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Mauritanie-France : Une relation fondée sur le respect et l’amitié pour faire face aux enjeux communs
Le Calame -- « Le respect et l’amitié ont toujours présidé aux relations entre la France et la Mauritanie », ces paroles de Son Excellence le Présidence de la République Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani ont beau dater d’Octobre 2023, elles résonnent pourtant aujourd’hui avec encore davantage d’acuité.
Alors que s’ouvre la période de repos estival et que la France célèbre sa fête nationale en ce 14 juillet, il me paraît approprié de revenir sur la riche année qui vient de s’écouler et qui a une nouvelle fois marqué un approfondissement des relations entre la France et la Mauritanie.
En effet, dans un contexte régional toujours plus dégradé, la relation entre nos deux pays continue de servir de modèle de stabilité. Les nombreux évènements internationaux qui nous ont réuni cette année en offrent un témoignage éloquent : les Jeux Olympiques de Paris, où tout un symbole, la délégation mauritanienne a été dignement mise en valeur par Kamil Ould Doua, porte drapeau né en France ;
le sommet de la francophonie à Villers-Cotterêts où nous avons pu réaffirmer le lien intime qui nous unit à travers la langue française et auquel je sais l’attachement du président Ghazouani et des Mauritaniens ; enfin la Troisième Conférence des Nations Unies sur l’Océan à Nice (UNOC), à laquelle la Mauritanie a pris toute sa part avec la ratification du traité BBNJ portant sur la protection de la biodiversité en haute mer et qui nous rappelle combien la lutte pour préservation des océans est un défi qui réunit nos deux pays, « voisins » par la façade atlantique.
Au-delà de ces évènements, l’amitié entre nos deux pays s’inscrit aussi dans une vision partagée de la refondation des relations entre l’Afrique et l’Europe. Je tiens à cet égard à saluer l’engagement du président Ghazouani dans le cadre de sa présidence de l’Union africaine en faveur d’un multilatéralisme plus inclusif et respectueux des besoins des pays africains. Nous soutenons ces priorités et nous souhaitons continuer d’y répondre ensemble.
Ces fondations solides nous guident dans notre volonté de consolider et d’approfondir cette relation si précieuse, et ce dans tous les domaines.
- Dans le domaine économique tout d’abord
L’attrait des entreprises françaises pour le marché mauritanien continue de croître, poussé notamment par la trajectoire très favorable du pays sur le plan macroéconomique. Les opportunités certaines qu’offre la Mauritanie sont de plus en plus visibles en France, et nous sommes ravis d’accompagner ce développement.
A l’heure où les secousses de l’économie mondiale nous affectent tous, nous avons la responsabilité de bâtir ensemble une relation économique prévisible, mutuellement bénéfique à nos deux pays. Je me réjouis que nous ayons pu dans ce contexte mobiliser de nouveaux outils de financement, tels que des prêts aux conditions avantageuses, financés par le Trésor français.
En témoigne la signature, en avril dernier, d’un prêt concessionnel de de 2 milliards de nouvelles Ouguiyas (MRU) pour l’extension du système Aftout Essahli, qui approvisionne Nouakchott en eau potable depuis le fleuve Sénégal. Piloté par des entreprises françaises, ce projet d’envergure générera de nouveaux emplois et favorisera le transfert de savoir-faire dans ce secteur clé qu’est l’hydraulique.
Au total, plus d’une trentaine d’entreprises françaises sont implantées en Mauritanie. Elles sont à l’origine de la création de plus de 2000 emplois directs et de la formation de centaines de jeunes mauritaniens, avec des échanges dont le montant total atteint les 14 milliards de MRU.
- A l’heure du désengagement de certains partenaires traditionnels, cette priorité économique est complétée par un réengagement significatif en matière de soutien au développement.
2024 a ainsi été une année record pour les interventions de l’Agence Française de Développement (AFD) en Mauritanie avec près de 5 milliards de MRU d’octrois de nouveaux financements portant à plus de 20 milliards de MRU le volume des financements en cours de mise en œuvre, y compris ceux de 2025.
Cet engagement se déploie sur tout le territoire mauritanien en appui aux efforts du gouvernement, avec une attention portée aux impacts concrets pour les populations, je pense notamment à :
- la ligne électrique à haute tension entre Nouakchott et Néma qui devrait accélérer l’accès à l’électricité pour les habitants en particulier de l’Assaba et des deux Hodhs ;
- l’appui aux filières du lait et du maraichage pour soutenir le développement laitier dans les deux Hodhs, et le maraichage dans le Gorgol, le Guidimakha et l’Assaba ;
- le projet d’appui à l’élevage dans le Hodh Ech Chargui où je me suis rendu en décembre dernier pour marquer l’appui de la France aux efforts des autorités mauritaniennes en réponse à l’afflux massif de réfugiés et déplacés dans cette région.
Dans le domaine de la santé, j’ai eu l’honneur de participer aux côtés du Président Ghazouani le 8 mai dernier à la cérémonie de pose de la première pierre du nouveau Centre national de transfusion sanguine de Nouakchott, financé par l’AFD et qui témoigne de notre engagement commun à réduire la mortalité maternelle et infantile en Mauritanie.
2024 puis 2025 sont aussi marqués par la relance des activités de Proparco, filiale de l’AFD en charge du secteur privé, qui a accordé et signé trois lignes de garanties en faveur des banques BEA, GBM et BMI pour favoriser les importations dont le pays a besoin.
Enfin, Expertise France a poursuivi la mise en œuvre de son portefeuille de 14 projets, dont le programme d’appui à la gouvernance financière et administrative (PAGFAM) pour la réforme des finances publiques et de l’administration nationale.
- Autre axe fort de notre relation, la coopération culturelle et éducative continue de s’articuler étroitement avec la priorité du Président Ghazouani sur l’autonomisation de la jeunesse
Cette priorité se déploie dans le champ culturel. A cet égard, l’Institut français de Mauritanie a continué d’ouvrir sa scène à l’expression artistique de la jeunesse mauritanienne, mais aura aussi irrigué le territoire mauritanien en organisant une caravane inédite qui s’est rendue en décembre dernier à Atar, Kiffa et Nouadhibou pour proposer spectacles, expositions et cinéma.
Des événements marquants comme la première projection en Mauritanie du film « Black Tea » d’Abderahmane Sissako, ou l’organisation d’un concert de musique classique auront émaillé une programmation riche et diversifiée qui célèbre toutes les cultures de ce pays, sans oublier sa culture traditionnelle à l’image de la musique Azawan.
La coopération académique et éducative constitue un autre pilier majeur de l’appui à la jeunesse :
o Que ce soit dans l’enseignement supérieur, avec la création d’un Centre pédagogique universitaire, en collaboration étroite avec le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, qui a vocation à accompagner la modernisation des pratiques pédagogiques dans l’enseignement supérieur mauritanien ;
o Via la mobilité étudiante, avec l’augmentation constante depuis 4 ans du nombre d’étudiants mauritaniens en France : 250 départs cette année, dont une quarantaine sont bénéficiaires de bourses du gouvernement français. Au total, ce sont plus de 1100 jeunes mauritaniens qui étudient en France.
o Je me réjouis aussi de la création de l’association France Alumni Mauritanie, née de l’initiative d’anciens diplômés de l’enseignement supérieur français, qui célèbre cette année son deuxième anniversaire. Elle incarne la vitalité de nos échanges et témoigne de la solidité des liens d’amitié, de savoir et de valeurs partagées entre nos deux pays.
Et quelle fierté mais aussi quel plaisir d’avoir le 29 mai dernier vu un de ces alumni, M. Sidi Ould Tah, double diplômé de l’Université Paris VII (DEA en économie) et de l’Université de Nice Sophia Antipolis (doctorat en science économique) brillamment élu à la présidence de la Banque africaine de développement, la BAD. Bravo à lui et à la Mauritanie !
o Enfin, collaboration entre nos deux pays dans le domaine éducatif avec l’homologation pour l’enseignement français de trois écoles privées mauritaniennes qui intègrent désormais le réseau international de l’Agence de l’Enseignement Français à l’Etranger au côté du lycée français Théodore Monod. Je me réjouis de cette nouvelle page et forme le vœu qu’elle ouvre la voie à un renforcement de l’enseignement en français en Mauritanie.
- Ce tour d’horizon ne serait pas complet sans la coopération en matière de sécurité et de défense, fondée sur le respect mutuel de la souveraineté et des intérêts respectif de nos deux pays :
La tenue à Nouakchott le 25 juin dernier de la 4ème commission militaire mixte entre nos deux pays a illustré la solidité de notre coopération avec les forces armées mauritaniennes. Cette échéance, qui intervient tous les deux ans, nous a permis de fixer un programme de travail ambitieux avec le développement de projets communs dans le domaine de la formation des officiers, de la marine, du génie militaire ou de la logistique.
Ce haut degré de coopération entre nos forces armées se déploie tout particulièrement dans le domaine de la marine, comme l’a illustré l’escale du Patrouilleur de haute mer Commandant Bouant au port de Nouakchott en mai dernier. Par ailleurs, nous appuyons la création d’une nouvelle école au sein de l’Académie navale afin d’accompagner la Mauritanie pour faire face aux enjeux sécuritaires maritimes.
Ces efforts conjoints s’inscrivent enfin en pleine complémentarité avec les initiatives multilatérales, en particulier dans le cadre de l’Union européenne et de l’OTAN.
En matière de sécurité intérieure, la coopération s’est encore intensifiée dans les secteurs de la lutte contre l’immigration irrégulière et les trafics de personnes et des biens. Cette année encore une soixantaine de formations de haut niveau, sur des domaines ciblés de lutte contre les faux documents, gestion des foules, gestion de crise dans les établissements pénitentiaires a été ou sera dispensé. Pour la deuxième année consécutive, un officier et un commissaire mauritanien ont ainsi été retenus pour suivre un cursus dans les écoles supérieures de police en France.
Par ailleurs, en lien étroit avec les acteurs institutionnels mauritaniens des domaines de la sécurité et de la justice et notamment le tribunal spécial récemment institué, la France financera à partir de septembre 2025 un projet ambitieux de renforcement de la chaine pénale liée au trafic de migrants et à la traite des personnes.
Enfin cette coopération est complétée par un travail étroit en matière de sécurité civile avec l’objectif de travailler avec les autorités mauritaniennes au renforcement du maillage territorial afin d’améliorer le secours aux populations face aux conséquences du changement climatique comme les feux de brousse et les inondations.
Ce panorama de notre coopération traduit la richesse et la densité de nos liens. Il nous dit aussi l’immensité des défis conjoints qui nous font face, aussi bien en matière de développement économique, de promotion de la paix, de préservation de notre environnement que de lutte contre le terrorisme. Le chemin est escarpé mais la voie est droite et je suis convaincu qu’ensemble, Mauritanie et France seront à la hauteur des enjeux.
Par Alexandre Garcia,
Ambassadeur de France en Mauritanie