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30-11-2017

21:33

Interview. Youpi 4 ever, un old timer de l’âge d’or du rap mauritanien

Cridem Culture - Qu’est-ce qu’il est devenu, après bientôt 3 ans. Il s’agit de Youpi 4 ever, celui qui s’est surnommé le "bad boy" du rap mauritanien. Cridem Culture a déniché cet old timer de l’âge d’or du rap mauritanien. Interview.

Cridem Culture. Le rap mauritanien se meurt à petits feux, moins de concerts et de sorties d’album. Tu fais partie de ces old timer (anciens) de l’âge d’or du rap mauritanien. Pourquoi, ça ne rappe plus, ça ne créé plus ?

Merci pour la pertinence de la question et sa portée réaliste. J’aimerai d’abord saluer l'ensemble des artistes mauritaniens et particulièrement ceux des cultures urbaines notamment du Rap qui continuent de camper encore le décor du mouvement hip hop mauritanien ...

Vous n'êtes pas sans savoir, comme d'ailleurs vous l'affirmez dans votre question et à l'endroit de ma personne que l'âge d'or du Rap mauritanien à l’image de ses artistes a fait ses preuves mais pas seulement entre les chambres et les studios pour ne pas dire (Râper et juste se faire applaudir).

Nous étions membres actifs et fondateurs et nous avons dû faire des choix entre la popularité et l'existence. Ainsi, nous avons compris très tôt qu’il nous fallait faire le choix du deuxième : exister pour bâtir, exister pour transmettre et apprendre aux générations futures de cette musique, les bases essentielles afin que le constat que vous faites ne soit.

Mais nous nous confrontions à des problèmes qui s’accentuaient autour de la schématisation même de cette musique urbaine. Actuellement, cela va de mal en pis.... je vous donne des exemples de ce qui faisait la force du Rap en Mauritanie à une certaine époque. Nous étions unis et avions cette ambition de réussite et délectation du Rap jusqu'à ce qu’elle soit la première force musicale d'influence en Mauritanie.

Bien sûr, c’est au prix d'énormes sacrifices, de menaces voire de persécutions mais nous avons su tenir la barre très haut. La régression des spectacles et des productions implique beaucoup de facteurs.

Je souligne que nous étions non seulement des chanteurs mais aussi, nous faisions de l'auto production et cela pendant plus de dix ans. Mes albums et mon engagement humanitaire sauront répondre éventuellement à nos détracteurs qui nous accusent souvent d'avoir immigré ou de s’exiler, comme ils le disent au détriment du Rap ...

J’ai mené au bout de 18 ans de carrière ma part des choses non sans difficultés, en s’autoproduisant ou en produisant d'autres artistes tout en restant dans la ligne directive de ma conception de la musique et de l'art en général. Les dates et les chiffres parlent d’eux-mêmes. Je ne me jette pas des fleurs en disant que j’ai fait un parcours sans faute ou que je n’ai aucune part de responsabilité dans la situation chaotique actuelle que vit le Rap mauritanien.

A cette nouvelle génération qui tient en ce moment les manettes, je voulais lui rappeler que le rap mauritanien qu’on a porté fièrement et courageusement est en danger, le niveau baisse. Je voudrais ici en profiter pour tirer mon chapeau à ces artistes qui continuent de travailler authentiquement, tout en s'adaptant à l'évolution des normes musicales, malgré les problèmes auxquels ils font face....

L'autre cause aussi de la "mort", du rap mauritanien, il faut le reconnaître, c’est l'exode des artistes, à l’instar de ma personne.

Cridem Culture. Après votre très osé clip real love tourné au Sénégal dans lequel on t’entend dire : "BB, prends moi en entier", c’est silence radio, jusqu’à votre départ aux USA. Que s’est-il passé ?

REAL LOVE est l'un de mes titres les plus appréciés par la jeunesse mauritanienne. C’est un titre qui m’a valu aussi des critiques et menaces. Je suis un artiste qui se bat pour la liberté d'expression et l'émancipation de la jeunesse et de son épanouissement.

Vous avez raison de souligner qu’artistiquement, j'étais en mode silence radio depuis la parution de ce morceau. En effet, il me fallait sortir du pays pour ma sécurité. Malheureusement, dans nos pays, on est souvent persécuté lorsqu’on adopte la liberté.

Comme vous pouvez le constater, je n'ai pas baissé les bras et je continue mon travail, joue mon rôle en travaillant avec mon équipe à Nouakchott pour la sortie d’ une téléréalité "LA FAMILLE", un projet que j'avais débuté quand j'étais encore en Mauritanie et qui parle de tous ces problèmes que rencontrent la jeunesse comme l'égalité, les injustices, le droit des femmes, la radicalisation des jeunes, l'extrémisme violent, des sujets sensibles mais qui doivent être relatés et abordé par des artistes.

Ma chanson "REAL LOVE" est un morceau qui exprime un rêve et une envie dont beaucoup de jeunes sont privés dans leurs propres pays. Ainsi, pour mieux donner espoir à ces gens, il m’a fallu quitter mon pays pour mieux continuer le combat.

Cridem Culture. Sur quoi bosses-tu musicalement après avoir sorti, aux Etats-Unis, avec moins de succès "Ljew", "Ntouma", "3ez Lmejhoul" ?

Je travaille sur des productions. Laissez-moi quand même vous annoncer la sortie prochaine de mon nouveau single nommé "SMILE FOR ME" (TBESMILI) qui paraîtra aussi en version vidéo et d'ici peu, les projets futurs seront divulgués.

Propos recueillis par Babacar Baye NDIAYE

©Cridem 2017

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