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21-02-2015

11:51

Rap-Monza: "La vérité est que le raprim manque d’un vrai leadership"

Rimweb - Notre site s’est entretenu avec le rappeur Monza alias « Président 2 la rue publik » par ailleurs promoteur de « Zaza production. Dans cet entretien, il réagit sur le viol en Mauritanie et se penche aussi sur les maux du mouvement raprim.

Rimweb : En tant qu’artiste comment réagissez -vous face à une actualité du pays marquée notamment par des viols, meurtres ?

Monza : Je n’assiste pas tel un spectateur à toutes ces atrocités que je lis dans la presse, que j’entends dans les medias. Ces derniers évènements de Nouakchott m’interpellent et me révoltent au plus profond de mon être. Ne pas être tous les jours à Nouakchott ne m’empêche pas d être connecté à ma ville et mon pays. Si je m’absente c’est parce que je suis entrain de le représenter ailleurs.

Je condamne vivement ces actes barbares et pervers et souhaite que l’Etat, les élus et la société civile se mobilisent pour réfléchir à une stratégie consensuelle de lutte contre l’insécurité dans nos quartiers, dans nos villes et dans tout le pays. Nous devons tous dialoguer ensemble pour sauver la patrie de cette dérive due à notre propre exclusion.

Je suis pour l’unité Nationale et non pour la division et pour cette unité nous avons le devoir de penser la Mauritanie dans sa diversité en acceptant son identité plurielle et multiculturelle.

Rimweb : Quel est votre rôle en tant qu’artiste dans tout cela?

Monza : Je suis un artiste Mauritanien doublé d’un producteur et activiste culturel. J ai déjà trois albums et plusieurs collaborations avec des artistes de tout horizon. Bien sûr que je parle de ces choses là et de beaucoup d’autres telles que la base de tout, l’Education.

Et l’éducation à l’art et à la culture car un peuple sans culture fait plus de bruit qu’un tonneau vide mais ne peut partager son eau. C’est pour dire que c’est dans l’ignorance que la bêtise se transforme en vanité et induit la paresse. Faire de la musique et tout autre art demande un apprentissage de tous les jours pour exceller dans la pratique et contribuer positivement au changement et à l’amélioration de nos mentalités et de nos conditions de vie et que par la culture nous participons au développement social et économique de façon équitable.

Nous pouvons y arriver avec la chanson, le cinéma, la poésie, les arts visuels et j’en passe.

Dans mes chansons je parle de toutes ces choses, de Mauritanie et du monde que je parcours. Il est du devoir de l’artiste de s’interposer face à l’injustice et la sottise sinon il devient complice, et je ne m’efforce non seulement de m’interposer mais aussi de proposer.

Beaucoup de jeunes mauritaniens pensent que je peux changer leur vies, que je peux régler tous leurs problèmes et qu’au delà l’Etat pourrait et ne le fait pas. J’aimerai dire que l’Etat non seulement à d’autres chats à fouetter mais ni lui ni quelqu’un d autre ne peut avoir la prétention de régler le problème des jeunes. Les seules vertus auxquelles je crois sont la foi et le travail, ce sont les seules gages de réussite.

Je ne demande pas à l’Etat de nous donner le poisson, je souhaiterai qu’il nous accompagne dans ce que nous avons commencé car depuis huit années nous apprenons aux jeunes à pécher dans les métiers du spectacle et au-delà. Je ne dis pas que je peux régler les problèmes des jeunes qui m’en parlent tout le temps sur les réseaux sociaux, je dis juste que je reviens au pays après deux mois de discussion de voyages et de diplomatie culturelle et d’action avec un VRAI projet pour les jeunes. De Nouadhibou à Kaédi, de Nouakchott à Atar tout s’organise. Et tout cela n’est que le fruit de mes chansons.

Apres le film, j’offre un album de douze titres gratuits au public exclusivement sur raprim.com avant la sortie officielle de mon 4e album prévu dans un délais imminent.

Rimweb : Un mot sur le rap mauritanien qui va mal, exemple clash entre Adviser et détracteur, emprisonnement d’un membre du groupe Ewllad Leblad ou manque de soutien étatique?

Monza : Le rap rim va mal, peut être peut être pas. Je pourrai dire que non, rap rim se porte bien si l’on voit un Adviser qui fait en termes d’audience ce que seul le festival Assalamalekoum a fait depuis plusieurs années. J’ai vu sur internet et il faut le reconnaitre, ce jeune est macha allah doué et le public l’aime. Il doit être soutenu pour qu’il se développe et qu’il s’exporte surtout et pour cela il y a du travail encore. Quand les artistes se suffisent de la seule euphorie du public de RIM c’est que là il y a problème effectivement!

Il n’y a pas de projection et tout cet engouement finalement ne devient que poudre aux yeux car toute la créativité et tout ce talent adulé bute alors sur le paraître, ne générant aucune économie viable, n’étant visible que de l’intérieur alors là il y a problème. Aujourd’hui le monde parle d’économie créative, de mobilité des artistes et d’industries culturelle!

Le raprim est encore loin de ça car beaucoup étant nombrilistes, regarde plus derrière le fleuve que la mer. Et la Mauritanie par ses artistes a besoin d’être compétitive pour exister et jouer sa partition dans les concerts des nations et je suis fier d’avoir pu y participer et j’y participe encore avec la ferme démarche d’embarquer mes semblables en tout cas ceux qui le veulent et qui croient au rap de Mauritanie pour continuer en professionnels cette aventure.

Je n’ai que faire et vraiment plus le temps de commenter des clash. PA et ADVISER sont d’excellents artistes qui méritent promotion et exportation et je suis sûr qu’ils seront plus efficaces ensemble que divisé et ensemble il me serait plus facile d’échanger avec eux pour que notre musique ensemble se fasse propulser.

Dieu merci déjà que grâce à ma Musique et mon action culturelle j’ai pu hisser mon pays dans les hautes sphères de la culture. A ce sujet c’est en tant que Représentant Afrique du Nord d’Arterial Network que j ai transmis l’information à Artwathch Africa et Freemuse (Danemark) le cas de Hamada pour investigation et assistance Juridique.

Je redis ici que l’artiste Monza soutient à 100% l’artiste et Le GROUPE Ewlad LEBLAAD dans cette épreuve et Kane Limam en tant que membre du Comité de pilotage d’arterial Network et militant des droits de l’homme souhaite que la justice fasse la lumière sur cette affaire : Juste la vérité car les oiseaux volent ensemble mais ne mangent pas le même poisson.

Le film « Une parole Libre » est sortie en France en septembre 2014. Depuis Monza a participé a la 4e conférence africaine sur l’économie créative à Rabat, fait une dizaine de concerts entre le Maroc (festival Le boulevard) la France et le Mali sur invitation du premier Ministre Malien et de la ministre de la culture, pour animer un atelier portant sur la stratégie du 360 degré au conservatoire Bala Fasseké de Bamako en collaboration avec l’éminent Cheick Tidiane SECK. Il se trouve actuellement à Dakar où il prépare son 4e album au studio Sankara, il se produira le 3 mars à Casablanca dans le cadre du World Freedom Musique Days.

Rimweb : Le rap rim va mal alors que cette musique mobilise plus de foule que les autres, il n’ya t-il pas une contradiction ?

Monza : Le public est souvent mobilisé par le rap et les rappeurs ! C’est vrai que c’est un peu contradictoire avec ce qui se passe, avec des rappeurs qui se bombent le torse et qui n’arrivent pas à rassembler les gens pour défendre les vraies causes. Quand le pays a besoin des artistes pour mobiliser la masse et se dresser contre l’infamie parce que ce soit l’histoire des mendiants, que ce soit la pauvre petite fille d’Arafat ou même les affaires passées de meurtres, viol et bavures ce sont toutes des boucheries! Et là où l’Etat a été incapable, les rappeurs aussi il faut le dire.

Le raprim est trop doué pour faire le beau et de rassembler le public à coup de bon son avec un pauvre discours que de les réveiller avec des textes sensés comme pourraient en dire Force Trankill, Mister X, Tonia Fiya, Ziza et j’en passe.

La vérité est que le raprim manque d’un vrai leadership pour organiser la masse que même les politiques ne contrôlent pas et cela il n’y a que Ahmed Hamza qui l’avait compris pour composer avec les jeunes avec une vraie capacité d’écoute et de proposition pour faire du concret, du visible et des choses qui restent.

La preuve : il a quitté la CUN et pourtant tous les jeunes sont encore avec lui et c’est là où nous autres artistes jouons notre rôle pour préserver cette masse en l’éduquant avec des chansons et des pratiques citoyennes pour participer à l’équilibre des citadins dans la cité et en dehors. Et pour cela il faudrait que le rap rim non seulement s’accepte mais surtout reconnaisse son leader et il le connait et ils le savent tous.

Propos recueillis par Awa Seydou Traoré



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