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09-10-2016

10:33

Lutte contre le VIH/SIDA : Atelier sur le rôle de la société civile en matière de réduction des risques auprès des usagers de drogues illicites

Pairs Educateurs - La plateforme régionale MENA (Middle East and North Africa), qui réunit l’association SOS Pairs Educateurs (Mauritanie), l'APCS (Algérie), ATL (Tunisie), et ALCS (Maroc), a animé les 26-27 septembre 2016 à Alger un atelier sur le rôle de la société civile dans la réduction des risques (RdR) en matière de VIH/SIDA auprès des usagers de drogue.

Cet atelier visait à faire l’état de lieu, mutualiser et valoriser l’expérience associative comme base d’un plaidoyer en faveur de l’amélioration, du renforcement et de l’extension, à l’échelle des besoins dans chaque pays, de l’offre des services de réduction des risques en direction des personnes usagères de drogues, en particulier les drogues injectables.

A l’échelle globale, les conséquences sanitaires de l’usage illicite de drogues sont un sujet de préoccupation, car une large majorité des usagers de drogues n’a toujours pas accès au traitement spécifique requis.

Cela fait porter un lourd fardeau aux systèmes de santé nationaux en termes de prévention, de traitement et de soins des problèmes de santé liés à l’usage de drogues. C’est le cas pour la plupart des pays de la région MENA, où l’adoption et mise en œuvre du programme de réduction de risques se trouve confrontée à plusieurs obstacles structurels :

Usage de drogues illicites criminalisé et perçu comme trouble de santé mentale

Un premier obstacle est lié au cadre juridique, essentiellement punitif et répressif non seulement pour le trafic mais également pour la consommation. En Mauritanie, la criminalisation de la personne usagère de drogue, qui fait certes écho aux perceptions socioculturelles du phénomène, a pour conséquence d’occulter la vision holistique de la victime de la drogue requise pour développer une stratégie efficace de réduction des risques, stratégie qui pour avoir un impact réel requiert la prise en compte des droits de l’usager, y compris à un traitement médical et psychosocial spécifique adapté. Un tel programme exige une approche multisectorielle de la réduction des risques, ce qui est loin encore d’être pleinement le cas dans notre région (même si des nuances significatives existent entre les quatre pays de la zone).

Un second obstacle concerne les systèmes nationaux de soins et les politiques sociales afférentes, dans le cadre desquels l’usage de drogues tend à être associé avant tout à un trouble de santé mentale. A Nouakchott, où les personnes utilisatrices de drogues sont prises en charge par le Service de psychiatrie du Centre hospitalier national, l’unique passerelle institutionnelle (selon le cadre juridique en vigueur) existante reste celle avec le circuit pénal. Et bien que ce Service de psychiatrie ne dispose pas de personnels spécialisés dédiés et ne soit donc pas outillé (à défaut d’être dotée) pour initier des mesures de réduction des risques qui auraient fait leurs preuves ailleurs dans le monde et se justifieraient d’ors et déjà au regard de la loi, aucune coordination opérationnelle n’a jusqu’ici été établie avec l’autorité nationale de lutte contre le VIH/SIDA.

Gérer les risques

Ainsi en ce qui concerne la Mauritanie, les participants se sont félicités des effort déjà menés par le pays, notamment l’identification de populations passerelles et leur meilleure prise en compte dans l’orientation du Cadre stratégique national de lutte contre le VIH/SIDA - y compris tout le travail d’enquête mené auprès de ces populations en vue de mieux orienter la réponse nationale en matière de contrôle de l’épidémie. Ils appellent les autorités à étendre cet effort au groupe des usagers de drogues illicites, à en mieux établir les contours et pratiques, et à l’intégrer davantage à la riposte nationale.

L’une des recommandations de l’atelier est la nécessité de mettre en place rapidement une mécanique institutionnelle multisectorielle de réduction des risques, basée sur une approche de santé publique et respectueuse des droits humains. En Mauritanie, une première étape en ce sens devrait être une plus large information du public sur l’intérêt de la RdR à la fois en tant qu’effort de santé publique, et de promotion des droits de la personne, étape au titre de laquelle les organisations de la société civile actives dans la prévention du VIH/SIDA ont une contribution importante à apporter.

Signe de l’attention positive attribuée à la thématique, l’atelier a été parrainé par le Ministère de la santé, de la population et de la réforme hospitalière algérien, et a vu la participation de la directrice du Bureau Régional d'ONUSIDA, du représentant de l'OMS, de la portfolio-manager du Fonds Mondial de Lutte contre le Sida, la Tuberculose et le Paludisme, aux côtés d’experts internationaux du secteur et de représentants de Médecins du Monde ainsi que d’associations des quatre pays de la région MENA.

Etait également présente la directrice de l'Office national algérien de lutte contre les toxicomanies. La résistance ou le tabou social et culturel autour de la toxicomanie n’arrêtera pas le nombre d’usagers de drogues injectables de grandir au cours des prochaines années, autant prévenir les risques sanitaires associés en donnant l’opportunité aux personnes usagères de drogues illicites de s’extirper de leur enfer.





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