Cridem

Lancer l'impression
20-04-2014

20:08

La Chasse à la vie - En route pour Zouerate... (Suite)

Cheibou - Quelques instants après avoir pris place sous le hameau, un brouhaha énorme se fait sentir, des va et vient c’est le train en provenance de Zouerate vers lequel les gens s’activent pour s’installer à bord.

Il s’agit d’un train minéralier composé de deux CC tractant 200 wagons de minerais de fer extraits des mines de Zouerate par la MIFERMA, (société des Mines de Fer de Mauritanie), société exploitant le minerai de fer depuis l’indépendance de la Mauritanie est un Etat dans l’Etat par sa puissance, cette société imposante par ses moyens techniques et financiers.

Dès que le train termina sa mission à savoir, la remise du courrier au chef de Canton et l’attelage des citernes d’eau devant être amené à T’meimichatte terminé. Le train s’ébranla minutieusement et disparut derrière les quelques reliefs montagneux vers Nouadhibou.

Cependant des véhicules en provenance d’Atar et d’autres horizons, Nouakchott, Akjoujt déferlent sur Choum pour y débarquer les passagers les uns allant vers Zouerate et d’autres allant vers Nouadhibou.

C’est aux environs de minuit, que le train minéralier en provenance de Nouadhibou, nous réveilla avec ses sirènes assourdissantes et en quelques secondes, il fut pris d’assaut par les passagers qui s’installèrent dans les wagons vides et pleins de détritus des minerais de fer.

C’est ainsi que, ma famille et moi nous nous installâmes à l’arrière du train dans le wagon destiné aux convoyeurs du train, un wagon aménagé spécialement pour les convoyeurs et les familles des travailleurs se rendant à Zouerate ou à Nouadhibou dans un confort acceptable, à l’intérieur duquel des lits superposés les uns sur les autres et sur lesquels sont mis des matelas destinés aux travailleurs de la Miferma.

Le train s’ébranla de nouveau vers Zouerate aux environs de 00 heures 05 mn, pour y arriver le lendemain vers sept heures du matin. Des taxis brousses, généralement des lands rover attendaient l’arrivée des passagers pour les embarquer et les amener en ville, ce qui fut fait.

Une voiture du service attendait mon oncle pour le déposer avec sa famille à la cité de Zouerate. Nous arpentâmes la route menant vers la ville mais quelle fut ma surprise de constater que le chauffeur roulait de la gauche et celui qui vient de l’autre côté roulait vers la droite, ce qui me rappela en effet la conduite en Angleterre, les véhicules vont dans le sens inverse.

La ville est charmante, ces habitations sont bien distinctes dans un style typiquement européen, les routes sont goudronnées, les artères de la cité sont bien tracées.

Aux environs de neuf heures trente, nous nous installâmes dans la maison de mon oncle, une maison composée de deux chambres et un salon, une cuisine et des WC, une petite cour à l’intérieur de laquelle se trouvait une tente servant à relayer le salon quand il y’a des visiteurs importants pour s’y reposer.

Un déjeuner stimulant composé de ‘’Nché’’ bouillie faite de maïs et un bon verre de thé mauritanien nous fut servi par l’un des jeunes garçons chargé de l’exécution du thé.

Une fois installé, je commençais à m’habituer aux nouvelles conditions, notamment en ce qui concerne le mode de vie. Ma première sortie en ville, je portais un « pyjama » qui me servait de tenue de sortie, que mon oncle m’offrit pour aller me promener. J’étais très à l’aise dans ma tenue « européenne », car le vieux pensait que cette pyjama était réellement une tenue de sortie et moi plus encore.

La ville est un Far-West, située en plein désert, sous une atmosphère indescriptible, la chaleur est émoustillante, l’architecture de la ville est moderne, on se croirait dans une ville européenne.

Cette ville a une particularité spectaculaire et inouïe, elle est scindée en deux, une cité entièrement européanisée, où seuls vivent les ‘’expatriés européens, cette cité est une zone interdite aux ‘’indigènes’’ notamment mauritaniens et africains, il est interdit de s’y aventurer, sauf pour les commissionnaires.

C’est-à-dire les garçons chargés de transporter les ingrédients pour les épouses des expatriés ou les ‘’boys guinéens’’ ou les ‘’blanchisseurs’’ et enfin les serviteurs des familles européennes. Une exception pour les agents de maitrise mauritaniens ou africains, d’ailleurs très rares en ces temps-là, pouvaient obtenir des logements dans cette partie de la cité.

La présence des agents de maîtrise mauritaniens ou africains à la cité européenne, profitait davantage aux expatriés, en bénéficiant d’une ‘’Prime de voisinage’’ à chaque installation d’indigènes dans leur cité.

La cité européenne a son propre économat, son hôtel dénommé ‘’Club des Aigles’’, ses salles de fête, sa propre piscine et ses services de gardiennage spécifique, que d’anciens gardes, ou d’anciens méharistes mauritaniens y assurent la sécurité intérieure au vu et au su des Autorités mauritaniennes qui n’osaient pas s’aventurer dans cette zone dite européenne, sans l’autorisation des Responsables de la D.S.E. (Direction du Siège d’Exploitation) de la Miferma.

L’autre côté, la cité africaine est entièrement construite pour les ouvriers mauritaniens et africains qui travaillent à la société, cette zone a ses propres économats, ses services de gardiennage, son hôtel et son club dénommé lui aussi ‘’Club Africain’’.

La ville a ses infrastructures, son aérodrome de fortune pour les officiels de la société en mission et utilisant les avions de la société, ainsi que les déplacements des cadres pour relier Nouadhibou à Zouerate.

Depuis l’indépendance, de cette cité minière, des quantités importantes de fer d’une qualité dépassant les 46% de teneur de fer, quittaient pour être transbordées sur des navires minéraliers à destination d’Europe, d’Asie et d’Amérique, c’est l’une des carrières de minerais de fer la plus riche en teneur de fer à travers le monde.

Le visage de la ville est émoustillant, les gens travaillent de nuit comme de jour, sans pause, les véhicules des Haulpack, circulent dans les mines de ‘’Tazadit’’ à ‘’Rouessa’’ et ‘’F’derick I et II’’,.

Tôt le matin, les ouvriers en combinaison se dirigent vers les ’’points d’arrêt’’ de bus pour aller sur les mines et aux Services Généraux de la Société.

La ville est animée par des boîtes de nuit, aux deux Clubs de la citée à savoir le Club africain situé dans la cité africaine et le Club des Aigles situé dans la zone européenne, où chaque soir les ouvriers et les cadres de la société s’y déplacent pour se divertir.

Dans la banlieue de la ville, il y’a des lieux de loisirs, des boîtes de nuits africaines, là les européens s’y déplaçaient pour se divertir, pour danser, ou pour siroter une boisson et pourquoi pas s’amuser avec des femmes sénégalaise. Ces bars sont dirigés par des africains, notamment des sénégalais, des nigérians et mêmes des sud africains.

La rentrée ratée :

Quelques jours après mon arrivée, je décidais de rejoindre les bancs de l’école primaire de la ville, qui est destinée uniquement aux enfants des indigènes et autres africains, car les expatriés de la MIFERMA, avaient leur propre école pour leurs enfants.

Ayant en mains, mon certificat de transfert pour l’école primaire, je décidais alors de poursuivre mes études dans cet établissement en m’installant au CM2.

L’école est une belle bâtisse, en béton armée, d’ailleurs elle me rappelle l’imprimerie nationale à Nouakchott, avec son toit à l’araignée qui surplombe le bâtiment, dont le jardin est bien taillé, des fleurs partout, l’image qui se dégage de ce jardin vous donne de l’inspiration. Une fois à l’école, je me présentais au Directeur de l’Ecole, Monsieur Ly, pour lui présenter mon papier de transfert.

Après avoir prit connaissance du document, Monsieur Ly, s’excusât auprès de mon oncle et de moi-même, pour nous dire qu’il n’avait pas de place à l’école, ce qui m’affectât beaucoup, sans jamais lâché du lest à mon envie de poursuivre mes études.

Cette situation m’incitât alors à aller de l’avant, je n’ai point cédé aux désarrois, ni à la fatalité, il fallait lutter pour imposer sa volonté de survivre dans ce monde où chacun lutte âprement pour vivre et pour combattre l’oisiveté quotidienne.

Les jeunes ici s’occupent des paniers des épouses des expatriés français qu’ils transportent à leurs domiciles moyennant des pièces. C’est ainsi que je fus tenter de jouer le jeu, en m’inspirant de ce travail, je me portais volontiers à servir de commissionnaire, peu importe ce que l’on dira de moi.

Je trimballais chaque jour les paniers des épouses des expatriés moyennant un forfait allant de 100 à 200 FCFA, et le tour est joué, je revenais immédiatement devant les portes de l’Economat pour attendre mon tour car chaque commissionnaire avait des relations très intimes avec les épouses qui les choyées au fur et à mesure que les relations s’approfondissent.

Je nouais une relations avec une sénégalaise Marietou Cisse, qui était à l’époque la Concubine d’un français répondant au nom de Colombo lequel, m’a accordé pratiquement comme son fils, je vivais dans sa villa et me la confiait quant ils sortaient pour aller dîner au Club.

Ce français m’avait beaucoup aimé, ainsi que sa copine Mariétou, qui quant à elle ne ménageait aucun effort pour me rendre heureux, elle me donnait l’argent et m’habillait à chaque occasion de fêtes ou d’anniversaires qu’ils fêtaient.

Au Club Africain où je rendais chaque soir pour dîner et suivre des séances de tennis de table ou autres jeux, j’assistais également aux différentes soirées dansantes que le fameux orchestre « Tiris Zemmour Band » nous égayait sous la supervision de son chanteur Doua, les batteurs Gambi, Diallo et les autres musiciens pour lesquels j’ai une pensée profonde.

Je me souviens également que mon groupe avait une équipe de Foot Ball dénommée « Etoile Filante » laquelle j’étais son Capitaine, c’était l’une des première équipe de Zouerate en 1968.

Je me rendais par ailleurs, au rallye des motos qui se déroulait sur un circuit spécial conçu pour la circonstance à l’Ouest de la ville sur un terrain rocailleux et rendus praticable par les moyens techniques de la Miferma, pour distraire ses expatriés et pendant les courses dans des voitures miniaturisées à l’image de celles que nous voyons aujourd’hui dans les rallye de la Formule 1.

C’était des moments agréables, que tous les habitants de la ville de Zouerate assistaient à chaque occasion que ces circuits se déroulent.

J’ai également connu la famille Preirra, famille Cap-Verdienne qui travaillait à la Miferma, chez lequel, je me rendais pour écouter la musique en compagnie de l’une de ses filles Rita.

En 1969, dans cette maison, que j’ai suivi avec des amis la retransmission à Radio Française l’épilogue de l’astronaute Neil Armstrong qui fut le premier homme à marcher sur la lune le 21 juillet 1969.

La caravane de méharis :

Une caravane d’étudiants français en provenance de la France à travers l’Algérie, était parvenue à Zouerate, composée de trente véhicules méharis, laquelle caravane partait au Sénégal, à travers le désert mauritanien, elle fut accueillie au Club des Aigles à Zouerate.

Partout déferlaient des curieux venus contempler ces véhicules, ainsi que leurs passagers, la plus part des jeunes qui étaient parvenus jusqu’ici malgré tous les obstacles de la nature, affrontant un paysage plein d’embûches, pour réussir une aventure et pour contempler le paysage désertique du Sahara.

Cette vision m’inspirât alors le courage de poursuivre le chemin de la liberté que je me suis tracé dès mon départ de Nouakchott, je décidais alors de poursuivre mon combat contre les affres de la nature.

Après avoir rencontré le responsable de la Caravane au tour d’un thé que je lui offris lors de son passage chez mon oncle pour une visite de courtoisie après que nous nous sommes devenus amis et dans la perspective de lui trouver un guide et un mécanicien. L’idée m’effleurât l’esprit de lui proposer ma contribution. C’est ainsi que je lui disais que j’étais preneur (guide) et que j’avais la possibilité de trouver un mécanicien pour la traversée du désert.

Proposition que l’intéressé à accepter avec plaisir moyennant une somme non négligeable pour compenser nos efforts, le mécanicien et moi, durant le trajet devant conduire la Caravane à Choum.

C’est ainsi qu’après deux jours de repos à Zouerate et après avoir visité les principaux centres d’intérêts de la ville et des mines, la caravane devait prendre son chemin pour traverser le désert de Zouerate à Nouakchott.
......

A suivre....
Alioune Ould Bitiche
46.78.57.32 - Nouakchott
émail : bitiche@gmail.com



Les articles, commentaires et propos sont la propriété de leur(s) auteur(s) et n'engagent que leur avis, opinion et responsabilité



 


Toute reprise d'article ou extrait d'article devra inclure une référence www.cridem.org