07-08-2009 09:02 - Il n’y a pas de hasard dans le choix de son sort : l’obstination à refuser sa relaxe
Un sort, surtout un triste destin, c’est toute une histoire. C’est une vie brisée, une vocation professionnelle enterrée, une responsabilité socioéconomique abandonnée…. On ne choisit pas sa destinée par hasard. On se l’impose pour faire attention et prendre soin de ce qui est censé être notre personnalité aux yeux des autres. Malheureusement souvent, sans pour autant se soucier de l’intouchable dignité des autres.
Quand on est appelé à croupir 5 ans sous les taules et à payer une amende de 55 millions d’Um, alors qu’on pourrait s’éviter et faire échapper les siens ce sombre calvaire carcéral, en demandant des simples excuses à la victime des préjudices, il ne faut guère hésiter dans le choix de la bonne voie de la sagesse et de la liberté.
De cette tribune qu’est Cridem, nous avons appelé hier- et nous continuons de le faire- à l’apaisement entre le président de l’Ajd/Mr Ibrahima Moctar Sarr et le webjournaliste du site Taqadoumy Hanevy Ould Dehah, en sollicitant le concours de tierces personnes, notamment des personnalités influentes des milieux politiques et médiatiques pour dessaisir ce dossier des mains de la justice.
Aujourd’hui, on réitère cet appel sincère, car les conclusions du procès de ce jeudi n’augurent point des horizons meilleurs, ni pour l’un, ni pour l’autre des deux hommes impliqués dans cette affaire politico-judiciaire.
Je parle en connaissance de cause, car, conscient de l’imperfection de l’homme et de l’erreur humaine, dans mon pays, où le vécu quotidien reste fonction d’un contexte sans loi, il vaut mieux ne pas « être plus royaliste que le roi ».
Pour l’anecdote, je vous raconte ci-après, une affaire qui peut servir de comparaison, où un confrère, parti pour des raisons professionnelles, s’est retrouvé dans une cellule d’un mètre carrée, puante d’urines avec un homme aux bras et mains enchaînés.
Un prisonnier qui manquait d’interlocuteur pour raconter ces délires. Il a a fallu à notre collègue d’ agir «adroitement » pour se faire libérer. Un cas qui peut servir d’enseignement à qui veut l’entendre et qui ne lui fait aucun gène à être divulgué.
C’était en 2004 ou 2005. Il ne se rappelle plus, car, il était été très ému par ce qui lui est arrivé. Son directeur l’avait envoyé pour une enquête dans les gazras d’Arafat, avec des femmes qui se plaignaient de la démolition de leurs constructions fraîchement achevées.
Il arrive au Commissariat où l’une des femmes lui présenta ses autres consoeurs à l’intérieur du local détenu par les services de l’ordre. En bon professionnel, il sort l’appareil photo et prend quelques clichés.
Un flic se dirigea vers lui, lui confisqua l’objet et l’intima de s’asseoir dans un coin, lui répétant qu’il verra comment on fait bien le métier. Les gestes faits par le journaliste pour décliner son identité sont restés vains. Comme d’ailleurs, ces élus et hommes de presse battus à coups rompus par les flics hier à l’entrée du Stade de la capitale, à l’occasion de l’investiture du Président de la République.
Sous le coup de la surprise, le collègue prie son téléphone portable pour informer ses supérieurs. Le flic vient sur lui, arrache le mobile et l’éteint complètement.
5 minutes après, il est conduit dans une autre salle où il est prié de se déshabiller. Heureusement, il n’avait pas de culotte, sinon les policiers allaient lui ôter son séroual.
Débarrassé du boubou, de la chemise, des objets trouvés dans sa poche (dont de l’argent), qu’il a pris le soin de répertorier dans un papier, le journaliste est poussé dans une cellule d’un mètre carré, puante, avec un détenu qui semble avoir séjourné plusieurs mois dans la geôle.
Entre temps et sans en être informé, l’une des femmes avait alerté la direction du journal de l’incident. Le Directeur n’est pas allé sur les lieux pour les formalités de mise en liberté, mais, usa plutôt de ses bras longs avec les supérieurs de la sûreté pour que le journaliste soit relâché.
Dans sa cellule, le journaliste, qui avait une peur bleue de son co-détenu, se demandait comment il peut sortir, comment informer ses parents, qui sont à l’intérieur du pays, et qui une fois tenus au courant, vont se déplacer par dizaine vers la capitale.
Après 30 mn d’enfer, le journaliste est invité au bureau du Commissaire. Les propos tenus par les flics n’étaient guère rassurants et montraient qu’il pourrait toujours s’attendre au pire.
Alors, le collègue, coupé de tout contact extérieur, qui est conscient de la réalité profonde au pays, de l’ignorance et de l’inapplicabilité des lois, s’est excusé et s’est dit prêt à reconnaître par écrit son présumé délit.
Ce qui a conduit les policiers à être plus souples et plus disposés à chercher la relaxe du journaliste. Après remise d’un papier de culpabilité, la suppression des photos prises, le collègue se fit remettre ses objets et son appareil, avant de se voir signifier qu’il est acquitté, intimé de surcroît de ne pas récidiver.
Arrivé à la sortie, la femme le reconnu et l’interpella pour la poursuite de l’enquête sur les gazras. C’est à peine qu’il se tourna vers elle. Au journal, son article d’une page tabloïd n’a pas été sur l’expropriation du terrain public, mais sur sa miraculeuse journée carcérale.
Un récit extraordinaire, dira le Rédacteur en chef, qui pourrait bénéficier d’un prix, s’il est soumis à des concours de littérature comme « Lire en fête ».
L’enseignement qu’on peut tirer donc de cette histoire, c’est qu’en Mauritanie, il vaut mieux savoir ménager sa monture « il yarev sa nit jemlou ma itayhou » littéralement « qui connaît le tempérament de son chameau, celui-ci ne peut pas le faire tomber », pour ne pas faire perdre des moments précieux à Madame, à maman, aux cousins et aux amis. Il n y a pas honte à s’excuser, mais plutôt, il y a une ternissure à vouloir s’imposer comme « un ange », comme parfait.
A l’Ajd/Mr, à son président Ibrahima Moctar Sarr, je leur dis que je comprends parfaitement l’ampleur des préjudices subis, mais, je les invite, à penser à l’environnement socioéconomique de Ould Dehah, lequel souffre considérablement la détention du fils et ses rebondissements, particulièrement sa mère, son épouse et ses enfants.
Comme dit le proverbe hassaniya « illi ma vi atham mesla, ma ghadilou », littéralement « quand on n'a pas tort, on a rien à se reprocher», le parti et les inconditionnels de Sarr doivent réaliser que, jusqu’à preuve du contraire, les accusations portées contre leur président sont sans fondement et qu’il faut donc pardonner.
Ceux qui pardonnent sont d’ailleurs bien récompensés par le Tout Puissant, alors que ceux qui refusent de le faire, doivent répondre des souffrances subis indirectement par l’entourage de leur victime. Ce sont toujours les grands qui savent pardonner
Mohamed Ould Mohamed Lemine pour Cridem
mdhademine@yahoo.fr