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27-04-2015

09:11

Affaire de l'expulsion du diplomate algérien en Mauritanie: Une trahison sur commande

L'Expression - A défaut d'être un acte de guerre, il s'agit là d'un acte franchement hostile envers un pays voisin et ami.

La décision prise par les autorités mauritaniennes d'expulser le chargé d'affaires de l'ambassade d'Algérie à Nouakchott est un précédent d'une extrême gravité dans les relations entre les deux pays.

A défaut d'être un acte de guerre, il s'agit là d'un acte franchement hostile envers un pays voisin et ami. Les arguments avancés par la partie mauritanienne pour prendre une pareille décision sont irrecevables et injustifiés.

Le diplomate algérien, Belkacem Cherouati, a été accusé d'avoir inspiré un article d'un journal mauritanien qui s'attaque au Maroc, accusé d'avoir envahi l'Algérie de drogues. Les Mauritaniens estiment que cette attitude est «une ingérence» dans les affaires intérieures de leur pays. «Le diplomate algérien voulait influencer les journalistes mauritaniens», indique un journaliste à la télévision qatarie Al Jazeera.

Or, le journaliste mauritanien lui- même a nié cet état de fait affirmant hier sur la chaîne Ennahar TV que les assertions selon lesquelles le diplomate algérien voulait l'influencer étaient «totalement fausses et dénuées de tout fondement».

Il aurait fallu prendre d'autres voies de protestation comme cela existe dans les traditions diplomatiques entre pays civilisés. Souvent, il est fait recours à ce qu'on appelle dans le jargon diplomatique à des notes verbales qu'on adresse au ministère des Affaires étrangères par le biais des ambassadeurs.

«Ce qui vient de se passer est totalement inédit dans les relations entre les deux pays. Il est très grave de déclarer persona non grata, un diplomate d'un pays voisin et ami», s'est indigné Abdelaziz Rehabi ancien diplomate et ex-ministre de la Communication. Pour M.Rehabi, cet acte «est en soi un acte inamical et inacceptable qui peut avoir des conséquences sur l'avenir des relations entre les deux pays», ajoutant que «dans des situations pareilles, la Mauritanie aurait pu faire des observations à l'Algérie».

En effet, même aux pires moments de l'embrouille entre le président Houari Boumediene et son homologue Mokhtar Ould Daddah, l'Algérie n'avait chassé l'ambassadeur mauritanien. Sans créer d'incident diplomatique ni de crise entre les deux pays, le président Boumediene avait préféré tancer Ould Daddah qui avait signé les accords tripartites avec le Maroc et l'Espagne le 14 novembre 1975, pour officialiser le partage des territoires sahraouis. Pourquoi alors cet empressement de la Mauritanie à vouloir croiser le fer avec l'Algérie?

Dans quel registre diplomatique faut-il alors ranger cette «nouvelle doctrine étrangère» de Nouakchott si ce n'est celui d'une attitude belliciste envers un pays qui lui a tout donné? Durant les années 1960- 1970, c'est l'Algérie qui fournissait gratuitement du gaz butane à ce pays, c'est l'Algérie qui a envoyé en Mauritanie des équipes et du matériel pour monter des journaux dont Echaâb, l'actuel voix officielle de Nouakchott, et c'est l'Algérie qui accordait annuellement des dizaines de bourses à des étudiants mauritaniens pour se former dans des universités algériennes et ce jusqu'au début des années 1990.

Que doit faire l'Algérie, sinon réagir par le principe de réciprocité et de manière ferme et urgente?Le diplomate algérien qui s'exprimait en son nom propre n'a pas livré de scoop en affirmant que le Maroc inonde le monde de drogue. Belkacem Cherouati n'a fait que répéter ce qui est connu par les instances onusiennes. Selon le rapport de l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime (Onudc), le Maroc figure parmi les plus gros producteurs de cannabis au monde.

Ce rapport indique que la surface cultivable au Maroc en résine de cannabis est estimée à 47 500 hectares. Le Royaume marocain, qui, dans ce sens, constitue une vraie menace pour la sécurité et la stabilité régionales, nargue la communauté internationale et n'exprime aucune volonté réelle d'abandonner la politique du laisser-faire qui est toujours de mise. Qui instrumentalise la Mauritanie et au profit de quels intérêts et de quel deal? Tout porte à croire que nous sommes dans le cas d'une trahison sur commande.

Brahim TAKHEROUBT



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