04-01-2018 13:12 - France-Sahel: quand la sécurité conditionne et prime sur l’aide au développement

France-Sahel: quand la sécurité conditionne et prime sur l’aide au développement

Le360 - Les pays les plus pauvres d'Afrique sont «les oubliés» de l’Aide publique française au développement, estiment Olivier Lafourcade, ancien directeur à la Banque mondiale et président d'INvestisseurs & Partenaires, et Serge Michailof, ancien directeur à la Banque Mondiale et à l'Agence française de développement (AFD), deux spécialistes du sujet, dans une tribune publiée récemment par le quotidien «Le Monde» sous le titre: «Les pays les plus pauvres sont les grands oubliés de l’aide française au développement».

Ce constat est le résultat «d’une politique d’aide opaque et inadaptée». Il est tout particulièrement valable pour l’Afrique, notamment les pays du G5 Sahel, organisation regroupant le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad.

Ces Etats sont considérés comme la ligne de front dans le cadre de la lutte contre le terrorisme dans la région. Il s’agit ainsi d’une zone hautement sensible au plan géostratégique et sécuritaire, qui émarge toutefois faiblement au budget de l’aide au développement, avec une enveloppe annuelle de 80 millions d’euros seulement.

Dans le même temps, la France fournit un effort budgétaire annuel de 650 à 700 millions d’euros pour entretenir la force antiterroriste «Barkhane».

Dans leur document les 2 spécialistes ajoutent: "Alors que notre Aide publique au développement (APD) déclarée oscille, selon les années, entre 8 et 10 milliards d’euros et que le chiffre d’affaires de l’Agence française de développement (AFD) est supérieur à 9 milliards d’euros, notre effort budgétaire effectif est de 2,37 milliards d’euros. Mais l’enveloppe de dons et projets (200 millions d’euros environ) confiée à l’AFD reste inchangée depuis 10 ans".

Poussant l'analyse, les deux experts expliquent qu'en répartissant ce montant au 16 pays dits prioritaires, "ce montant conduit à des allocations de l’ordre de 12 millions d’euros par pays.

Ce qui donne pour résultats des sommes dérisoires, avec lesquelles on ne peut guère espérer avoir un impact ou exercer un effet de levier permettant de mobiliser les ressources des institutions multilatérales et européennes sur des projets concrets, ou nous pourrions apporter notre expertise et faciliter un ciblage efficace".


Ainsi, avec ces montants, on gère plus les efforts de lutte contre une pauvreté endémique à la place de véritables actions de développement de nature à transformer les conditions d’existence des populations.

Par ailleurs, ces analystes rappellent que «depuis longtemps, des parlementaires et diverses personnalités se plaignent de l’opacité de l’annexe au projet de loi de finances portant sur l’Aide publique au développement (APD).

Cette question a pourtant fait l’objet d’une recommandation particulière de la Commission des Affaires étrangères et de la Défense du Sénat qui, en 2012 déjà, déplorait une politique d’Aide publique au développement (APD) longtemps synonyme d’opacité, notamment au niveau du budget dont les enjeux ne peuvent être compris que d’un nombre restreint de spécialistes, et opacité des statistiques qui agrègent des données hétérogènes».


Une contradiction flagrante entre les ambitions du nouveau président, Emmanuel Macron, de promouvoir la simplicité et la clarté, dans la formulation et la conduite des politiques, et les dédalles d’une administration aux procédures bureaucratiques à la dent dure.

Dans son esprit général, la tribune de Lafoucade et Mikhailof déplore aussi le fait que dans la configuration actuelle des rapports entre la France et l’Afrique, et au-delà, entre l’Europe et l’Afrique, «la sécurité conditionne l’aide au développement». Une évolution dictée par le développement à une grande échelle des réseaux terroristes islamistes.

Par notre correspondant à Nouakchott Cheikh Sidya



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Source : Le360 (Maroc)
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