03-12-2016 08:45 - Les enfants autistes mauritaniens livrés à eux-mêmes !

 Les enfants autistes mauritaniens livrés à eux-mêmes !

DuneVoices - Le cri de cœur de Nassiba Mint Yayi a fait frémir plus d’un lors de la réunion des cadres, tenue à Tidjikja le 14 novembre 2016. « Ma situation économique ne me permet plus de pouvoir prendre en charge les enfants autistes qui fréquentent mon centre. Je suis désemparée et je suis sans soutien face à la situation de ces êtres fragiles et sans repère.

Chaque jour je reçois la visite des parents d’enfants autistes qui me supplient de faire mon possible pour que leurs enfants retrouvent le cadre propice leur permettant de ne plus s’exposer à la divagation. Les parents ont toutes les peines du monde à pouvoir les surveiller.

Il suffit d’un tout petit moment d’inattention pour qu’ils disparaissent dans la nature. J’invite les autorités publiques à s’occuper de ces enfants. Personnellement, je n’en peux plus »
soutient-elle. Cette interpellation en dit long sur la situation des enfants autistes mauritaniens laissés à eux- mêmes ne bénéficiant d’aucune prise en charge spécifique.

La seule structure qui les prenait en charge est celle qui avait été mise sur place par Mme Nassiba.

Maman du premier enfant mauritanien autiste interné en Tunisie en 2010.

Cette dame qui a vu défiler huit cas similaires a pris sur elle l’engagement, une fois de retour en Mauritanie, de créer une structure d’accueil pour permettre aux enfants autistes mauritaniens issus de familles pauvres d’être pris en charge sur place.

C’est ainsi que de janvier 2014 à septembre 2016 le centre qu’elle mettra en place prendra en charge une vingtaine d’enfants autistes qui bénéficieront des soins en ergothérapie en orthopédie et en kinésithérapie.

« J’ai reçu le soutien des spécialistes tunisiens qui ont séjourné à Nouakchott durant cette période et des soins ont été prodigués aux patients du centre au grand bonheur de leurs parents qui avaient commencé à percevoir une lueur d’espoir de voir un jour leurs enfants guéris. Mais n’ayant aucun accompagnement de la part des pouvoirs publics le centre a cessé de fonctionner au bout d’une année et demie.

Les enfants qui y étaient pris en charge sont actuellement dans un profond désarroi. C’est pour cela que j’ai interpelé les autorités pour qu’une action judicieuse efficace et plus pérenne soit prise pour sauver ces pupilles de la nation des mauvaises conséquences des troubles du développement les condamnant à vivre le reste de leur vie dans la dépendance »
confie Nassiba.

En effet, selon les spécialistes qui se penchent sur cette maladie congénitale, il est établi que « l’autisme, le trouble autistique ou plus généralement les troubles du spectre autistique (TSA) sont des troubles du développement humain caractérisés par une interaction sociale et une communication anormales, avec des comportements restreints et répétitifs. Les symptômes sont généralement détectés par les parents dès les deux premières années de la vie de l'enfant ».

D'après l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), des dizaines de millions de personnes sont atteintes d'autisme en Afrique. Une majorité de pays sur le continent n'a pas de structures adaptées pour traiter le syndrome et la population n'est pas assez informée sur les soins. En Mauritanie en l’absence de statistiques officielles, certaines personnes qui s’intéressent à la question, à l’image de Nassiba Mint Yayi, pensent que le phénomène commence à s’étendre pour atteindre plus de 40.000 individus. L’écrasante majorité des cas recensés ne bénéficient d’aucune prise en charge.

Le Ministère des Affaires Sociales, de l’Enfance et de la Famille ne cible pas les enfants autistes comme des cas spécifiques et par conséquent aucune attention particulière ne leur est réservée.

Selon Aminetou Mint Neama coordinatrice régionale du Ministère des Affaires Sociales, de l’Enfance et de la Famille (MASEF) en charge du Tagant, aucune structure spécialisée n’existe localement malgré le recensement de quelques cas au niveau de cette province.

« Périodiquement nous recevons des aides de l’Etat ou des donateurs internationaux pour les distribuer aux nécessiteux et aux handicapés pas plus. A défaut de pouvoir leur apporter des soins appropriés nous faisons bénéficier ces aides aux enfants autistes et leurs familles » soutient-elle.
Ces enfants autistes mauritaniens font également face à un rejet social du fait de dangereux préjugés. Selon l’intervenante : « Les enfants autistes sont assimilés dans certains milieux en Mauritanie à des démons, ils sont craints et rejetés par leurs camarades d’âge.

Pire, des charlatans n’hésitent pas à les indexer comme étant la cause d’un malheur qui s’attaque au voisin de palier. Dès lors les malheureux parents vivent mal cette situation de culpabilité et sont obligés le plus souvent à soustraire leur enfant de la vue des autres en les enfermant continuellement comme de vulgaires prisonniers ».


La société civile mauritanienne qui devait jouer un rôle de premier plan dans la lutte contre cette stigmatisation n’étant pas très informée sur les dessous de ce mal, ne peut en aucun cas monter au front. « La première fois que j’ai entendu parler d’enfants autistes c’est avec Nassiba Mint Yayi. J’ai toujours cru que les enfants qui présentent les symptômes décris par elle, sont des « enfants du diable ».

Aussi longtemps que je me rappelle on a toujours défendu aux femmes qui viennent d’accoucher de faire très attention et de surveiller leurs nouveau-nés de peur que le diable les subtilise » affirme Fatimata Kane présidente de l’ONG « bien être familiale » qui pense qu’avec la plaidoirie de Nassiba elle a désormais un regard différent vis-à-vis de ces petits êtres innocents.

Elle promet surtout de s’engager à lutter contre les préjugés dont ils sont victimes et d’aider à la mise en place d’une structure appropriée pour leur prise en charge.



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Source : DuneVoices
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