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14-03-2018

14:33

Les fatalités historiques face à la volonté de refonte du parti

Dr Sidi Mohamed Ould SIDI - Ayant pris part aux journées de concertations du parti Union pour la République, et précisément à l’atelier portant sur le discours politique, j’aimerais faire part d’un certain nombre d’idées. J’aurais pu les laisser à la merci de la réserve, mais les raisons d’intérêt général militent en faveur de leur publication.

Encore que la diversité des interventions à cet atelier crée un certain anonymat bon enfant susceptible de créer, involontairement, une confusion de genres. Dés lors, également, que l’esprit de ces journées et de recadrer – voire de refonte même – et de donner une nouvelle impulsion à sa stratégie active.

D’emblée, le document de politique générale du parti présenté dégage les vrais enjeux cruciaux tant politiques que socio économiques actuels, à long et à court terme du pays, en rappelant dans son préambule la prise en considération de son soubassement historique et politique, notamment les premières et diverses structurations politiques des siècles passées, tout comme l’intérêt accordé à la résistance à l’occupant, qui ne sont qu’un enrichissement de sa base existentielle et de son patrimoine national.

Cependant, parce qu’il s’agit, donc, d’une nouvelle dynamique du parti, les idées que je voudrais exposer sont relatives d’abord aux pesanteurs sociales, à l’unité nationale, et au choix des mandataires du peuple aux prochaines échéances électorales, notamment législatives et régionales.

Je reconnais que certains points ou passages qui seront vues relèvent de thèmes qui ont été l’objet d’autres ateliers spécifiques mais il n’est pas sans intérêt de les enrichir.

I. Les pesanteurs sociales

Celles-ci, notamment tribales, ont une corrélation évidente avec la question de l’esclavage. Etant entendu qu’elles relèvent d’un héritage national et par conséquent, on ne peut imputer leur existence et sa consécration aux différents régimes qui se sont succédés, depuis l’émergence de l’Etat, dés la fin des années 1950, jusqu’à nos jours. Donc, des tares objectives et même fatales qui ne peuvent être gérer que par un dépassement de haut vol en attendant que le temps vienne à les résorber. Ce que j’avais, à plusieurs occasions, exprimé tant en on que par écrit.

On aurait aimé, pour des raisons d’intégration nationale, voir l’impossibilité d’une identification à une tribu ou à un groupement social donné. Mais les réalités sont là. Le citoyen lambda a plus tendance à indexer le détenteur du pouvoir politique, quel qu’il soit, à sa tribu qu’à sa fonction.

A un autre degré, toutes les circonstances heureuses ou malheureuses sont du lot de la tribu, c’est à elle qu’on revient pour les entourer de toute la « légitimité » nécessaire. C’est dire la prégnance de ce référent tribal, sans pour autant ignorer la volonté nationale, et cela depuis longtemps, en vue d’occulter cette réalité sociale.

Il y a une persistance d’une dichotomie entre l’esprit juridique national d’une part et le vécu social d’autre part. C’est pourquoi cette volonté nationale n’a jamais manqué mais bute sur cette pesanteur qui ne peut se dissoudre qu’à long terme. A l’instar de l’évolution de toutes les nations qui l’avaient vécue.

Ce que certains considèrent comme esclavage obéit à la même logique, qui plus est l’objet d’un arsenal juridique national qui va crescendo dans le sens de sa condamnation et de son éradication. Il existe plus dans les esprits que d’être la résultante d’une pratique dégradante et privative de liberté.

On peut parler de séquelles d’une stratification sociale qu’un certain auteur impute à l’époque almoravide. L’évolution de la conscience de celles-ci et leur déclin sont tributaires du seul facteur temps. A l’instar, d’ailleurs, des autres avatars de cette stratification. La question continuera, de nos jours, à servir, pour certains, de moyen d’activation politique.

Ce qu’on vient de voir nourrit, entre autres causes identitaires, structurellement les obstacles à l’unité nationale.

II. L’unité nationale

Au fond, en dehors des revendications identitaires, son défaut n’est que le reflet de problèmes structurels inhérents aux fondements même des composantes ethniques du pays. C’est donc, un héritage, assez lourd, de son évolution historico sociale.

Cette question fait couler, de toutes les façons, beaucoup d’encre et les crises qu’elle avait générées depuis l’avènement de l’Etat revêtent un caractère cyclique : premiers affrontements ethniques de 1966, échauffourées en milieu scolaire en 1979, les événements de 1988 et 1989.

Qui plus est considérée par le pouvoir comme un enjeu national de premier ordre et les efforts qui vont dans le sens de sa réalisation butent et buteront, là aussi, sur des inconditionnels et des irréductibles aux exigences radicales.

III. Les mandataires aux futures échéances électorales

Pour mieux marquer la différence par rapport au passé, le choix des mandataires qu’ils soient dans un cadre régional, législatif ou municipal, doit obéir – outre le niveau académique préconisé par les journées de concertation – à une certaine vision donnant plus d’égalité de chances aux candidats.

Ce qui n’est pas une chose aisée, car chacun à ses propres prétentions. Les législatures antérieures ont bien démontré le besoin de rehausser le niveau du débat politique, mais aussi celui des débatteurs eux même. C’est dire toute l’importance de la refonte à ce stade.

Egalement, pourquoi ne pas instaurer une sorte de régime de primaires à l’issue duquel les candidats du parti seront retenus, notamment aux législatives, et se présenteraient devant les électeurs directement, ou par voie des médias, en vue de présenter leurs programmes politiques et prouver leur capacité de persuasion et de défense de leurs préoccupations.

Ce qui permettrait d’identifier, par des moyens qui restent à définir, le plus plébiscité d’une part, mais aussi un évitement du parachutage de candidats pour des raisons quelconques d’autre part.

Faire place beaucoup plus aux desiderata de la base que de laisser la voie libre aux personnes détachées et ne comptant que sur leur capacité financière et qui ne soucieraient que de leurs propres personnes, ce qui est légitime. La richesse ne doit pas être le seul critère d’éligibilité, même si l’argent est le nerf de la guerre comme on le dit communément.

Le mimétisme démocratique s’inscrit en faux contre cela, à moins que nous voulions instaurer une sorte de bourse électorale où le citoyen, Monsieur tout le monde, n’a pas sa place. Il deviendrait ainsi une sorte de denrée que d’être un bénéficiaire en mesure d’activer ses droits en la matière. Dans l’affirmative, les choses auraient le mérite de clarifier la donne.

On saura ce que réservera l’avenir de cette refonte du parti en vue.

Ce n’étaient là que des idées qui retracent des phénomènes sociaux légués par l’histoire du pays et qui sont l’objet d’un effort national de dépassement, mais aussi d’autres qui dépendront de la pratique qu’on en fait. Encore je ne vous apprends rien. La personne présente, comme le dit l’adage, ou impliquée ne saurait garder le silence.

Dr Sidi Mohamed Ould SIDI



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