Cridem

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24-07-2012

10:54

Elections législatives et communales : La COD sous forte pression.

De plus en plus, l’on se rend compte que le pouvoir a une idée bien précise pour pousser la Coordination de l’opposition démocratique (COD) dans ses derniers retranchements. La plus importantes des " recommandations " du président Aziz, lors du dernier Conseil des ministres avant les vacances du Gouvernement, montre que tout se joue autour des futures élections municipales et législatives.

Jouant toujours dans le cadre d’une politique des petits pas, Aziz a donné des instructions fermes pour que le processus d’enrôlement prenne sa vitesse de croisière et permette d’envisager les élections dans un avenir très proche. C’est une indication certes, mais pas plus.

Toujours, dans l’approximatif, les autorités restent indécises sur la date des prochaines élections dont personne ne connaît l’échéance précise. En fin 2012, au début de 2013 ou en 2014 ? La question reste totale.

Et la dernière sortie du président pour rappeler que les élections vont se tenir, suivant les résultats d’un dialogue auquel la COD n’a pas participé, ne relèverait, selon des observateurs avertis, que de la logique qui veut que, à chaque fois que l’opposition organise un meeting et parle de ses projets de " dégagement " d’Aziz, ce dernier lui rappelle qu’elle risque, elle-même, d’être out du jeu si elle s’obstine à suivre la voie de la surenchère.

Face à ses marches et meetings, le pouvoir oppose une marche inéluctable vers l’organisation d’élections qui mettraient un terme à la situation " indélicate " d’un parlement qui a entamé, largement, un deuxième mandat, sans le consentement du Peuple souverain et simplement par décision du Gouvernement avalisé par un Conseil constitutionnel que l’on dit acquis à la cause de l’Exécutif.

Il y a donc que le pouvoir pense que les choses bougent certainement aujourd’hui dans le sens de l’organisation prochaine des élections municipales et législatives. Ceux qui pensent que tout est lié, dans les faits, à l’avancement des opérations d’enrôlement pour l’établissement d’un état-civil fiable n’ont pas tout à fait tort. En effet, c’est depuis l’injonction donnée, il y a quelques mois, par le président Aziz pour que l’on accélère le processus, en généralisant le recensement à tous les centres de moughataa, que les choses ont commencé à se préciser.

Il y a peu, les chiffres donnés par l’Agence nationale du registre des populations et des titres sécurisé (ANRPTS) sont éloquents à ce sujet : 1 175 745 (hier samedi, selon le site de l’Agence). 
Des résultats qui sont loin d’être homogènes, même si les wilayas considérées comme de " grands réservoirs électoraux " commencent à enregistrer de bons résultats, signe que la tenue d’élections municipales et législatives ne sera pas hypothéquer, dans un proche avenir, par l’état-civil mais plutôt par d’autres considérations d’ordre politique et financier.

Au Hodh Chargui, par exemple, le nombre " d’enrôlés " est de 70.230 actuellement. Il est de 54.506, au Hodh Gharbi, 73.624, en Assaba, 63.474 au Gorgol, 102.204, au Brakna, 102.614, au Trarza, 37.333, en Adrar, 65.447, à Dakhlet Nouadhibou, 23.997, au Tagant, 36.015, au Guidimagha, 28.517, au Tiris Zemmour, 13.564, en Inchiri et 487.517 à Nouakchott. Chiffres à prendre avec précaution

L’enrôlement connait, c’est sûr, une évolution positive qui laisse supposer que les élections entrent maintenant dans l’optique de l’envisageable avec un état-civil fiable, et ce d’autant que toute personne inscrite dispose, désormais, d’une carte d’identité non falsifiable. Le fichier électoral sera donc établi à partir de ces données fiables et non pas, comme dans le passé, en prenant en compte des pièces d’état-civil établies à l’avance sans véritable contrôle, comme en 1992, 2001 et 2003.

Mais reste aussi que parmi les " enrôlés " figurent un grand nombre d’enfants et de jeunes qui n’ont pas encore le droit de voter. Mais ça rassure tout de même sur la suite d’une opération dont la lenteur des débuts, lancés dans l’improvisation la plus totale et voulue, dit-on, par certains pour " éliminer " au passage une partie des populations de ce pays. Elections avec ou sans la COD ?

Mais si d’aucuns considèrent que cette question de l’état-civil ne pourrait plus constituer, d’ici fin 2012, début 2013, le véritable handicap pour l’organisation d’élections dont le retard commence à peser, il reste à savoir aussi comment faire pour que les partis de la Coordination de l’opposition démocratique (COD) ne maintiennent pas leur position de volonté de " dégager " Aziz, par la voie des manifestations de rue et une allusion au recours à la force (si nécessaire), ce qui rend très peu probable la participation à une opération que les partis de cette coalition politique ont raté déjà en amont.

Les initiatives qui voient le jour aujourd’hui (celle du président de l’Assemblée nationale, Messaoud Ould Boulkheir, et d’autres personnalités indépendantes) pourraient bien n’être qu’une tentative de prévenir un très probable boycott, qui ôterait aux élections municipales et législatives prévues, leur crédibilité, tant sur le plan national qu’international.

Certes, les partis de la Convention pour une Alternance Pacifique (CAP) sont suffisamment outillés pour affronter au cours de ces élections une majorité dont n’émerge, pour le moment, que l’Union pour la République (UPR) mais l’absence de la COD sera ressentie comme lors de la tentative d’organiser une présidentielle un certain 6/6/2008 !

C’est aussi dans ce cadre que les regards se tournent, de plus en plus, vers l’extérieur pour scruter une probable intervention de la communauté internationale. L’Union africaine et l’Union européenne, parrains de l’Accord de Dakar de juin 2009, ont déjà entrepris des démarches dans ce sens à Nouakchott mais sans parvenir à débloquer une situation qui commence à peser, surtout quand on sait que la crise qui dure n’est pas faite pour arranger le rôle que Nouakchott pourrait jouer dans la recherche d’une solution au conflit malien et, d’une manière générale, à la stabilité recherchée dans l’ensemble de la zone sahélo-saharienne.

L’on pense aussi, à tort ou à raison, que le changement de régime en France est de nature à faciliter le rapprochement des positions à Nouakchott. Ami des socialistes, l’opposition mauritanienne ne doit pas pourtant oublier que Paris compte beaucoup sur le président Aziz dans la stratégie qu’elle mène au Sahel. La France tentera, de manière habile, de " ménager la chèvre et le chou ", comme on dit. Une médiation pour que chaque partie lâche du lest pourrait même avoir déjà commencé mais sous le sceau du secret, car, dans ce genre d’affaire, les meilleures armes ne sont pas celles qu’on utilise au grand jour.

Sneiba Mohamed


 


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