Cridem

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27-11-2014

23:00

Larmoiements d'une plume: De la folie à la raison

Ely-Salem Ould Abd-Daim - Quand les fous acquièrent le droit de cité, les bien-portants n’ont qu’à devenir fous. Pour me faire comprendre plus, je dirais que rien ne vaut une folie raisonnable, pour contrecarrer les méfaits d’une raison en folie.

Beaucoup de nos frères négro-africains ne sont sensibles qu’aux problèmes propres à leurs ethnies, oubliant du coup que leurs autres frères avaient été exposés aux mêmes sévices.

Prenons l’exemple des événements de 89, où de part et d’autre du fleuve des paisibles populations avaient été non seulement spoliées, et transférées arbitrairement ou même expulsées de force, sans observation aucune des mesures d’accompagnement, mais avaient ici et là servies de chair à canon aux militaires des deux bords, et ici et là elles avaient nourries la vindicte populaire dans les deux camps adverses.

Ceux qui furent déportés- en majorité cultivateurs, et éleveurs - sont aujourd’hui parmi nous, et ont reçu des mains de l’Etat des compensations à la place des préjudices causés, et quoi qu’en disent les méchantes langues, ils n’en sont pas moins logés à la même enseigne que tous les autres, même si les politicards qui vivent de leur malheur s’agrippent habilement à ce dossier, comme un rémora sait le faire avec un requin.

Contrairement à eux, leurs frères qui furent expulsés de force, et qui formaient la riche colonie qui faisait tourner la roue de l’économie du Sénégal frère, avaient eux été expulsés de leur pays d’adoption, laissant derrière eux leurs immenses richesses constituées de biens immobiliers, et de comptes bancaires fournis, pour vivre pauvres comme Job dans leur pays d’origine, où personne n’a eu l’idée de leur proposer des réparations, ou de politiser leur dossier, et en faire une question de dissension nationale.

Un autre sujet sensible qu’il faut décrotter au grand jour, est celui des pendaisons de militaires qui furent au premier chef les conséquences de verdicts rendus par des cours martiales, à l’encontre des militaires dont le chef d’accusation est de s’être associés à des tentatives échouées de coups d’Etat contre les régimes en place, et retenues comme mesures disciplinaires, pour faire obstacle à d’éventuels postulants aux putschs.

Là aussi, des valeureux officiers, sous –officiers, et soldats maures, ont été passés par les armes comme leurs congénères négro-africains, et personne pas même leurs familles n’en font aujourd’hui état. D’autres furent emprisonnés, puis débarqués du corps sans droits, ni reconnaissance. J’en connais qui sont dockers, gardiens, plantons, et chauffeurs de taxi. Vous pouvez quand vous les croisez leur coller n’importe quelle étiquette miséreuse, mais jamais il ne vous viendrait à l’esprit qu’ils avaient été un jour des officiers de l’armée.

En conclusion on ne saurait imputer aux seuls officiers maures, et moins encore à leur ethnie les bêtises commises par les comités militaires, où toutes les ethnies avaient leurs représentants, et par conséquent leur part de responsabilité, dans les décisions prises en parfaite collégialité.

Le dossier de l’esclavage est lui aussi un sujet d’actualité, que d’aucuns remuent ces jours-ci comme couteau dans la plaie. Cette question sensible, est le nouveau sésame que certains de nos frères H’ratines utilisent sans vergogne pour s’enrichir sur le dos des leurs, et pour élargir leurs audience auprès d’une frange de la population, dont le moins qu’on puisse dire d’elle, est qu’elle a tiré un mauvais numéro à la loterie génétique, et a été dans le passé considérée à tort comme la lie du peuple. Persécutée, asservie, et marginalisée, elle est aujourd’hui belle et bien logée à la même enseigne peu enviable, que toutes les autres composantes de ce peuple.

Ce n’est pas avec l’intention de choquer, ou de créer la polémique, que j’ai pris sur moi de soulever ces chapes de plomb, que nos frères négro-africains, victimes comme nous tous des barbaries des régimes militaires, et la nouvelle génération des Maures noirs (H’ratines) qui n’ont jamais été asservis de leur vie, ne cessent de faire peser sur leurs frères, et contemporains les Bidhans, ou Maures blancs.

Ne nous laissons pas achopper par ces tares qui appartiennent à leurs auteurs, qui eux appartiennent à l’histoire. «Celle-ci fut une nation qui avait appartenue au passé, à elle appartient ce qu’elle a gagné, et à vous appartient ce que vous avez gagné, et il ne vous sera pas demandé de répondre de leurs actes». Allons-y à la rencontre les uns des autres, partageons nos convergences, et trouvons le moyen de nous enrichir de nos divergences.

Et surtout n’oublions jamais que le loup n’agresse de tout le troupeau que la brebis isolée.

Ely-Salem Ould Abd-Daim



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