Le Quotidien de Nouakchott - En Mauritanie, ils sont nombreux à rendre hommage à une grande figure du droit et de la solidarité internationale. Me Georges-Henri Beauthier, disparu ce mardi, laissant derrière lui un héritage immense de combat pour la justice, la dignité humaine et la défense des victimes, où qu’elles se trouvent. 

Son nom est à jamais gravé dans l’histoire judiciaire belge à travers des affaires emblématiques comme le procès Dutroux, les attentats de Bruxelles, ou encore le drame du Heysel. Mais son engagement profond pour les droits humains l’a conduit bien au-delà des frontières, jusqu’en Palestine, au Tchad, en Tunisie, et à travers toute l’Afrique.

Parmi les nombreuses causes qu’il a embrassées avec passion, celle des victimes de Gaza occupe une place centrale dans sa dernière décennie d’engagement.

En 2015, aux côtés d’un collectif d’avocats internationaux, Me Georges-Henri Beauthier s’est engagé dans une procédure inédite : déposer, au nom de victimes palestiniennes et d’un hôpital bombardé, une plainte contre de hauts dirigeants israéliens pour crimes de guerre.

Il s’agissait d’établir, par des témoignages rigoureux et des rapports médicaux, les faits survenus lors des bombardements de l’hôpital al-Aqsa à Deir al-Balah. Le dossier portait les voix des survivants, des médecins, des brancardiers, et dénonçait la répétition des frappes contre une structure de santé parfaitement identifiée.

Pour Me Beauthier, ce n’était pas seulement une affaire juridique. C’était un combat de principe. Il nomma les responsables, exigea que justice soit faite, et rappela que « ceux qui ont ordonné de frapper un hôpital, ceux qui ont tué des enfants, doivent rendre des comptes devant la justice internationale ».

Un pilier de la Fondation pour l’Égalité des Chances en Afrique

Au-delà des prétoires, Georges-Henri Beauthier était aussi un bâtisseur d’institutions citoyennes. Il fut l’un des administrateurs de la Fondation pour l’Égalité des Chances en Afrique, une organisation philanthropique belge reconnue d’utilité publique en 2015, et fondée par l’entrepreneur Mohamed Bouamatou, avec le concours d’avocats humanistes.

La Fondation, dont il partageait pleinement la vision, œuvre pour l’État de droit, la démocratie, l’éducation, l’accès à la santé, la transparence de la vie publique et la lutte contre la corruption. Pour Me Beauthier, comme pour la Fondation, la construction d’un État de droit en Afrique était la condition première pour permettre l’émancipation des populations et un développement réellement durable.

Une parole forte, un engagement concret

Son implication ne se limitait pas aux discours. En tant qu’administrateur, il a soutenu de nombreux projets à fort impact humanitaire, comme celui de SOS MEDITERRANEE, qui affrète le navire Aquarius pour secourir les migrants en détresse en Méditerranée. En 2016, il déclarait avec une indignation digne :

« La Fondation pour l’Égalité des Chances en Afrique estime qu’il est de son devoir de venir en aide à ce projet humaniste, si indispensable à une époque où des milliers d’humains perdent la vie en tentant de traverser la Méditerranée. Nous appelons tous les philanthropes, nationaux ou internationaux, privés ou publics, à aider ces projets qui démontrent que la mobilisation citoyenne peut sauver des vies, alors qu’aucune politique efficace n’a encore été mise en œuvre. »

Ces mots résonnent douloureusement aujourd’hui, alors que les conflits, les déplacements forcés et l’oubli international continuent de faire des ravages en Afrique, en Palestine et ailleurs.

Une source d’inspiration pour l’Afrique et la Mauritanie

Pour les défenseurs des droits humains en Mauritanie, Me Georges-Henri Beauthier fut un repère, une voix respectée, un modèle d’avocat engagé. Il a montré qu’un homme de droit peut mettre son savoir au service de causes nobles, en toute indépendance, avec courage et humilité. Dans un pays où les avocats, les journalistes et les militants se battent chaque jour pour la vérité et la justice, son parcours est une source d’inspiration profonde.

La Fondation pour l’Égalité des Chances en Afrique continuera, à travers ses actions, à porter la mémoire de cet homme debout, qui croyait fermement que le droit pouvait changer le monde.