Cridem

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14-04-2014

13:10

Le dialogue a réalisé « les objectifs »

Debellahi - En suivant les préparatifs du démarrage du dialogue entre 3 pôles politiques en Mauritanie, l’esprit du politico-pessimiste que je demeure, a été traversé par plusieurs idées.

Pourquoi deux pôles d’oppositions ? Ou on est dans l’opposition, ou on est dans la majorité (ou mouvance) présidentielle ? Le célèbre poète syrien Nizar Kabbani, n’avait-il pas assuré, par son inimitable prose, qu’il n’existait pas de zone tampon entre le Paradis et l’enfer ? Je ne veux point dire que l’un des côté est paradisiaque, et que l’autre est infernal.

Le côté du pouvoir est vraisemblablement plus confortable que l’autre, mais l’objet de mon propos est qu’on doit, tout simplement, se positionner clairement. On ne peut, politiquement, se situer parfois au néant, tantôt au non être.

Si ces deux pôles n’ont pas pu présenter aux mauritaniens, un projet de société consensuel et convaincant, ou à la limite, une même stratégie d’opposition, ils ne peuvent guère lui apporter quelque chose de significatif ou de constructif, d’un dialogue où ils sont allés avec des violons qui jouent discordants ou faux.

Ces pôles sont-ils suffisamment représentatifs des différentes et multiples sensibilités nationales, comme on commence à les appeler dans notre terminologie socio-politique qui, il faut le reconnaitre, évolue plus vite que nous ? Où sont dans tout ça les FLAM, les IRA, les TPMN, mouvements s’exprimant au nom de franges importantes des négro-africains de Mauritanie, et des descendants d’esclaves (Haratines) ?

La Mauritanie est de nos jours une mosaïque de tendances ethno-politico-tribales, après avoir été pour nous une source de fierté comme un véritable trait d’union, et un modèle de diversité qui répugne l’adversité. Il n’est pas évident que tous se sentent engagés par les hypothétiques résultats qui sortiraient des discussions en cours de gestation ?

On n’a pas besoin d’être diplomate pour savoir, qu’avant toutes négociations, il faut instaurer un climat de confiance. Ceci n’a pas été le cas, du moins, à ma connaissance. Pourtant, c’est un problème clé de ce que certains appellent la « crise politique» en Mauritanie. Au lieu de la confiance et du respect, on voit en clair le mépris, et décrypte en filigrane la haine. L’opposition, surtout dite radicale, sous-estimant le Président, et le considérant –permettez-moi l’expression, comme un officier sac à dos, sans envergure ou background quelconques.

Quant au Président, pour avoir côtoyé la plupart des principaux acteurs politiques, il considère qu’ils sont des opportunistes-arrivistes, sans foi ni loi, ne cherchant que des intérêts particuliers ou communautaristes. Pour ceux qu’il n’a pas côtoyés, ses appréhensions viennent de leurs positions affichées au sujet des événements de 89 et suivants, et qui ne rassurent pas l’institution militaire, ce qui, pourtant, ne l’a pas empêché de les « jauger » dès sa prise du pouvoir.

Je peux dire, au risque d’être agréablement contredit par les événements, qu’avant même de commencer, le dialogue a déjà atteint les objectifs. Je dis bien « les objectifs », et non « ses objectifs ». Les objectifs supposés pour le pôle radical (assoupli avec cette formule de ‘’faux rhum’’)» étant d’arriver à une version réactivée des défunts «’’accords de Dakar’.

Pour la CAP, tout (ou presque) a été fait lors du dialogue organisée entre elle et la ‘’majorité consolidée’’, il reste juste à renvoyer la CENI actuelle et tripatouiller les dossiers de Mrabih (ANRPTS). Le pôle pouvoir qui, se sentant suffisamment fort avec sa démonstration de forces lors des récentes échéances électorales, affiche la même position que l’opposition dite modérée (CAP). Les choses sont donc, déjà tranchées, et les dés jetés.

Le pouvoir joue, subtilement, la même manœuvre qu’à la veille des législatives et municipales. Il se montre ouvert, prêt à discuter avec tout le monde, y compris ses adversaires, sans être prêt à leur faire la même concession. Le Président l’a dit clairement à Nouadhibou. En conséquence, aux yeux de l’opinion tant nationale qu’internationale, celui qui discute avec lui, part de ce postulat.

Les oppositions elles, ne peuvent pas tenir, solidaires, jusqu’au bout du marathon. Elles commencent déjà à le prouver avec les quiproquos sur la représentation, et la représentativité. A quoi s’attendre quand il y aura une miette du gâteau à se partager ?

On dénombre, quand même, beaucoup de présidents et de présidentiables, au sein du FNDU et de la CAP. Peut-ont, dans ces conditions garder le même cap ? Je ne le crois pas.

Je ne comprends pas nos politiciens, ou sont-ils tous (et toutes) devenus des autruches ? Ils ne semblent pas vouloir voir la réalité sans daltonisme. Pourtant, et c’est leur métier (ou profession) à eux, il est de notoriété que la politique se base sur deux piliers : le rapport des forces, et les intérêts. Les rapports de force sont en faveur de qui, le Rahil ayant lamentablement échoué ?

Quels intérêts a un pouvoir qui vient de ratisser large au cours d’élections, à la fois locales et nationales, à dissoudre son gouvernement pour en faire un avec une (des) opposition (s) qui n’ont pas su se faire suivre à l’intérieur, ou se faire décrypter par l’extérieur ? La réponse est, naturellement, aucun.

Le dialogue s’achèvera en queue de crevette, et la montagne accouchera d’un morpion.

Les élections auront lieu dans les délais, et le Président (non) sortant sera réélu autour des 60 %, que les autres participent ou pas.

Maintenant, le devoir d’un pouvoir responsable sera de tenir compte de la réalité, pragmatisme oblige. La Mauritanie est en train de s’émietter ethno-socio-culturellement. Il y a besoin crucial et pressant, peu après l’investiture pour le deuxième mandat, d’organiser un débat général, réellement inclusif et sans tabous, pour parler de toutes les questions nationales. Il y va de la cohésion nationale, par l’harmonisation des objectifs, sceller un socle indéboulonnable pour une parfaite cohabitation entre les différentes composantes et communautés du pays.

Celui qui le fera, avec conviction et sans manœuvres dilatoires ou arrière-pensées, inscrira son nom en majuscules dorées dans l’Histoire des grands, avec un grand H et un grand G.



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