Cridem

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20-08-2017

10:33

Editorial de Biladi

Rmibiladi - On raconte qu’un enfant, issu d’une tribu de chez nous connue par la spontanéité de ses membres, a demandé à sa maman si le bon Dieu possède des oreilles. Elle lui répondit à basse voix : "mon fils, il a des oreilles plus grandes que les couvertures, mais ça ne se dit pas".

Le bouillant et téméraire sénateur Mohamed Ould Ghadda a outrepassé cette sagesse et est allé fouiller dans les affaires inavouées et inavouables du Boss. Et a surtout commis l’erreur fatale de déclarer publiquement sur le petit écran qu’il est en possession d’autres dossiers "accablants" pour le grand chef et son entourage.

Il est évident, le cas échéant, qu’il allait susciter, sans certainement le vouloir, la curiosité de la police politique du régime, au chômage depuis quelques années, et la fureur de ce dernier en mauvaise forme après l’échec du référendum.

C’est pour ces raisons que le jeune homme a été empêché de voyager via Rosso vers le Sénégal et c’est sûrement pour cela qu’il a été arrêté le 11 août dernier à son domicile à Nouakchott et mis au secret pendant une semaine avant d’apparaitre à la brigade mixte de gendarmerie de la capitale. Il est peu probable qu’il soit resté tout ce temps dans cette brigade mixte de gendarmerie.

Tout porte plutôt à croire qu’il était entre les mains de la police politique et qu’on l’aurait transféré à la dernière minute chez la gendarmerie supposée, à tors ou à raison, plus "potable" que la police politique, aux yeux de l’opinion. Quant au parquet général, qui a surgi brusquement et brutalement dans cette affaire, il n’aurait même pas été associé à la rédaction du communiqué qui lui est attribué.

Ce communiqué mal ficelé accuse Ould Ghadda et "plusieurs personnes d’actes de complicité et de planification pour commettre des crimes transfrontaliers de grande ampleur et étrangers aux meurs et valeurs de notre société, dans le cadre d’une structure organisée, cherchant à semer le désordre et à perturber la sécurité publique"… Il rend l’affaire plus complexe et moins facile à comprendre. Surtout qu’on a renvoyé l’intéressé et son dossier –vide- devant le Commissariat de répression des crimes économiques. Une manière et franchement pas très habile pour faire croire aux naïfs que le dossier n’est pas politique.

Que peut-on lire à travers ce piètre montage ? Il est clair que le régime est pris à la gorge et que les autorités viennent d’en apporter une implacable démonstration en essayant d’inculper Ghadda et d’autres opposants en exil dans une affaire fabriquée de toutes pièces par des mains non expertes. Leur crime ? Avoir osé dire non au régime de Aziz et d’avoir, peut-être, aidé ou songé de soutenir les actions de l’opposition. Ce qui n’est pas un crime, mais plutôt un droit dans un pays supposé être démocratique.

Il semble toutefois que le président Aziz, qui a jusqu’ici toujours réussi à bien manœuvrer, commet cette fois-ci une grave erreur d’appréciation en croyant qu’il suffirait de museler ou emprisonner les personnes réfractaires pour reprendre le contrôle de la situation politique. Croire cela, c’est ignorer qu’à chaque étape, c’est une nouvelle génération de nouveaux opposants que le pouvoir risque de dresser contre lui.

En plus de tout cela, il y a l’usure du pouvoir qui a produit ses effets sur lui et qui fait qu’il n’est peut être plus en mesure de réussir tout les coups qu’il pourrait tenter dans le pays comme ce fut le cas au début de son règne avec, par exemple, l’affaire des anciens directeurs d’Air-Mauritanie terminée pourtant en queue de poisson et qui a été montée pour dissuader les accusés de continuer leur opposition au putsch contre Ould Cheikh Abdellahi.





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