Cridem

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22-12-2015

19:45

Le mauvais ciblage

L'Authentique - On pensait la pratique révolue, voilà qu’elle revient, et de plus belle !... Les rafles nocturnes sont de nouveau exécutées dans la ville de Nouakchott, ou plus particulièrement, dans certains quartiers cibles de Nouakchott.

Il s’agit spécialement de ceux-là qui abritent des couches indexées de nos populations et les étrangers qui proviennent de l’Afrique subsaharienne. Les excès ne se comptent plus et les dérapages sont nombreux. Depuis, les habitants vivent dans la peur bleue. Ils n’osent même plus sortir de chez eux à partir de 20 heures.

Si dans certaines Moughataa, il n’y a presque jamais de présence policière oppressive et envahissante, comme dans les quartiers huppés de Tevragh Zeina, dans d’autres, notamment à Sebkha et El Mina entre autres, les rafles sont bel et bien menées. Elles visent en particulier les jeunes, visiblement désœuvrés se promenant dans des droits "suspects" aux yeux de la police.

Toute personne, sans distinction d’âge, ni de sexe, portant un pantalon et une chemise est supposée suspecte. Donc, embarquée et déposée au poste. C’est la projection de l’ancienne et rétrograde idée qui fait rimer "Pantalon" à criminel.

Le délit de faciès est une vieille habitude de la police. Il est même systémique dans ce pays et personne ne semble en mesure d’y mettre fin. Héritée des pratiques impunies des violations en série des droits de l’homme institutionnalisées depuis le milieu des années 80, la stigmatisation des citoyens à valeur de loi. Et les forces de sécurité maintiennent cette habitude pour elle et garde bien la main pour elle.

Aussi triste à dire soit-il, nos forces de sécurité résument, par certaines de leurs attitudes maladroites, le condensé du racisme primaire et sadique contre certaines catégories des populations du pays, allant même jusqu’à s’évertuer à mettre la pression sur celle-ci.

Au moindre prétexte, aussi inimaginable soit-il, elles s’acharnent contre cette partie de la population, semant la peur, la panique et la désolation dans des quartiers cibles.

Ici, l’Etat du droit se met au garde-à-vous devant l’ordre de certains agents zélés. Les dénonciations, les condamnations et autres plaintes contre cet état de fait, devenu habitude, n’ont servi à rien. Jamais les auteurs de ces agissements qui devraient appartenir à un autre siècle, n’ont été interpellés. Jamais ils n’ont été punis. Au contraire…

Les "acquis" de la méthode de terreur sont visiblement bien appréciés par la hiérarchie sécuritaire et constamment protégés par les tenants du pouvoir depuis le départ de Feu Moktar Ould Daddah Sinon, comment comprendre qu’à Tevragh Zeina, les citoyens peuvent se mouvoir en toute quiétude pendant de longues heures durant la nuit, alors que d’autres citoyens habitants d’autres quartiers sont confinés dans un couvre-feu qui ne dit pas son nom ?

Si ce n’est pas de la stigmatisation, voire de la ségrégation et de l’acharnement contre les populations de ces quartiers, c’est quoi alors ? Il est connu de tous, que la criminalité est un phénomène social qui traverse, malheureusement, toutes les composantes et couches sociales de notre peuple.

Pour contenir le crime et juguler l’insécurité, l’intelligence, l’équité et la morale attendus de l’Etat ne doivent pas se traduire par une traque systématiques de jeunes ou des habitants d’un quartier habité par des pauvres, dans une action qui suscite plus de peur que de sécurité ! Le sentiment des citoyens en Mauritanie est que les services de l’ordre ne respectent jamais l’égalité entre citoyens. Il y a un traitement réservé aux riches et un autre ax les pauvres.

Jetez un coup d’œil dans le violon de n’importe quel poste de police ou de gendarmerie ? Regardez les prisons où les juges déposent les gens comme des objets pour des futilités comme un Sms égaré ou le vol d’un minable portable ? Voyez les préfectures où des gens se font spolier, publiquement, de leurs terrains dûment possédés par d’autres avec la complicité de l’administration d’un groupe au détriment d’autres !

Et là, vous serez édifié sur le traitement des dossiers confiés aux forces de sécurité ! La sécurité et la quiétude dépendent de l’égalité et de la justice. Les citoyens sont nés libres et ils doivent le demeurer pour toujours. Tel est l’essentiel. Le reste, tout le reste, n’est que futilité. En tout cas, cela ne conduira jamais le pays vers l’avant.

Amar Ould Béjà



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