Cridem

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16-09-2013

16:25

Éducation : les enseignants tuent le temps sous les arbres avant les ouvertures

A quinze jours de la rentrée des classes, l’enceinte du ministère et ses abords ne désemplissent pas d’enseignants qui se sont déplacés pour la plupart vers Nouakchott pour régler certains problèmes liés à la fonction.

Certains poursuivent des retards d’avancement, d’autres des allocations, celui ci, une mutation, celui là, une permutation. Autant de problèmes que l’enseignant sollicite de régler au niveau de sa tutelle qui au retour reste insensible voire de marbre à ses multiples requêtes.

Ces enseignants n’ont comme interlocuteurs que leurs collègues du terrain, soumis aux mêmes conditions. Les bureaux de ceux qui sont censés résoudre leurs problèmes, leurs sont hermétiquement fermés.

Seuls quelques bureaux occupés par des secrétaires désœuvrées, restant ouverts, mais ne détenant aucune information. Les pauvres enseignants n’ont d’autres choix, que de se rabattre sous l’ombre des arbres, pour discuter à bâtons rompus, du tout et de rien, tant que la crampe n’a pas encore pris les jambes arc-boutées sur le sol.

Cette situation est ponctuée tous les jours, pour tout le reste du mois de septembre et se poursuit quelques jours après l’ouverture des classes. Les responsables du ministère et les techniciens chôment leurs bureaux pendant les heures ouvrables. C’est dans l’après midi et le soir qu’ils sont présents.

Ils évitent foncièrement les enseignants, feignant de leur résoudre le moindre problème. Mêmes les directeurs d’établissement en pâtissent de cette situation. Ils déambulent dans les couloirs et sous les arbres, seuls les plantons et les portiers, sont réceptifs à leur égard. Bref l’enseignant poursuit lamentablement sa descente en enfer, méprisés alors même dans son propre sérail.

C’est ce sentiment de rejet et de mépris que ressent l’enseignant, qui se répercute sensiblement sur le rendement de celui. L’enseignant n’a plus ni de foi, ni de conscience dans tâche à laquelle il est assigné. Il est plongé dans la démotivation totale, hanté par le dégoût, cherchant coûte que coûte un substitut qui lui préserve cet honneur spolié par la société.

Notre enseignement est victime en plus de sa privatisation mercantile effrénée, et aussi du sort humiliant de l’enseignant, un paria de la société mauritanienne dite moderne, qui le rabaisse inexorablement au bas niveau de l’échelle, indifférente de la noble mission dont il est porteur. Une société aux abois du plus valus, où « l’avoir conditionne l’être », comme l’avait dit Mao, où « celui qui n’a pas, n’est pas. »

Harouna Cissé.



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