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20-08-2018

08:35

Coopérativisme en Mauritanie, une autre vision du développement socioéconomique

L'Authentique - "L’Economie social et solidaire, changer les mentalités pour un coopérativisme productif et inclusif". Tel est le thème d’une rencontre qui a regroupé le 30 juillet 2018 dans la salle de conférence de la Chambre de Commerce, d’Industrie et d’Agriculture de Mauritanie (CCIAM), acteurs sociaux et experts en développement.

Cet atelier organisé par le Bureau International du Travail (BIT) et l’ONG Actions, en collaboration avec l’Agence Espagnole pour la Coopération Internationale au Développement (AECID) avec le soutien de l’Union Européenne, a été l’occasion pour les acteurs du coopérativisme mauritanien, présidents et membres de coopératives locales, mais aussi experts en développement, de réfléchir sur la durabilité des groupements d’acteurs économiques en Mauritanie. D’intenses discussions ont émaillé la journée sur la viabilité du modèle économique en cours, ainsi que le cadre légal et normatif des coopératives.

Des organisations internationales comme Caritas, à travers Yacouba Tandia, des acteurs de la microfinance comme Mme Elena, mais aussi des membres d’organisations associatives comme Mme Soumaré et Mme Dia, ont nourri les débats.

La question du genre dans le coopératisme a eu sa place de choix dans les discussions, notamment celle des familles traditionnelles des "Potières" où tout ce qui touche à la poterie est du domaine réservé aux femmes.

Dans un secteur telle que l’économie sociale et solidaire qui serait, selon l’un des intervenants, une réunion de moyens et d’efforts pour une meilleure diversification économique, la sexualisation des métiers semble créer un véritable problème de socialisation, selon les experts.

Certains types d’organisation, selon eux, est basé souvent sur des fondements formalisés, ce qui entraîne la paralysie de secteurs entiers, tout en servant de pièges aux femmes, avec la complicité de la société et de l’Etat.

Ce serait le cas dans le domaine agricole, où les femmes sont privées de leur indépendance économique par un système patriarcal qui les confine dans des économies de survie.

En effet, les femmes ont souvent la part congrue dans les surfaces cultivées. Il n’est pas surprenant de voir ainsi dans les villages, une coopérative de 500 femmes travailler dans un lopin de terre, avec les problèmes récurrents de ce genre d’organisation où la mauvaise gouvernance pullule, avec le plus souvent une présidente qui s’accapare de toutes les fonctions.

Ajouté à cela, le manque de formation et de niveau d’éducation, l’absence des jeunes, ce qui fait que l’âge moyen des membres tourne autour de 60 ans. A été également soulevé, le problème de durabilité des coopérative de femme, les hommes s’accaparant de l’affaire dès qu’elle devient lucrative.

Les femmes seraient également écartées des circuits de crédit. "Plus de 80% des pauvres sont des femmes", soulève Mme Elena qui dirige une institution de microfinance. Selon elle, la solution pour extirper les femmes de la pauvreté passe par l’accès aux financements, notamment les mutuelles de micro-crédit.

Le problème est que même si elles trouvent des partenaires qui les financent, les regroupements de femmes, coopératives ou GIE, ont du mal souvent à pérenniser leurs activités et à s’approprier les projets conçus à leur profit. Rares sont ces regroupements qui parviennent à se maintenir et à se forger un certain renom.

C’est le cas par exemple d’un Groupement d’Intérêt économique (GIE) de 1.500 membres et qui regroupe 108 coopératives à Haye Sakene, dans la Moughataa de Dar-Naïm à Nouakchott. Créé en 2006 avec l’appui du Groupe de recherches et d’échanges technologiques (GRET), ce GIE présidé par Habsa Abdel Aziz, est actif dans le domaine de la salubrité, notamment la collecte des sachets en plastique, avec plusieurs actions notamment au niveau des marchés et de la plage de Nouakchott.

Reste que les coopératives restent plombées dans leurs actions par un cadre juridique obsolète, la loi 1964-98 du 9 juin 1964 relative aux associations, et un cadre institutionnel qui ne prend pas en compte leur contribution au PIB national ni leur potentiel d’emplois pour les femmes et les jeunes en particulier.

Cheikh Aïdara



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