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16-01-2015

07:54

La prison fera-t- elle taire Ewlad Leblad? [Vidéo]

Mauriweb - La prison pour faire taire les voix contestataires et irrévérencieuses des rappeurs, telle est la solution que semble avoir choisi le gouvernement mauritanien pour « punir » le groupe Ewlad Leblad pour leur morceau « Gueyem » très critique à l’égard du président Mohamed Ould Abdel Aziz.

Et comble de l’affront les membres du groupe auraient refusé de serrer la main du chef de l’Etat après leur prestation au festival des villes anciennes de Chinguitty.

Ainsi dans ce qui à première vue ressemble à un grossier montage Hammada l’un des vocalistes du groupe à été arrêté par la police pour viol et détention de drogue. En tout cas le scénario qui nous est servi par des médias proches du pouvoir est on ne peut plus incohérent. Une jeune fille se présentant comme la victime du viol parle à la caméra le visage voilé.

Elle semble parler français dont elle agrémente ses phrases et affirme qu’elle a quitté son école se trouvant à Tin Soueiylim pour chercher un cyber du côté de la place Madrid. Au retour un jeune homme seul dans une voiture se serait arrêté pour elle. Elle serait montée à l’arrière et le chauffeur aurait prétexté les embouteillages pour prendre une route secondaire.

Ensuite la fille affirme qu’ayant constaté que ce n’était pas la bonne route elle le lui aurait fait constater ce auquel il répondit en verrouillant les portières. A partir de ce moment elle ne se rappelle de rien sauf qu’elle se serait réveillée dans un appartement en train de se disputer avec le jeune homme et brusquement la police est venue pour l’arrêter !!!!

Ensuite deuxième scène, un homme enturbanné (on se demande pourquoi) et qui déclare qu’il est le père de la fille et qui dit que sa fille a quitté l’école et un certain Hammada l’aurait amenée dans son appartement et que selon le médecin il pourrait y avoir eu un « rapport » !!!

Et il finit par demander l’application de la loi. Bien évidement cette histoire est peu crédible. Pour ce qui est de la drogue ce serait un jeune arrêté avec en sa possession de la drogue qui aurait déclaré que c’est Hammada qui la lui a fournie !!!

On imagine aisément qu’il est très facile pour la police de faire dire à un délinquant tout ce qu’elle veut. Tout ce que l’on sait est que le groupe Ewlad Leblad est un groupe très soft. Ses chansons ont toujours été contre la drogue et la dépravation. Les chansons à la gloire du prophète sont nombreuses ainsi que l’apologie d’une certaine morale. Mais, et c’est sans doute ce qui leur cause un problème aujourd’hui, leur rap est très contestataire contre l’establishment et l’ordre établi.

Selon l’un des membres du groupe interrogé par une radio locale, depuis cette chanson ils auraient été maintes fois menacés et un commissaire leur aurait même promis qu’ils allaient avoir des problèmes s’ils ne la dénonçaient pas. Mais on le sait aussi la répression contre les rappeurs a toujours été contre productive ailleurs.

Le rap est une musique qui appartient au mouvement culturel hip-hop, apparue au milieu des années 1980 dans les ghettos américains.

Ses textes, parfois très virulents contre les symboles du pouvoir, la police ou la justice, l’ont fait rejeter par une partie des populations. Initialement issu des quartiers défavorisés, le rap à ses débuts a surtout été une sorte d’exutoire au mal-être à la frustration et aux revendications des jeunes qui habitent ces quartiers. Les propos violents ou crus sont fréquents, volontiers provocateurs. Le rap est à la fois un phénomène social qui couvre toute la planète et une forme artistique urbaine à part entière.

Plus prés de nous on sait que c’est le groupe Y’en a Marre qui a joué un rôle primordial dans le départ du président sénégalais Abdoulaye Wade dont ils ont vilipendé la gestion et la dérive autoritaire.

En Tunisie, Hamada Ben Amor mieux connu sous le nom de scène El Général, est lui aussi considéré comme l’un des tombeurs de Ben Ali. Sa chanson Rais Lebled, sortie en décembre 2010, est décrite par le magazine Time comme l’« hymne de la révolution du jasmin et des protestataires de la place Tahrir au Caire ». Au burkina Faso, le rappeur Smockey est un héro de la révolution burkinabè. Il est l’un des responsables du « balai citoyen », un des mouvements de la société civile ayant milité contre la mise en place du Sénat au Burkina et la modification de l’article 37 de la Constitution burkinabè.

Smockey n’a pas hésité à rendre hommage au capitaine Thomas Sankara, en présidence de Blaise Compoaré et son épouse. C’était, lors de la remise de son trophée de meilleur rappeur africain aux koras 2010. Obligeant ainsi le couple présidentiel à applaudir le capitaine. Ses morceaux, « A qui profite le crime » ou « Votez pour moi », pour ne citer que ceux-ci, démontrent que ce rappeur n’a pas sa langue dans sa poche. En 2010 alors que le pays célèbre le cinquantenaire de son indépendance, il chante « 50 ans 2 dépendance » pour dénoncer 50 ans d’incompétence sans autre conséquences des dirigeants africains.

Au Maroc, le rappeur Mouad Belghouate alias L’Haqed jeune rappeur contestataire marocain de 24 ans écope d’un an de prison pour une chanson « Klab Dawla » (« Chiens de l’Etat »), mis en ligne en 2010 L7a9d est jugé parce que c’est le seul rappeur à avoir osé critiquer directement le roi Mohammed VI, explique Khalid un caricaturiste marocain.

C’est dire que les péripéties que vivent actuellement les membres du groupe Ewlad leblad ne sont pas une exception dans la région. Mais jamais encore la répression n’a réussi à faire taire des rappeurs. La Mauritanie sera -t- elle l’exception ? wait and see !







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