22-02-2018 18:00 - 2018 : L’année de tous les risques, l’année de tous les possibles

2018 : L’année de tous les risques, l’année de tous les possibles

Initiatives News - L’Union Pour la République, le parti au pouvoir, est dans des tractations internes depuis plusieurs semaines.

Une commission ad hoc évalue l’action du Parti dans la perspective de l’année politique qui s’annonce difficile pour un Parti miné par les dissensions internes et par les attaques qu’il subit de la part du gouvernement qui devait être son émanation. Les 2, 3 et 4 mars prochains s’ouvrent des assises du parti. Ces journées de réflexions devront déboucher sur une campagne d’implantation.

Une manière de s’inscrire dans le futur alors que le présent n’est pas suffisamment bien géré. L’année 2018, année charnière, est un enjeu de temps pour tous les acteurs de la cène politique. C’est aussi l’année de tous les risques…de tous les possibles.

2018 est l’année politique par excellence. Au moins trois élections doivent se dérouler avant la fin de cette année : les Législatives, les Municipales et les Régionales. Chacun de ces rendez-vous électoraux est en lui-même un défi pour les acteurs. Avec les risques qu’il fait courir et les opportunités qu’il pourrait ouvrir.

Le monde politique est-il prêt ?

L’un de ces scrutins – sans doute le plus risqué parce que nouveau – est celui qui va permettre la désignation des Conseils régionaux qui auront à définir les politiques à même de promouvoir le développement économique, social, culturel et scientifique local.

De la Wilaya à la Région

Désormais, la région est reconnue comme «une collectivité territoriale» jouissant de la personnalité morale et de l’autonomie financière. Au plan du territoire, elle épouse les limites des Wilayas actuelles.

Deux organes gèrent la Région : le Conseil régional élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans et l’organe exécutif issu de celui-ci. En fait, c’est le tête de liste gagnante au suffrage universel qui est obligatoirement le Président du Conseil régional. Les vice-présidents sont élus par leurs pairs et leur nombre est déterminé par celui des conseillers qui dépend du poids démographique de la région.

C’est ainsi que la Région ayant moins de 60.000 habitants aura un Conseil de 11 membres, de 60.001 à 100.000 habitants le Conseil est de 15 membres, 21 membres pour les régions ayant 100.001 à 200.000 habitants et 25 membres dans celles ayant plus de 200.000 habitants. Si Nouakchott est érigée en une collectivité régionale unique correspondant à la Communauté Urbaine d’aujourd’hui, Nouadhibou a un régime particulier.

Comment vont s’organiser les partis pour concocter leurs listes et pour se donner le maximum de chances pour avoir la gestion locale ? C’est le principal terme de défi qui va se poser particulièrement aux grands partis comme l’Union pour la République, Tawassoul ou le Rassemblement des forces démocratiques, si ces deux derniers sont dans la course.

Politique : « l’opposition n’a pas su influencer le cours des choses. » (Me Bettah)

Deuxième niveau en termes de défis, les Législatives prochaines. On se battra pour 155 sièges à pourvoir dans une Chambre désormais unique. Ce qui rend les enjeux plus importants dans la mesure où tout se passera pratiquement devant les députés futurs.

Se porter candidat est facilité par la réduction de la caution de 20 à 10.000 UM et par la simplicité du dossier. Même simplification pour les candidats aux Municipales qui devront désormais payer 5000 au lieu de 10.000 UM.

La CENI avant tout

Mais avant cela, il va falloir penser à l’organe ayant en charge le déroulement des scrutins : la Commission électorale nationale indépendante (CENI).

Le nouvel organe directeur de la CENI compte 11 membres au lieu de 7. Ils sont nommés par décret mais sur proposition de la Majorité et de l’Opposition. Le processus de choix prévoit une liste de 22 noms proposés à raison de 11 membres pour chaque groupe (Majorité et Opposition). Le Président de la République choisit parmi eux, les 11 membres du «Comité des Sages» qui, à leur tour, désignent parmi eux leur président.

La désignation des membres de la CENI est la prochaine étape attendue depuis quelques semaines. L’urgence étant de mettre en œuvre le dispositif pour permettre le déroulement de toutes les élections dans les délais impartis. Mais le Président de la République ne semble pas pressé d’en finir. Comme il a refusé de tirer les conclusions du référendum d’août dernier, il hésite à aller de l’avant, conscient qu’il est de la nécessité pour lui de ne pas aborder les échéances futures avec «la devanture actuelle».

Tawassoul : un parti ouvert à tous les mauritaniens selon Abdoulaye Diakité

S’il a engagé l’opération de lifting au niveau du parti espérant en faire un outil capable de remporter des victoires dans les élections de 2018, le gouvernement, pourtant coupable de nombre insuffisances voire carences, est toujours le même. Alors que son chef est occupé à semer la zizanie au sein de la Majorité, à régler ses comptes personnels et à botter en touche dans des moments délicats…

Les divisions au sein de cette Majorité sont évidentes et continuent de causer des blocages énormes et à provoquer des contreperformances obligeant le Président de la République à monter lui-même au créneau pour corriger les fautes de ses proches collaborateurs et devenir, par la force des choses, un fusible pour eux. Eux qui n’hésitent pas à lui faire porter la responsabilité de leurs échecs patents.

En face, l’Opposition n’est pas en meilleure forme. Elle qui doit payer pour ses mauvais choix du passé, notamment le boycott des différentes séquences de dialogue et des élections qui s’en sont suivi.

Les divisions règnent

Seule la personnalité de Biram Ould Abdeid semble émerger à un moment où toutes les attentions sont focalisées sur l’échéance de 2019. Une erreur de plus, une fixation de plus sur la présidentielle alors que l’essentiel est ce qui vient dans l’immédiat, c’est-à-dire les élections locales et législatives.

Mais le patron de l’IRA entend prendre les devants pour s’imposer comme le candidat «unique» d’une Opposition aux mille faces. Il n’a pas cessé de prendre contact avec les acteurs de la scène politique et de la société civile pour mener à bien cette stratégie qui met le reste de l’Opposition dans une position dangereuse : elle accepte de se ranger derrière l’homme dont elle ne peut même pas influencer le discours encore moins changer les méthodes, ou lui dénier la possibilité d’être le candidat unique et prendre par la suite la responsabilité d’avoir empêché l’Opposition d’aller ensemble et donc l’alternance de s’opérer.

La grande difficulté de l’Opposition réside cependant ailleurs, principalement dans sa capacité à faire son bilan sinon à courir le risque d’être brusquée par les événements. En effet, quelle que soit le positionnement actuel – ou le placement – tous sont appelés à se regarder en face pour savoir pourquoi ils en sont là où ils sont. Sans influence sur le devenir du pays, des raisons d’avoir des remords plus que de lueurs d’espoirs dans une présence efficace dans le jeu futur.

Entre l’Opposition dite «radicale» et celle qui se veut «constructive», le fossé est déjà creusé. Entre le Forum national pour la démocratie et l’unité (FNDU) et le Rassemblement des forces démocratiques, les nuances sont infinies. Au sein même du FNDU, les positionnements sont évidemment différents : les Islamistes qui participent tout en tirant les autres vers le boycott, qui baissent le ton alors qu’ils encouragent leurs partenaires à le hausser ; l’Union des forces du progrès qui se perd dans des conjectures qui n’ont jamais fait partie de son catéchisme ; les autres qui coordonnent avec une opposition de l’extérieur pressée d’en découdre voire aveuglée par la volonté d’en finir avec un pouvoir qu’elle hait plus qu’elle ne veut changer… C’est dire que l’homogénéité des objectifs, des actions et des méthodes est loin d’être au rendez-vous.

La demande de renouveau est forte

Pendant ce temps, le pays se rapproche inexorablement des échéances prévues. La demande de renouveau n’a jamais été aussi forte pour différentes raisons.

La première relève de la nature des choses. Nous tournons en rond depuis quelques années, entre les demandes répétées de dialogue et les offres tout aussi répétées du dialogue. A plusieurs reprises, des Opposants ont entamé un dialogue avec le Pouvoir permettant sans doute quelques avancées sur le plan institutionnel, mais jamais en consensus. Parce que dès qu’un processus finit, ce sont des voix ayant participé à ce processus qui demandent sa reprise. Tout cela finit par relever de la manœuvre plus que de la volonté d’avancer.

Une deuxième raison, essentielle celle-là, c’est la réalité historique du moment. L’année 2019 est la dernière année du mandat de l’actuel Président de la République. Elle arrive à un moment où la plus grande partie du personnel actuel, militaire et civil, va à la retraite. A un moment où la Mauritanie compte près de 70% de moins de 35 ans. A un moment enfin où, les Mauritaniens sont de plus en plus émancipés des pesanteurs traditionnelles, notamment les forces d’intermédiation qui géraient les relations entre les pouvoirs et la société. L’un des acquis de l’époque Ould Abdel Aziz aura été l’affaiblissement considérable des acteurs traditionnels. Rien jusqu’à présent n’est venu combler le vide qu’ils ont laissé, ce qui ouvre grandes les voies de l’épanouissement de la société.

Et last but not least, la demande de renouvellement est une promesse du Président de la République Mohamed Ould Abdel Aziz qui a engagé un processus de «refondations» dont le référendum ne devait être qu’une étape et qui a été bloqué depuis cette séquence. Pourtant, elle devait bien être le prétexte pour changer ce personnel incapable de donner un contenu à une révolution qu’il prétend servir et qu’il a tout fait pour faire avorter. Il suffit de revoir les étapes de la séquence référendum pour déterminer le rôle et la responsabilité de chacun. Contre toute attente, le Président a préféré garder ce personnel et continuer la route. Maintenant que les choses sérieuses arrivent – et très rapidement – que va-t-il faire ? La parade a été trouvée pour le parti qu’on a obligé à «réfléchir». Mais quid du gouvernement ?

Ould Oumeir

La Tribune N°744 du 20 février 2018



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Commentaires (1)

  • mystere1 (F) 23/02/2018 09:51 X

    caricature interessante qui en dit long !