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31-12-2015

14:33

«Ces jihadistes sont fascinés par la violence»

La Dépêche - Terrorisme - Olivier Roy, spécialiste de l'Islam et professeur à l'Institut universitaire européen de Florence (Italie)
Invité hier matin sur France Info, Olivier Roy a analysé le phénomène des jeunes combattants français venant grossir les rangs de l'État islamique.

Quel est le profil des candidats au jihad en Syrie ?

Cela fait 20 ans que des jeunes dans toute l'Europe, et pas seulement, partent pour le jihad mondial. Ils se fichent complètement de la situation locale. Ils vont là où il y a quelque chose que l'on peut appeler : «jihad contre l'ordre mondial».

C'était l'Afghanistan autrefois, puis la Tchétchénie, et aussi la Bosnie. Maintenant, ils vont en Syrie et en Irak. Demain, ils seront en Somalie ou en Mauritanie… Quand on regarde de près, deux catégories assez précises de radicalisés émergent. Il y a tout d'abord des jeunes issus de la deuxième génération.

C'est-à-dire des jeunes musulmans dont les parents sont venus en Europe comme travailleurs immigrés soit il y a 40 ans, 20 ans ou 10 ans. Quant à la seconde catégorie, il s'agit des convertis. Elle surprend tout le monde et casse toutes les analyses faciles sur «le choc des civilisations».

Ils représentent 25 % des combattants français partis sur le front du jihad. On a des jeunes Normands, Bretons qui d'un seul coup se convertissent à l'Islam dans sa version la plus stricte : le salafisme.

Quid de leurs motivations ? Sont-elles religieuses ?

C'est complexe. On ne peut pas dire que la religion soit le seul prétexte. Ils vont investir dans la religion un ressentiment contre le monde : un désir de régénération, de purification d'eux-mêmes, voir une vision suicidaire.

Il s'agit en fait de révoltes individuelles et générationnelles Les jeunes vont se radicaliser entre copains, entre «frères». Dans toutes les cellules radicales, aujourd'hui en France, vous avez une, deux ou trois paires de «frères». Ils ne se retournent pas forcément d'un seul coup contre les parents mais contre tout ce que représente le monde de leurs parents. En fait, les jihadistes sont des rebelles en quête d'une cause.

Que vont-ils donc chercher en Syrie ?

Ils vont chercher le combat car ils sont fascinés par la violence physique. Ils partent là-bas pour retrouver les univers de Call of Duty (ndlr : jeu vidéo de guerre) ou de Scarface (ndlr : film de Brian de Palma).

Ils sont très «gores» et sanglants. Nous baignons dans une culture de la violence qui s'exprime sous d'autres formes en Occident que le jihadisme, mais qui fascine une partie des jeunes en rupture avec la société...



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