29-06-2016 15:10 - Libre Expression | Cette grandeur là de cette tribu là

Libre Expression | Cette grandeur là de cette tribu là

Mohamed Hanefi - A la fin du conte de ce drame, certainement beaucoup me demanderont : "Qu'est ce qu'elle a fait la petite?". La réponse surprenante est que son grand père hébergeait et nourrissait tout celui qui, dans le besoin franchissait le seuil de sa maison.

Un homme "noble", parmi les hommes "nobles", de cette "noble" tribu là se présenta et demanda sa main à sa famille. Comme de coutume dans pareille occasion, la joie de la famille fut intense et les parents, malgré leur modeste situation sortirent ce qu'ils avaient et ce qu'ils n'avaient pas pour que la cérémonie ne manque d'aucun élément de sa liesse, de sa festivité et de son enchantement.

La jeune épousée après une cérémonie tant attendue et tant souhaitée fut livrée, pieds et poings décorés de henné à son époux. Elle était encore bien jeune la petite nouvelle femme. Mais les parents confiants d'avoir donné leur enfant au sponsor de sa vie de son avenir et de son bonheur, dormirent ce soir là l'esprit tranquille et les âmes en paix.

Ils ne pouvaient ni imaginer ni savoir, les pauvres que les ondes de la fausse baraka, peuvent quelquefois émettre les radiations des malheurs. B…, encore sous l'effet des vapeurs de la réalisation du rêve de ses rêves, prit le chemin, avec son nouveau maitre, vers le "campement" de la tribu.

Elle était belle et polie la petite mariée. Mais elle sentit dès son arrivée qu'elle n'était pas si bienvenue qu'elle ne le pensait. La manipulation du kleenex dans sa main, sa propreté vestimentaire, la clarté de ses gestes semblaient agacer les femmes.

Et les regards des hommes grands et petits qui défilaient pour la soupeser créaient en elle un malaise douloureux qui contrastait avec le fond secret de ses espoirs. Elle s'attirait tous les regards et il était évident que quelque chose de bien sublime la distinguait de tous les autres et de toutes les autres.

Quelque chose de lourd et de malsain tournait cependant autour d'elle. Une décharge d'énergie négative planait autour d'elle et emplissait la tente, à laquelle elle essayait de s'adapter malgré sa naissance citadine et les principes de sa culture plutôt un peu plus "hygiénique".

Mais son esprit alerte et les rigueurs de son éducation, lui imposait d'autre reflexes. Elle s'appliquait à garder son voile tiré sur le visage, pour ne pas se découvrir devant ses beaux parents, sa "belle" famille. Et les yeux baissés, elle saluait la procession interminable, de sa petite voix fluette.

À travers ses répliques timides, presque inaudibles, elle distillait tous les timbres de politesse et de respect qu'elle pouvait émettre. Elle ne pouvait comprendre que sa faiblesse attirait et émoustillait la tyrannie des autres.

Elle planifiait malgré cette peur taciturne qui la pressait, la prenait à la gorge et dont elle ne pouvait préciser la nature, de transformer sa peur en buts. Elle se promettait de gagner ces cœurs arides et secs, et à servir tout ce monde jusqu'en faire des sœurs, des mères, des pères et des voisins qui l'aimeraient sans limites.

Elle ne pouvait imaginer la petite jusqu'ou peuvent aller la cruauté et l'arrogance de l'homme.

Le lendemain fut un autre jour.

Les femmes et les filles du village qui piaillaient autour d'elle, la regardaient avec un certain mépris et lui adressaient la parole avec une légèreté et un dédain agressifs, qu'elle ne pouvait plus ignorer.

Apeurée, elle chercha des yeux son mari, qui s'était fondu dans le village. Sa mission semblait s'être limitée à amener sa victime sur le lieu de son supplice. Au milieu de la matinée, un vieux se présenta, ou plutôt d'après sa situation physique, on le présenta sous sa tente.

Il regarda la petite, la déchiffra point par point, et virgule par virgule et lui lança entre des dents qui ne semblent jamais avoir été examinées par un dentiste: "J'ai tété les mêmes mamelles que ton père. Tu es une Hartaniya."

Quelques jeunes assistantes gloussèrent et pouffèrent malicieusement dans de vieux voiles décolorés. Elles regardaient la pauvre avec un mépris insistant, qui lui glaça les veines.

Une Hartaniya…Une Hartaniya…Une Hartaniya… Qu'est ce qu'une Hartaniya? Elle ne pouvait assimiler la lourdeur de ce qualificatif, qui pourtant s'adressait à elle et la confinait dans le seul coin de mépris de cette tente, de ce fils de "grande tente" au milieu de cette tribu de "grandes tentes". Cet homme qui a traversé des dizaines de kilomètres pour la ravir à la chaleur, la dignité et la fierté familiale.

Une Hartaniya…Qu'est ce qu'une Hartaniya? Qu'a-t-elle de moins que les "non"-Hartaniya?

Tard dans la nuit au milieu de la cacophonie rythmée et endiablée des grillons, les yeux fixés sur le "Hoummar" de sa tente, de cette famille de "grande tente", les yeux humides et tristes, ouverts dans l'obscurité, le cœur gros de chagrin, elle essayait de comprendre. Pourquoi ces gens n'ont-ils un sens ou une importance que par l'entretient du mépris des autres?

Qui sont-ils et qu'est ce qu'Allah leur a donné de plus qu'elle pour qu'ils dépensent tant de peine et d'effort pour la rabaisser de la sorte? Un youyou lointain déchira le rideau opaque de la nuit. La tribu fêtait sa noblesse et la "pureté" de sa lignée sur fond de larmes d'une pauvre hôte, qui pensait être tombée entre les mains d'être humains, et entrée sous les tentes de la générosité de la piété et de la crainte de Dieu.

Et ils osent parler de changement !!!

Le changement positif se fait de l'intérieur. On ne peut changer un système sans apporter du nouveau. On ne peut changer une société seulement en surface. Quand on ne change qu'en surface, on triche surement dans le fond. "Allah ne change ce qui est en un peuple que si ce peuple change ce qui est dans ses âmes."

On ne peut attribuer le mal à Dieu. Le mal n'est pas justifiable par la Sagesse Divine. Le prophète (psl) a dit que le summum de la méchanceté pour un individu est de mépriser son frère musulman.

Et même si on faisait abstraction de la foi, il faudrait bien apporter des preuves crédibles et digestibles qui prouvent que certain personnes sont supérieures aux autres, par une naissance sous la khalva d'une tente. Il n'-y-a de supériorité que par la foi. C'est Allah qui le dit.

Etre noble c'est tout d'abord l'être et le vivre dans comportement. Ces agissements d'un autre âge sont tout simplement ridicules et méprisables. Et puis comme Allah, le Meilleur de ceux qui disent a dit " Si vous vous moquez de nous, alors nous nous moquons de vous comme vous vous moquez." Houd-38 On ne peut jamais changer dans une continuité ou en innovant dans la ressemblance. Les prophètes sont ce qu'ils sont parce qu'ils ont apporté de véritables changements.

Il faut absolument changer ces modes de vie désuets et honteux. Changer la pensée, les sentiments. Nous devons apprendre comment faire un changement positif réel. Il faut changer les mauvaises croyances, les mauvaises convictions, les mauvaises relations entre groupes sociaux changer les idées qui peuvent nuire aux rapports sociaux.

Changer c'est remplacer un état ou une chose par autre chose et non pas par la même chose travestie. On ne peut jamais agir mal et se proclamer de Dieu. Le mal ne peut être attribué au Seigneur. Le Juste.

Celui qui agit mal au nom d'Allah est un Satan masqué.

B…est revenue chez elle. Une jeune divorcée qui a laissé sa foi en sa société là bas derrière les dunes chez des humains qui prétendent régler le cours de la morale et de l'honneur et de la grandeur.

Elle sait désormais qu'elle est beaucoup plus noble que ces hommes et ces femmes pour qui elle a apporté tout son amour et qui en retour l'ont mutilée et traumatisée avec le souffle fétide d'une haine et d'un racisme duquel l'envoyé (psl) a dit: "éloignez-vous en il est nauséabond."

Méditez cet épisode, parce que le comprendre permet de comprendre et de déchiffrer l'appareil mental qui menace les fondements cette société. La tribu, les personnages, la victime, je les connais tous. Je connais parfaitement pourquoi ils avaient agi de la sorte. Les citer ne présente aucune importance. Leur compte est auprès d'Allah.

L'essentiel est que tout musulman sache que médire d'un musulman, au vu du Seigneur des mondes équivaut à se repaitre du cadavre de son propre frère décédé. Nous nous débarrasseront de ce mal ou tôt ou tard il se débarrassera de nous. Comme disent les maures "on ne se relève pas de chaque perte de connaissance." Ceci est une histoire vraie, qui m'a été relatée par les intéressés eux-mêmes ma première nuit sur la terre natale.

Je n'ai pas dormi cette nuit là le cœur essoré par la tristesse.

Mohamed Hanefi. Sur la route d'Aleg.



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Source : Mohamed Hanefi
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Commentaires (3)

  • a.bennan (H) 29/06/2016 23:16 X

    Histoire triste et affligente.Le parfait aussi n'existe pas meme chez les nobles.Allah ns a creer aussi differents et ce,en peuples et tribus...et forcement il y a des nobles des moins et des pas dutout.

  • Haiballa (H) 29/06/2016 16:16 X

    C’est vraiment triste et malheureusement ceci continue à persister dans notre société. Personnellement j’ai beaucoup plus d’estime et de respect pour les Haratines que pour ces pseudos-nobles

  • Ndiamndi (H) 29/06/2016 16:04 X

    Je suis tout à fait d’accord quand vous dites: «la noblesse c’est le comportement de l’individu». Ceci est tellement vrai que, au cimetière (a l’entrée de Nouakchott en venant de Rosso), il n’y a pas de « fils de grande tente » et « fils de petite tente». Tout le monde est y «fils de la terre» !