23-11-2008 14:19 - Ibrahima Moctar Sarr ou l’originalité d’une position
Cette tribune est une contribution au débat sur la position de notre parti au lendemain du coup d’Etat. C’est d’autant plus intéressant de continuer à l’expliquer car notre position est très originale en ce quelle est différente de celle du HCE et du FNDD.
La nécessité de continuer la campagne d’explication s’impose pour montrer l’existence d’une autre position qui transcende le système. Elle est motivée par le désir d’abattre le racisme d’Etat dans notre pays au lieu de résumer aujourd’hui le problème mauritanien à l’aspect institutionnel. Nombreux sont ceux qui n’ont pas compris la justesse de notre analyse. L’actualité politique de notre pays ne doit pas se résumer à l’affrontement entre pro et anti coup d’Etat.
La position de l’AJD/MR ne saurait être compris si l’on ne prend pas le soin de convoquer l’histoire récente de ses prises de position avant ce coup d’Etat.
Après le renversement du régime de Ould Taya et l’arrivée au pouvoir d’Ely Ould Mohamed Vall, l’AJD, à travers son chef de file de l’époque Monsieur Mody Cissé, avait exprimé son inquiétude quand à la sincérité du CMJD de s’attaquer aux vrais problèmes dont souffre le pays. C’est le même constat qu’avait fait le leader actuel de l’AJD/MR à travers un texte magistral : « La transition en dérive : se ressaisir ».
Ce texte venait au secours du CMJD avant qu’il ne mène le pays vers des lendemains incertains. Malheureusement, ce cri d’alarme n’a pas été entendu car les préoccupations des uns et des autres n’étaient pas les mêmes.
Pour Ibrahima Sarr, la résolution de la question nationale, de l’abolition définitive de l’esclavage, de la lutte contre la corruption, de la question du passif humanitaire et le du retour des déportés mauritaniens du Sénégal et du Mali était primordiale.
Il se trouve que les militaires avaient un calendrier et un dessein bien particulier qui tournait essentiellement autour de la recherche d’un homme perméable qui rassure les prédateurs et les assassins sachant que bon nombre d’entre d’eux sont comptable du génocide négro-africain. Ils finiront par en trouver un, au nom de Sidi Ould Cheikh Abdallah, un homme sans envergure nationale ni politique encore moins sociale. Tous les mauritaniens savent que si ce n’était la volonté des militaires Sidi ne pouvait même pas prétendre à un poste de député ou de maire. Aveu qu’il a fait lui-même dans un entretien accordé à Al-Jazeera.
Si l’opposition a reconnu sa victoire, c’est tout simplement pour ne pas participer à la déstabilisation du pays, mais cela ne signifie point que Sidi était légitime car le CMJD n’a jamais été neutre durant toute l’élection présidentielle et n’a ménagé aucun n’effort pour qu’il soit élu. En voulant s’affranchir de la tutelle de ceux qui l’avaient amené à la magistrature suprême, Sidi s’est tué politiquement.
Rappelons que sa présidence, hormis quelques réformes certes intéressantes, n’a été qu’une suite généralisée de déceptions : absence d’une bonne politique de lutte contre la corruption ; privilèges accordés à ceux qui en ont l’habitude dans les postes de responsabilités, refus d’instaurer un débat sur la question de l’identité de la Mauritanie, nomination aux hautes fonctions de l’Etat de personnalités qui ont mis ce pays à genoux, mise à l’écart des Noirs dans les nominations confirmant ainsi le système inique des quotas pour les négro-africains, réhabilitation progressive des anciens compagnons de TAYA à commencer par les plus orthodoxe d’entre eux :
BOIDIEL OULD HOUMEID qui a revendiqué clairement et de façon provocatrice ne rien renier du bilan positif du dictateur en exil au Qatar et qui sera bombardé Ministre Secrétaire Général de la présidence de la République : quel pied de nez et quelle offense à toutes les victimes de cette dictature sanguinaire !
Reniement de sa parole de rester au dessus de la mêlée et de ne pas appartenir à un parti, Entêtement à créer un parti présidentiel (ADIL) malgré la protestation et la mise en garde de certains de ses alliés, notamment Messaoud OULD BOULKHEIR, banalisation du conflit qui l’opposait à ses frondeurs parlementaires, manque de vision claire pour régler cette fronde, tergiversations, hésitations, indécisions finiront par mettre à nu son absence d’autorité malgré le suffrage universel et la banalisation de l’autorité de l’Etat.
En effet, dès le début de la crise, les responsables de l’AJD/MR ont compris qu’il s’agissait d’un problème de contrôle du pouvoir au sein de la majorité ce qui a poussé notre parti à se mettre à l’écart d’un combat qui ne le concerne pas.
Sachant que la postion de l’AJD/MR est attendue par l’opinion nationale et internationale, le bureau politique s’est réuni et a publié une déclaration dans laquelle son porte-parole s’interrogeait sur la situation réelle et suggérait au président de la république de démissionner s’il était dans l’incapacité de conduire le destin de la nation. La position de l’AJD/MR n’a alors jamais varié, notre parti reste fidèle à sa ligne politique et son projet de société.
Le président SARR a déclaré que son parti ne soutient aucun camp.. Il continue de garder sa ligne de neutralité par rapport aux protagonistes du moment. Il a été bien sollicité par le général Ould Abdel Aziz mais sa réponse fût sans équivoque.
L’AJD/MR prend acte non pas du coup d’Etat mais de la volonté de rectification manifesté par le Haut Conseil d’ Etat et affirme clairement qu’il n’est ni avec un camp ni contre un camp mais qu’elle est avec la Mauritanie. Le président de l’AJD/MR n’est pas un arriviste aux dents longues ; C’est sur la base de son expérience qu’il a pris la décision audacieuse de ne pas participer à un gouvernement, après délibération de son bureau politique, dont le concepteur n’offre pas de garanties suffisantes.
Le président du HCE nous a bien promis de s’attaquer à l’épineuse problématique du passif humanitaire mais nulle part, dans la déclaration de politique générale de son premier ministre, ni durant ses multiples sorties et adresses à la nation cette question n'a été évoquée. Dans sa recherche de soutien, le Haut Conseil d’Etat est prêt à promettre tout mais à ne rien réaliser.
Aux militants de l’AJD/MR et à ses sympathisants, je dis ceci : n’appréhendez pas les discours calomnieux qui chercheraient à ternir l’image de votre parti et à dissoudre votre leader dans l’anonymat. C’est souvent des discours portés par nos adversaires politiques ou par quelques féodaux qui, depuis l’élection présidentielle et l’irruption du phénomène SARR, explorent tous les moyens pour enrayer l’élan de sympathie dont bénéficie notre président. SARR apporte de la fraîcheur, de l’éloquence, du charisme qui ont disparu de la scène politique mauritanienne depuis la nuit des temps.
Si le président SARR et son parti ont gagné en crédibilité c’est grâce aux énormes sacrifices consentis pour la cause. Les mauritaniens ne sont pas dupes, ils savent très bien qui se situe du côté de la sincérité dans l’entreprise de démantèlement du système du racisme d’Etat qu’une grande partie de la population mauritanienne ne cesse de subir.
Si les dirigeants de l’AJD/MR étaient mus par une volonté utilitariste, ils auraient pu obtenir tous les honneurs matériels du monde en diverses occasions (et tout récemment lorsque Ould Waghef a demandé au président Ibrahima SARR de rejoindre son gouvernement) mais ils ont opté pour la pauvreté dans la dignité que de la richesse dans l’injustice.
L’AJD/MR n’est pas une Agence de Recherche d’Emploi ou un laboratoire de reproduction de quelque forme d du féodalisme contraire aux orientations du parti et à l’évolution naturelle du monde mais un parti politique qui a des objectifs clairs, des intérêts politiques à défendre et qui ne s’engage pas sans garanties suffisantes et sérieuses. Des promesses théoriques de s’attaquer à telle question du passif humanitaire doit, à mon sens, connaître un début de concrétisation avant de se jeter dans les bras de qui que ce soit.
Observer notre position avec des lunettes théoriques de l’utilitarisme n’est rien d’autre qu’un moyen pour nos adversaires de saisir n’importe quelle occasion afin d’arrêter le rouleau compresseur de l’AJD/MR et de nous mener dans un purgatoire politique. Cela n’entamera pas notre détermination car nous croyons que c’est possible.
Si notre président était mû par un idéal matérialiste, il serait resté à l’APP de Messaoud OULD BOULKHEIR, ce qui lui aurait garanti au moins son poste de député et lui aurait procuré très certainement des avantages matériels importants. Mais la défense de l’idéal de justice vaut plus que tout autre combat pour lui. En ce qui concerne la petite secousse que traverse le parti en ce moment, je suis persuadé qu’il s’agit juste de l’expression d’une crise de croissance et que le parti ne s’en sortira que grandi.
Chacun de nous doit se surpasser pour que nous sauvegardions l’unité du parti. Des erreurs, il en existe partout dans des organisations politiques, mais la discipline, la tolérance mutuelle, l’éthique politique et la responsabilité doivent demeurer les moteurs de notre action.
A ce titre, je félicite tous les membres du Bureau politique pour le travail accompli, au premier chef, son président, et qui a permis de faire aujourd’hui de l’AJD/MR un parti de masse, la voix des sans voix enfin le parti des « exclus de la prospérité mauritanienne ».
Moulaye DIOUM dit Bengelloun Idriss
Secrétaire général de la section de L’AJD/MR-France.