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22-02-2017

08:12

Chambre de commerce : vide juridique sur fond de corruption !

Open Chamber Partnerships - Au moment où le pays est encore sous l’emprise du dialogue national inclusif où la plus haute autorité de l’Etat est montée au créneau pour réaffirmer la suprématie de la Constitution et pour dire haut et fort que le respect des lois est la seule voix qui permettra au pays de sortir de l’ornière ; certaines institutions publiques, et pas des moindres, continuent de ramer à contre courant.

C’est là, l’amer constat des adhérents de la Chambre de Commerce, d’Industrie et d’Agriculture de Mauritanie (CCIAM) et des milieux économiques qui commencent à douter des velléités d’organisation d’élection, dans les délais réglementaires, au sein de cette institution consulaire publique.

En effet, après deux mandats successifs, entrecoupés d’un bonus deux ans, sans aucun fondement juridique, c’est toujours la même java à la CCIAM alors que le dernier mandat du Président sortant est arrivé à terme le 03 octobre 2016. Et c’est là un secret de Polichinelle car la Chambre de commerce a souvent défrayé la chronique, notamment lors du passage de l’Inspection Générale de l’Etat (IGE), qui a eu, entre autres conséquences, la reprise de la gestion de la taxe de tonnage par l’Etat.

Pire encore, avec plus de quatre mois de vide juridique, l’on est en train de s’acheminer vers le même scenario. Comme le dit l’adage « chasser le naturel, il revient au galop » ! Il faut dire qu’il n’est pas rare d’entendre certains ténors de la CCIAM développer une rhétorique bancale arguant que la Mauritanie est le pays des « bédouins » où il est possible de tout « improviser »…en toute impunité. C’est là qu’il faudrait comprendre le paradigme de la Chambre consulaire moulé dans une sorte de mépris de ce pays et de ses autorités souvent conciliantes.

Pourtant, tout près de chez, les responsables de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Mali viennent de nous donner une grande leçon de gouvernance consulaire en mettant en place une « Commission spéciale transitoire » qui a abouti à la tenue d’élections apaisées évitant ainsi tout vide juridique. C’est dire qu’en Mauritanie, les responsables de la CCIAM n’ont aucune circonstance atténuante dans leur démarche tortueuse à vouloir proroger indéfiniment leur mandat, et indirectement leurs privilèges immérités.

Un vide juridique planifié

Sans vouloir jeter l’anathème sur personne, il semble que c’est le Secrétaire Général de la Chambre de commerce qui, au sommet de son lyrisme, aurait convaincu le Président de temporiser…Et les arguments avancés ne manquent pas de réalisme : festivités du 28 novembre, dialogue national inclusif, référendum constitutionnel…coupe d’Afrique des nations, et pourquoi pas un déluge venu de l’Océan.

D’aucuns vont même jusqu’à avancer que c’est ce responsable qui s’ingénie à faire le ménage tout autour du Président si bien qu’il aurait réussi à faire passer à la trappe sept bons consultants qualifiés appelés en rescousse par le premier responsable de la Chambre de commerce. Malheureusement, la bonne foi du Président de la CCIAM ne suffit pas si des actions innovantes ne suivent pas car la stratégie n’est finalement rien d’autre que l’art de l’exécution.

Ainsi de fil en aiguille, la Chambre de commerce continue de fonctionner tout en privilégiant le côté « institutionnel » rythmé par le rituel anodin des « voyages du Président et de son SG ». Avec une administration interne d'une grande carence, les responsables de la CCIAM n’ont jamais réussi à créer de la valeur ni à imaginer des services dédiés aux entreprises.

Ils se sont tout simplement contentés d’engranger la taxe sur le tonnage qui est facturée au consommateur final. Certes, en plus d’une décennie de vaches grasses, des infrastructures ont été construites mettant ainsi aux normes la Chambre consulaire, ce qui est tout à fait louable. Cependant, les responsables de la CCIAM ont engagé autant de dépenses d’investissement que de dépenses de fonctionnement dont ils sont les principaux bénéficiaires : traitements et salaires, avantages en nature de toutes sortes, ameublement, frais de missions…etc.

Aujourd’hui, c’est surtout la crédibilité de la Chambre de commerce qui est en jeu car le vide juridique entretenu sciemment par les responsables de cette institution publique est un vice rédhibitoire qui impacte négativement sur les partenaires au développement devenus méfiants et distants ; ce qui risque, à terme, d’hypothéquer les projets à l’international. La Chambre de commerce, opérationnelle de puis 1959, n’est plus qu’une sinécure, une chambre gadget entre les mains de quelques arrivistes.

Les permanents de la Chambre de commerce commencent à se poser des questions du genre : qui dirige la CCIAM ? Est-ce le Président sortant ? Est-ce le SG ? Est-ce un groupe d’opportunistes du Bureau Exécutif ? Tout ceci est symptomatique d’un malaise, très nocif au climat des affaires en Mauritanie, et qui risque de plomber les efforts d’investissement consentis par les pouvoirs publics.

De la chambre gadget à l’open chamber

Si les responsables de la Chambre de commerce veulent nous faire savoir que la Mauritanie n’est pas le Mali, ils ont réussi leur coup. S’ils veulent nous faire croire que la Mauritanie est une République bananière, ils ont réussi à moitié. Par contre, si leur intention est de nous faire avaler toutes ces couleuvres, là ils ont lamentablement échoué !

Nous, adhérents et partenaires de la CCIAM, demandons aux autorités de tutelles de prendre, sans délais, toutes les mesures qui s’imposent pour l’organisation d’élections transparentes au sein de cette institution consulaire publique. C’est là, une attente légitime des milieux des affaires et de nos partenaires au développement. Il est temps que les pseudo-responsables actuels de la Chambre de commerce descendent de leurs grands chevaux, et cessent d’abuser de notre patience.

Pour se faire, nous suggérons à l’Etat de geler la taxe sur le tonnage, et de n’accorder à la CCIAM que le minimum nécessaire pour assurer les affaires courantes. Le cas échéant, nous serons en droit de refuser le paiement de la taxe sur le tonnage pour une institution publique qui fonctionne hors de tout cadre juridique.

Nous exigeons qu’à l’image de l’open gouvernement, une open chamber ou une chambre ouverte pour une meilleure transparence de l’action publique et son ouverture à de nouvelles formes de concertations et de collaboration avec les adhérents de la Chambre de commerce à travers le numérique et les nouvelles technologies.

L’Etat ne devrait plus tolérer des standards éthiques et des codes de conduites lamentables pour de hauts responsables qui gèrent des deniers publics. A la CCIAM, le manque de transparence budgétaire et fiscale, les missions non justifiées et les gratifications outrageuses sont là pour nous rappeler l’intérêt de renforcer l’intégrité publique et de combatte la corruption.

Un Bureau Exécutif diminué et amnésique

Diminué, c’est le cas de le dire ! En effet, le Bureau Exécutif de la Chambre de commerce avait perdu successivement quatre de ses meilleurs membres, paix à leur âme. Un autre éminent membre est éloigné par la maladie depuis plus d’une année. Quant à l’amnésie en question, elle est plutôt acquise ! Il semble que les deux principaux responsables de la Chambre de commerce aient trouvé un deal avec quelques membres introduits du Bureau Exécutif. Inutile de chercher l’auteur du délit d’initié ! L’information circule déjà hors des couloirs de la CCIAM. Un arrangement scabreux qui profite à un petit groupe de « losers » qui veulent faire de cette institution publique une chasse gardée où l’on distribue des dividendes sous le manteau.

Aujourd’hui, on se demande quel mérite peut être accordé aux mentors de la Chambre de commerce, eux qui ont oublié que leur responsabilité est uniquement honorifique et ne devrait, en aucun cas, être rémunérée. Eux, qui ont été incapables de valoriser leur expérience en créant des services et des ressources propres à la CCIAM à l’image des autres chambres consulaires de la sous région. Déconnectés des réalités et horizons ouverts par les nouvelles technologies de l’information et de la communication, cette vieille classe d’hommes d’affaires entretient la léthargie et l’amateurisme dans lesquels patauge la Chambre de commerce depuis plusieurs années.

Cet anachronisme a été déjà perçu dans les hautes sphères de l’Etat, et nous estimons qu’il primordial d’ouvrir la CCIAM aux jeunes opérateurs économiques porteurs de projets neufs et innovants.

Dans la même logique, il est impératif de mettre en place une unité de contrôle de gestion autonome au sein de la Chambre de commerce pour casser la relation ombilicale entre l’ordonnateur et le comptable source de toutes les entorses budgétaires. Cette mesure est d’ailleurs extrapolable à tous les établissements publics qui souffrent, en vérité, de la même problématique.

La taxe sur le tonnage payée par des contribuables, sans contre partie réelle en matière de services mesurables, ne doit plus servir à financer les frais de villégiature ou la dolce vita pour un petit lobby en mal de sensations. Basta ! Il est inacceptable qu’une démocratie comme la notre, et de surcroit une République islamique, continue de recevoir stoïquement des leçons de gouvernance des autres à cause du comportement égoïste et irresponsable de certaines brebis galeuses.

Si les autorités veulent agir ; c’est maintenant et pas plus tard ! La Chambre de commerce est une institution publique, l’Etat doit y jouer, pleinement et sans complaisance, son rôle de régulateur. Une Assemblée Générale convoquée par la procédure d’urgence, voilà ce que nous attendons des autorités compétentes ! Personne n’est au dessus de la loi, et surtout pas une bande de tricheurs patentés.





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