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18-09-2014

18:30

L’identité culturelle de la Mauritanie

Adrar-Info - Au nom de Dieu, Clément et Miséricordieux. Le climat de malaise et de suspicion qui règne en Mauritanie est tantôt interprété comme un antagonisme racial, tantôt comme un conflit culturel. La première thèse est celle des nationalistes arabes et négro-africains confondus, chaque camp taxant le groupe ethnique opposé de racisme.

Les tenants de la seconde thèse estiment, quant à eux, que « la difficile cohabitation entre les deux composantes de la population mauritanienne » n’est autre chose qu’un « conflit de cultures » car, estiment-ils, « nous sommes un pays bi-culturel ».

Dans quelle mesure ces prises de position expliquent-elles le mal mauritanien ? Il ne nous semble pas utile de nous attarder outre mesure sur l’attitude des nationalistes. Nous dirons simplement qu’il est aberrant de croire encore en l’existence de groupes ethniques prédisposés génétiquement au racisme.

Quant aux « culturalistes », force est de constater qu’ils se contentent d’affirmer sans jamais démontrer, ne serait-ce que par un exemple, les prétendues bases culturelles distinctives de chacun dés deux groupes ethniques.

En réalité, parler de deux cultures antinomiques ou distinctes en Mauritanie relève de la spéculation pure. Il est vrai que le peuple mauritanien est une mosaïque raciale dans laquelle chaque composante détient des traditions immémoriales propres tolérées par l’Islam.

Mais les arts et les traditions populaires constituent-ils la base de la culture ou n’en sont-ils qu’un artefact ? On peut d’ores et déjà affirmer que la culture ne se fonde pas sur l’appartenance ethnique ; un peuple multiracial n’est pas nécessairement multiculturel.

Ainsi par exemple, la plupart des pays musulmans sont multiethniques et néanmoins unis culturellement; il en va de même de la population cosmopolite d’Amérique dont la culture tend à s’uniformiser sous le poids de la laïcité.

Par contre, un même groupe ethnique peut être divisé entre plusieurs cultures ; c’est, par exemple, le cas de l’Inde où coexistent des cultures aussi divergentes que l’hindouisme, le bouddhisme et l’Islam.

La culture est un ensemble de conceptions et de comportements qui définissent une société par rapport à une autre. La spécificité d’une culture résulte de celle de la vision du monde qui varie d’une nation à l’autre.

Or, le peuple mauritanien a, de par sa doctrine islamique, la même vision du monde. Il ne peut donc avoir qu’une même personnalité culturelle issue de l’Islam dont il tire sa norme de conduite dans l’existence.

Quant à la langue, aux arts culinaires et aux expressions folkloriques propres à chaque groupe, ce ne sont manifestement que des éléments secondaires qui viennent s’ajouter à cet édifice complexe qu’on appelle la culture. Le soubassement de toute culture demeure la vision du monde telle qu’elle est définie par la doctrine épousée par le peuple ou la nation.

Par conséquent, les Mauritaniens se retrouvent tous au sein de la même identité culturelle : celle de l’Islam en tant qu’idée globale sur l’univers, l’homme et la vie et sur la relation entre tous ces éléments.

C’est d’ailleurs le cas de l’ensemble des peuples musulmans ; car si leurs langues, us et coutumes les différencient en apparence, il n’en demeure pas moins que, dans le fond, ils appartiennent à la même culture.

Cette convergence culturelle provient tout naturellement de l’unité de doctrine ; l’Islam est, pour les musulmans, la plate-forme idéologique qui sous-tend tout fait de civilisation.

Quant à l’arabe, c’est la langue de l’islam et c’est à ce titre que les fidèles dont il n’est pas la langue maternelle prennent son apprentissage à cœur afin d’avoir directement accès aux principales sources de leur religion et surtout de pouvoir réciter le Coran dont il est indissociable.

Des non-arabes comme le philologue Sibawaïhi (fondateur de la grammaire arabe), le physicien Al Khawarizmi ou l’historien Ibn Khaldun ont ainsi adopté l’arabe en tant que langue de l’Islam.

Cela dit, il n’y a pas lieu d’assimiler l’Islam à l’arabité, car cela ne relève que d’une vision sentimentale qui prône la prédominance des arabes. Comme tout nationalisme, l’arabisme sent l’odeur répugnante de l’esprit de clan fustigé par l’Islam. Les causes des tensions interethniques qui secouent la Mauritanie doivent donc être cherchées ailleurs que dans une différence culturelle imaginaire.

En fait, la faille vient de l’absence de l’idéologie qui est à la base de la culture commune à tous les Mauritaniens.

L’Islam est une doctrine politico-spirituelle, c’est-à-dire un système régissant l’ensemble des rapports humains et reposant sur l’unicité de Dieu.

De ce fait, il constitue un mode de vie unique ne donnant pas crédit à la thèse de l’antagonisme entre corps et âme. Doctrine universelle, l’Islam intervient dans les actes de l’homme en tant qu’homme : ses rapports vis-à-vis du Créateur (foi, culte), de lui-même (habillement, nourriture, morale) et des autres (transactions, contrats, choix des gouvernants… etc).

L’Islam ne fait pas de distinction entre le temporel et le spirituel. Il est, par nature, une religion dont l’Etal fait partie. Mais l’Islam ainsi entendu est aujourd’hui inexistant dans la vie publique des Mauritaniens et des musulmans en général. Coupé de la vie, il n’est plus qu’un ensemble de rites.

Les Etats qui existent dans le monde musulman sont édifiés sur le modèle occidental laïque, celui de l’Etat-nation. La Mauritanie ne fait pas exception à cette règle.

L’Islam ayant donc disparu en tant que ciment socio-politique originel, les liens instinctifs qu’il avait si bien domptés se sont réveillés tout naturellement et nous voici face à une Mauritanie en proie aux nationalismes de tout bords.

Attisés par les forces impérialistes ténébreuses, ces nationalismes – qu’ils soient arabes ou négro-africains – provoquent la haine et alimentent les tensions sociales. De ce fait, ils représentent incontestablement un obstacle au progrès et à l’unité et constituent un facteur de décadence.

L’Islam étant un lien de principe indissoluble, la cause du déclin et du malaise des pays musulmans ne peut s’expliquer que par son exclusion de la vie et par la systématisation des lois laïques impies auxquelles les peuples musulmans sont soumis tels des cobayes.

Comment, en effet, un peuple peut-il évoluer positivement en ayant à la fois des idées capitalistes, des tendances spirituelles ou nationalistes et un système laïque ?

Ce dédoublement de la personnalité est sans doute la cause de tous les maux dont souffre la Umma. On ne peut, en effet, qu’aller de mal en pis quand on subit une loi qui s’oppose à sa conviction profonde ; la décadence des pays musulmans vient du fait que les idées sont en désaccord, les tendances divergentes et le système improvisé.

Il est impensable que l’on puisse adopter une idéologie sans en épouser l’idée directrice.

De même, embrasser une doctrine sans en appliquer le système c’est se jeter dans l’abîme.

Par conséquent, nos dirigeants doivent, s’ils sont réellement sincères, choisir entre deux voies : ou bien emmener leurs peuples à adopter la laïcité et donc séparer l’Islam de la politique, ce qui est contre nature ; ou bien concilier ces peuples avec leur propre doctrine en appliquant le système qui en est issu.

Il n’existe point de demi-solution.

Ce n’est donc pas un antagonisme culturel qui est à l’origine de la rupture mais la marginalisation d’une idéologie, dénominateur commun à tous les Mauritaniens. Aucune cohabitation véritable ne peut-être espérée sans la présence effective de l’Islam, cette doctrine qui transcende si merveilleusement les conceptions ethnocentriques étroites.

L’Islam est un tout indivisible et c’est précisément l’amputation de sa dimension politique qui a engendré les tiraillements auxquels nous assistons un peu partout dans le monde musulman.

Source : http://albadil.edaama.org



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