Cridem

Lancer l'impression
21-09-2014

15:13

Entrentien avec Youpi, rappeur engagé : "Notre combat ne s'arrêtera pas"

Culturim - Youpy vous êtes un artiste engagé socialement mais cela ne fait pas de vous une exception à la règle politique du système qui vous tient sur sa ligne de mire à l'image de cette tournée dont on vous a refusé le déroulement. êtes-vous prêt à poursuivre votre combat au risque de vous voir privé de chanter ?

Je suis un artiste qui non seulement lutte pour la liberté de penser et d'agir mais aussi une victime d'un système raciste et féodal qui se veut d’être soutenu par des artistes corrompus dont je ne ferai jamais parti.

C'est pourquoi comme vous dites je suis considéré comme un artiste qui dérange. Ainsi, je fait l'objet de beaucoup d'intimidations et de blocus par rapport à mes projets et certains de mes chansons qui non seulement sont engagées mais parlent d'unité, d'égalité et de justice dans un pays où l'éducation et la parité pour tous sont encore des sujets tabous.

Justement, pouvez-vous nous éclairer un peu sur cet incident, à Kaédi?

Laissez moi juste vous rappeler que ce n’était pas exactement à Kaedi mais à Niabina à une quarantaine de kilomètre de Kaedi. C’était lors de ma tournée de sensibilisation sur l'excision des jeunes filles, la liberté d'expression et l’extrémisme violent.

Vous savez, nous avons souvent des slogans anglo-saxon et des expressions un peu trop hip hop qui sont issus des cultures urbaines. Nous avions donc choisi de nommer la tournée FIGHT FOR YOUR RIGHT TOUR et j'aimerai remercier au passage mes confrères artistes pour leur engagement et leur courage lors de cette tournée durant laquelle ils étaient à mes côtés.

Ce slogan comme je disais faisait peur alors qu'il était porteur de message à l'endroit des femmes et de ces jeunes en désolation qui sont des proies faciles pour les écoles de terreur et nous devions les conscientiser sur les dangers du terrorisme. Ainsi, arrivés au poste de contrôle de Niabina, les gendarmes nous demandaient pourquoi nous utilisons des slogans en anglais et non en arabe.

Au début, nous n'avons pas répondu à la provocation mais nous avons remarqué qu'ils faisaient exprès de nous retarder pour arriver dans la ville de KAEDI à temps pour la soirée concert de sensibilisation puisqu'il faisait déjà 21h quand nous arrivâmes à ce poste alors nous avons décidé de réagir en scandant le slogan fight for your right en refrain tout en le traduisant en poullar hassaniya wolof et soninké les cinq langues nationales et non seulement l'arabe.

Ainsi, ils étaient obligés de nous laisser passer pour continuer notre route mais ce sont des choses que nous vivons presque chaque jour en tant qu'artistes activistes et que les populations vivent sous d'autres. C'est pourquoi tant que ces oppressions auront lieu, notre combat ne s'arrêtera pas.

Avez-vous déjà été emprisonné pour vos ou l'une de vos chansons?

Ça aurait été certainement la goute d'eau qui aurait renversé le vase puisque cela devient très fréquent chez les artistes engagés et les activistes mais vous n’êtes pas sans savoir que nous vivons pire que d’être enfermés entre quatre murs.

Nous sommes privés de loisirs et de libertés, victimes de rafles systématiques et ciblée. Et bien qu'il ait dans ce pays des boites de nuits et des endroits pour des spectacles, on n'a toujours pas le droit de dire ce que l'on pense. Je n'ai jamais été en prison pour l'une de mes chanson mais j'ai reçu des menaces pour plusieurs d'entre elles. Je n'ai jamais été en prison mais je vis dans un pays où la prison, c'est le quotidien et son lot d'oppression qui nous empêche de vivre en droit.





Les articles, commentaires et propos sont la propriété de leur(s) auteur(s) et n'engagent que leur avis, opinion et responsabilité


 


Toute reprise d'article ou extrait d'article devra inclure une référence www.cridem.org