Cridem

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27-06-2013

06:54

Ansar al-Sharia fait son apparition en Mauritanie

Ansar al-Sharia a fait son apparition dans les rues de Nouakchott. Comme ses pairs éponymes en Tunisie, le groupe mauritanien demande l'application stricte de la loi islamique.

Le bras politique d'al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) n'avait réussi à s'implanter dans les pays du Printemps arabe comme la Tunisie et la Libye qu'à la faveur de leurs révolutions, a souligné le quotidien L'Authentique, et son apparition en Mauritanie fait l'effet d'une surprise.

Le groupe mauritanien Ansar al-Sharia "a été fondé à la prison centrale de Dar Naim, où sont détenus la plupart de ses membres pour leur appartenance à des groupes islamistes radicaux", note le journal.

Dimanche 23 juin, le salafiste Khadim Ould Semane, connu pour ses liens terroristes, a invité "tous les Mauritaniens" à soutenir le "groupe pour l'application de la sharia", a indiqué l'agence ANI citant son frère emprisonné.

Un autre détenu salafiste, Ahmed Salem Ould al-Hasan, avait fondé ce groupe "pour lutter contre les laïcs, appliquer la sharia de Dieu, et restaurer les érudits de la nation", selon l'ANI.

"Je lance cette campagne pour demander l'application de la sharia divine parce que je crois en l'idéologie salafiste qui s'oppose à la laïcité et à la démocratie", avait-il expliqué à l'agence de presse depuis sa prison.

Mais les salafistes emprisonnés ne sont pas les seuls à être attirés par la mouvance islamiste. Des imams issus de mosquées extrémistes et quelques responsables politiques ont également rejoint ce groupe pour demander l'application de la sharia en Mauritanie.

La dernière manifestation d'Ansar al-Sharia a eu lieu vendredi dernier à Nouakchott.

"Nous ne remarquons pas que les gens s'alarment de cette demande d'application de la sharia à une époque où des personnes de même sexe demandent à être reconnues pour pouvoir se livrer à leurs activités", a déclaré l'imam Manou Ould Mohamed de la mosquée al-Shorofa dans son sermon de vendredi.

"Nous ne demandons aucun poste ni aucune responsabilité, nous demandons seulement que notre gouvernement applique envers nous la sharia de Dieu", a rapporté Cridem citant Ould Mohamed lors de son sermon à ses fidèles. "Nous sommes prêts à sacrifier notre propre argent, nos corps et nos âmes pour y parvenir."

Ahmedu Ould Lemrabott Ould Habib al-Rahman, moufti mauritanien et imam de la Grande Mosquée, a réagi fortement à cette demande d'Ansar al-Sharia.

"Je dis à ceux qui demandent l'application de la sharia qu'ils prennent leurs distances vis-à-vis des mouvements et des objectifs politiques, des responsables, des manoeuvres, des manifestations et des calculs", a-t-il déclaré.

"Je leur ai dit que la promotion de la vertu et la prévention du vice doivent rester éloignés de la politique", a-t-il expliqué dans son sermon de vendredi dernier.

L'émergence d'Ansar al-Sharia fait naître des craintes que l'expérience tunisienne et libyenne ne puisse se répéter en Mauritanie.

"Les salafistes tunisiens ont influencé leurs pairs en Mauritanie, et les salafistes mauritaniens ont trouvé le courage de descendre également dans la rue pour affirmer qu'ils ne sont pas moins importants que leurs pairs en Tunisie", expliqué à Magharebia le sociologue et chercheur Ya'cub Ould al-Mostafa. Ansar al-Sharia en Mauritanie exploite les citoyens qui n'osent pas critiquer ceux qui s'expriment au nom de la religion par peur d'être accusés de kufr, a-t-il ajouté.

"Je pense donc que les autorités en charge de la sécurité veulent éviter les affrontements avec eux par peur d'exacerber les sensibilités", a-t-il expliqué.

Pour sa part, Omar Ould Ahmed, spécialiste de la jeunesse, a déclaré : "Avec leur extrémisme et leurs fatwas, ces personnes ont tué l'esprit d'innovation et le volontarisme, et ils interdisent aujourd'hui la musique, le théâtre et le cinéma."

"Je pense que la réaction adéquate à avoir face à Ansar al-Sharia est d'organiser des contre-campagnes au sein de la jeunesse. Nous devons exprimer notre rejet des expériences tunisienne et libyenne", a-t-il conclu.

Par Jemal Oumar à Nouakchott


Photo
: Le leader du parti Vadihila, Cheikh Outhmane Ould Cheikh Ahmed Abi El Maala, participe à une manifestation d'Ansar al-Sharia à Nouakchott.



 


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