Cridem

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01-06-2020

19:00

Situation dramatique en Mauritanie / Par Mariame Kane

Kassataya - « On ne tue pas un être sensible comme on briserait un objet. Il existe parmi les hommes des barbares qui aiment verser le sang, des brutes qui assouvissent sur les bêtes un besoin de tuer. On ne peut plus l’autoriser. De tels actes relèvent du crime. » Alice Ferney, 2014

Il s’appelait Abass Diallo et avait 35 ans. Il était père de 8 enfants dont des jumeaux, et d’un 9ème à naître, oncle de 4 enfants sous sa responsabilité (enfants de sa sœur décédée), fils d’une maman de 80 ans encore en vie. Ce jeune homme ne méritait pas la mort.

C’est l’armée de son pays qui l’a tué en tirant sur lui à bout portant annoncé par l’armée comme un tir de sommation, reçu en pleine poitrine ! Quelle adresse ! quel tireur ! quel militaire ! quelle armée ! quel criminel ! Quelle honte !

Dans tous les pays du monde, l’armée est censée protéger la population de son pays sans distinction. Mais celle de notre pays fait exception et a la gâchette facile envers une certaine frange de la population mauritanienne. Une mort de plus dans la vallée, un crime de plus pour la communauté noire mauritanienne. C’est un crime raciste digne des films de cowboys dans lesquels on dégaine et on tire.

Cet acte barbare et criminel de l’armée mauritanienne (une armée républicaine dit-on) n’est pas le premier et ce ne sera probablement pas le dernier. Ce crime s’ajoute à d’autres dans cette région de la Mauritanie où on n’en finit pas de compter les morts par balle. Une armée qui tue ses propres fils, une armée qui tire sur des enfants, une armée qui viole des femmes, une armée qui vole les vivres et biens destinés à la population. Cette armée s’est encore illustrée de la plus belle manière puisque spécialiste dans ce domaine (tirer sur sa propre population, quelle honte !). Une armée d’occupation pire que l’armée israélienne qui elle protège le peuple israélien et ne le tue pas.

Nous constatons aussi que depuis la victoire volée de Ould Ghazouani, la Mauritanie bascule dans la criminalité et l’apartheid. En Mauritanie, le mot d’ordre est connu « Continuer de tuer les noirs, nous on continue de nommer des cousins, des frères dans l’administration ». « Un président muet » dit-on, « un président incompétent, un président complice ». En fait, nous avons face à nous un président conscient mais incapable et faible devant ses pairs. Monsieur le Président, le pays sombre et vous dites que tout est sous contrôle, sous contrôle de quoi ? de qui ? Le contrôle pour tuer ? pour exproprier ? pour nommer des médiocres à des postes stratégiques pour gérer notre pays ? Quelle honte !

Ces nominations montrent à souhait que ceux qui gèrent le pays ne s’embarrassent plus de précautions pour masquer le racisme en Mauritanie. Des noirs compétents, des docteurs, des médecins, des chercheurs, des professeurs, des jeunes noirs diplômés (soninkés, poular, bambaras, wolofs et hartani) très compétents dans leurs domaines sont laissés sciemment à l’écart parce que noirs tout court. Une honte pour un pays qui prône l’unité nationale et la cohésion sociale. C’est un apartheid à ciel ouvert puisque à leur place, on met des médiocres, des incompétents au diplôme falsifiés qui ne pensent qu’à se remplir les poches au lieu de panser le pays…quelle honte ! Vu le racisme ambiant dans le pays, nous ne sommes pas étonnés de voir la persistance de l’esclavage et de l’exclusion. Quelle honte !

Il est plus qu’urgent que nous affrontions la réalité qui est celle de nous réduire à néant dans notre propre pays. Combien de temps pourrons-nous tenir contre cette haine et épuration ethnique ?

Le meurtre de Abass Diallo rappelle l’ère de Taya et de ses sbires dont certains sont encore aux pouvoirs. Réveillons-nous avant qu’ils nous exterminent. L’avenir de notre jeunesse est incertain, qu’attendons-nous pour réagir ? Nous n’avons plus rien à perdre car nous avons tout perdu.

En Mauritanie, la communauté noire doit se ressaisir sinon disparaitre à jamais. Un état qui distribue les rôles en ignorant totalement les équilibres nationaux. Sur ce plan, le pays est allé de fossé en fossé depuis les années 60 de Moktar ould Daddah à Mohamed Ould Ghazouani.

L’Histoire de la Mauritanie depuis l’indépendance montre que les noirs et blancs étaient ensemble et se respectaient même s’il y avait quelques frictions de temps en temps. Avec Ould Ghazouani, on espérait avoir plus de justice et d’équilibre. Hélas, les communiqués du Conseil des ministres montrent que les nominations se suivent et se ressemblent : toujours des miettes pour les noirs. Et ces derniers temps, on ne se gêne même plus : tout pour la communauté maure et rien pour les noirs. C’est à se demander comment Ould Ghazouani peut laisser son image se dégrader de la sorte ? Comment peut-il glisser petit-à-petit vers une ressemblance avec Ould Taya et Ould Abdel Aziz ? nous comprenons mieux pourquoi, l’actuel président a accepté le retour de Ould Taya en Mauritanie après un exil de plus de 15 ans.

Notons au passage que c’est sous le règne de Ould Taya que des militaires ont été massacrés, des milliers de déportés au Sénégal et au Mali, des charniers de villageois noirs du fleuve découverts, des familles disloquées, des terres spoliées. Aujourd’hui, au lieu de demander des comptes à ce dernier au nom de la Nation, Ould Ghazouani lui accorde le retour. On se pose des questions sur l’intention de Ghazouani, n’est-ce pas une provocation de plus à la communauté mauritanienne toute entière ?

Rappelons que des manifestations contre un recensement jugé discriminatoire contre les noirs, se sont soldées par un tué à Maghama et ont conduit à une profonde déchirure au sein des populations mauritaniennes, il est irresponsable de poser des actes qui relèvent de la pure provocation.

La situation est grave, hormis la pandémie qui plane sur tout le territoire affectant des citoyens qui travaillent dans l’informel pour faire vivre leurs familles. J’ai honte pour mon pays, j’ai mal de cette injustice et racisme que nos dirigeants nous font vivre. Si cette occupation du sud continue pour terroriser les populations…, osons dire les choses, unissons nos forces, sans cette union nous périrons sans crier gare….







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