30-05-2015 13:12 - Assistance judiciaire : Encore des failles à boucher
L'Authentique - Le conseil des ministres avait adopté lors de sa dernière réunion hebdomadaire du jeudi 21 mai dernier, un projet de loi qui annule et modifie la loi 2006-05 du 26 janvier 2006 portant assistance judiciaire.
Une revendication qui a toujours été formulée par l’Ordre national des avocats et les organisations des droits de l’homme dans la mesure où cette loi permet aux populations les plus défavorisées d’avoir accès aux services judiciaires, l’Etat prenant en charge toutes les charges y afférentes.
Seulement, les spécialistes du droit trouvent que le projet de loi comporte des failles qu’il faut immédiatement boucher pour prévenir toutes malversations qui pourraient résulter de son application.
L’assistance judiciaire a toujours été au cœur des préoccupations des défenseurs des droits de l’homme et des acteurs du système judiciaire en Mauritanie.
Jusque-là en effet, les populations pauvres et marginalisées n’avaient pas accès aux services de justice vu les coûts financiers énormes que requièrent de telles démarches. En effet, hormis le transport, les justiciables issus de ces franges devaient aussi faire face aux frais de justice et à ceux d’un avocat ou d’un expert.
Cette absence de l’Etat dans la garantie d’accès aux services de justice à tous les citoyens a toujours été une violation flagrante des droits de l’homme contre laquelle l’Etat mauritanien n’avait que peu d’arguments.
Une loi a été certes prise dans ce sens en 2006, sans qu’elle puisse cependant être mise en œuvre compte tenu de plusieurs dysfonctionnements. En 2014, un atelier de réflexion de deux jours a été même été organisé avec l’aide du PNUD pour sensibiliser les acteurs sur les moyens d’activer la loi sur l’assistance judiciaire.
L’Etat mauritanien a ainsi depuis quelques années ressenti le besoin de prendre une telle disposition pour garantir l’application des principes de protection par la justice, des droits des citoyens et leur égalité devant la loi. Celui qui n’avait pas les moyens de payer les honoraires d’un constat, d’une expertise ou d’une convocation de son adversaire ou d’entreprendre une procédure judiciaire, voyait ainsi ses droits se perdre.
Aujourd’hui, le gouvernement mauritanien reconnaît n’avoir pas pu mettre en branle les mécanismes de l’ordonnance 05-2006 du 26 janvier 2006 instituant l’assistance judiciaire, ses textes d’application et la gestion des bureaux créés pour les besoins. Une nouvelle loi est en voie d’être adoptée après avoir été validée par le conseil des ministres et les observateurs se demandent jusqu’où les autorités politiques vont-elles traduire leurs intentions en actions réelles.
Nonobstant cette volonté politique qui a du mal à se dessiner sur ce plan, certains juristes déclarent avoir décelé dans le projet de texte à l’étude plusieurs failles qui seraient autant de portes ouvertes pour les détournements et les malversations financières.
Le projet de texte comporterait un autre danger, celui d’une assistance judiciaire chapeautée par l’Exécutif, à travers le Parquet de la République qui coiffe la commission chargée de l’assistance judiciaire.
Dans d’autres pays, où l’exigence d’indépendance de l’organe chargé des mécanismes de l’assistance judiciaire est de rigueur, une telle commission est présidée par un magistrat du siège inamovible. Autant d’observations et de remarques pertinentes que les partenaires au développement qui financent le projet devront prendre en compte pour corriger ces dysfonctionnements, selon les experts du droit.
A rappeler qu’en 2014, c’est une enveloppe de 60 Millions d’UM destinée à l’assistance judiciaire qui a été rendue intacte en fin d’année au Trésor public faute d’utilisation, alors qu’elle aurait pu servir au moins à une centaine de justiciables pauvres.
MOMS