est ce que tu seras a Nouackchott, elle me repond, j'attends la visite du persidan. Alors, qu'est ce qui te lie a cette visite; tu t'attends a quelque chose. Elle dit: Non, mais mes cousins, eux sont proches du Roi, on s'occupent des hotes et ils vont apporter de l'argent. Misere de citoyen endormi.

  • synthetiseur (H) 27/05/2015 14:21 X

    "Inne Allaha Laa Youghayirou maa bighawmin hattaa you ghayirou ma bianvoussihim" Le changement de mentalité ne viendra que des mauritaniens Allah le tout puissant leur a confié cette mission et visiblement ils lui désobéissent en faisant le choix délibéré de la flagornerie, de l'hypocrisie et du mensonge pas tous certainement mais en tout cas les moutons de panurge font légion. Même ceux qui aiment Aziz ne font pas ce genre de cinéma.....Ils se tiennent derrière et regardent ces guignols en pouffant de rires.... en les voyant se donner comme ça en spectacle;Et puis pour les pauvres populations de l'intérieur désoeuvrées et ignorantes passe mais pour les élites, cadres et intellectuels...C'est tout simplement incompréhensible

  • Bounana (H) 27/05/2015 14:07 X

    Ne vous inquiétez pas Monsieur. Dans quatre à cinq siècles, la Mauritanie aura changée et les mentalités des maures, je dis bien les maures et non tous les mauritaniens, auront changés. Un peu de patience !

  • KANTAKI (H) 27/05/2015 13:12 X

    Ahmed,jolie verve, bon style mais des incohérences à la pelle! Qu'avez vous à faire des raisons qui auraient remis Ould Raiss en selle? Vous auriez du tout simplement penser aux gris-gris de kountas, si non comment expliquer cela de façon rationnelle? Toujours est -il que le PR peut nommer qui il veut à la place qu'il veut pour les raisons qu'il estime utiles et objectives en soi. Ould raiss, c'est l'inefficacité née, un beau parleur qui sait meubler le temps, vous mettre en colère et se faire pardonner par défaut! Ahmed, n'êtes vous pas un mauritanien en puissance? Allez circulez!

  • mohamed hanefi (H) 27/05/2015 11:52 X

    des scènes qui doivent certainement le révulser. Mais pourquoi diable, continue t-il donc? Est-il possible que l'image qu'on sculpte de lui, ne lui parvienne que déformée par un miroir inversé, qui l'empêche de voir, d'entendre, de comprendre et même de dire NON. Ne peut-il observer ces scènes simiesques ou des pauvres défilent a longueur de journée, quelques jours avant son passage pour lui dire "Nous sommes représentés par un tel "roitelet", que lui-même a placé quelque part dans les affaires de la république." ? Est-il "joueur" ou "joué" ? Mseykine notre président. Wallahi parfois il m'inspire la pitié. A telle point que parfois, au milieu de la nuit, je me réveille, tends les mains au ciel et m'adressant au Maitre de l'aube naissante, je dis: "Merci mon Dieu d'avoir fait de moi une si insignifiante personne, que sa petitesse a sauver des yeux perçants des rapaces.

  • duroowo (H) 27/05/2015 11:27 X

    Une analyse extraordinaire tout est vrai pour quoi les fonctionnaire mauritanein ont besoin de partir amener par force ou tribalisme ces pauvres population sous le soleil que nous connaisson actuellement a l'interieur pour applodir pour un dictateur? Sa me rappel le petit du Nord Corea. Si un dirigent est un bon n'est pas besoin du tribalisme pour etre accueilli par ce que les muritaniens normaux sont des bonnes personnes.