04-06-2011 01:40 - L’heure des comptes

L’heure des comptes

«Le Ministre de la Défense Nationale a présenté une communication relative au règlement du dossier du Passif humanitaire des personnels des Forces Armées Nationales. Cette communication fait suite aux instructions du Président de la République, son Excellence Monsieur Mohamed Ould Abdel Aziz, visant à engager le pays dans la voie d'une véritable réconciliation nationale.

Dans ce cadre des mesures concrètes ont été prises en vue du règlement apaisé de tous les différends qui ont, sous les régimes précédents, ébranlé la cohésion nationale du pays et entravé sa marche vers le progrès
». dixit le Conseil de jeudi.

Peu importe les montants qui seront versés. En réalité aucune fortune sur terre ne peut compenser les douleurs provoqués ou effacé le mal subi. Seulement la satisfaction pour nous d’avoir enfin compris que le devenir dépendait largement de notre capacité à reconnaitre les fautes commises, les crimes commis par ceux qui ont cru à un moment donné que la Mauritanie resterait ce qu’ils ont voulu qu’elle soit. Ceux qui ont cru que leurs pouvoirs étaient éternels. Et que le jour du jugement humain ne viendrait pas.

Aujourd’hui, les autorités semblent vouloir solder ce passé douloureux. Le pouvoir actuel ne doit pas craindre de remuer ce passé dont il n’est pas comptable. Mais il doit compter avec tous ceux qui étaient aux affaires à l’époque et qui ont toujours les moyens de nuire à toute entreprise de réconciliation nationale. On les retrouve dans l’appareil, au sein des formations politiques les plus «à gauche» (de quoi, en fait ?), dans les organisations des Droits de l’Homme… Il doit compter avec l’aversion «humaine» pour tout retour sur des événements douloureux.

Ceux qui les ont commis ne veulent pas qu’on en parle. Ceux qui se sont tu au moment où ceux-ci les commettaient ne veulent pas non plus qu’on en parle. La majorité silencieuse craint d’en parler pour ne pas être en face de sa lâcheté. Comment alors attendre un soutien ou même une compréhension populaire à ces décisions pourtant courageuses et nécessaires ?

Le pouvoir de Ould Abdel Aziz est bien en train de solder un compte qui n’est pas le sien, d’apurer un passif qui continue de peser sur notre vie, sur les consciences de certains d’entre nous (ceux qui en ont). Mais cela devrait s’accompagner d’une campagne de sensibilisation. Ne serait-ce que pour limiter la nuisance des ennemis de la démarche.

Les faits sont têtus, dit-on. En juillet 1991, avec quelques amis dont Habib Ould Mahfoudh et M'Barek Ould Beyrouk, nous publiions, dans Mauritanie-Demain, un dossier intitulé «Arabes-Négro-africains : La fin d’un mariage de raison». Ce fut la première – et je crois l’unique – enquête journalistique sur ce qui s’est passé dans les casernes en 90 et 91.

L’instrumentalisation politique du dossier devait empêcher son étalage et son analyse sereine sur la place publique. Nous courons depuis, derrière les rendez-vous manqués. Il ne faut pas que nous rations à présent celui-là.



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Commentaires (6)

  • Ksaleh (H) 04/06/2011 18:40 X

    sammbasy, je crois que tu ne connais pas bien mr Oumeir qui était l’altéré-go de Habib, relis ses écrits dans Mauritanie demain tu auras une idée.

    Amitiés sincères.


  • leguignolm (H) 04/06/2011 11:13 X

    Voila des mots d’apaisement qu’il fallait depuis et non jeter de huile dans le feu en voulant traiter une atroce et douloureuse histoire qu’à connu le pays d’un passé déjà passé synonyme de tourner une page non lue.

    Je crois ould oumère, on commence à revenir sur nos chabots !

  • mdwessat (H) 04/06/2011 09:25 X

    Les deux visites de Kaédi et les actions importantes et courageuses qu’elles ont engendrées, ainsi que les mesures qui viennent d’être prises démontrent la volonté ferme du Président de résoudre concrètement ce dossier du passif humanitaire difficile, qui relève du passé et dans lequel il n'a jamais été indexé.

    Mr Aziz fait donc preuve de patriotisme et prouve ainsi, qu'il tient à bâtir ce Pays sur la paix des cœurs. Nous tous, en particulier nos frères négro africains malheureusement victimes dans cette affaire, devrons l’aider, à construire Une Mauritanie unie, sereine et démocratique.

    Notre Peuple n’en sera que gagnant et évitera de nouvelles souffrances.

  • Keletegui (H) 04/06/2011 07:52 X

    Belle analyse d'une belle plume d'un journaliste courageux.
    L'éditorialiste de Calame (AOC) doit prendre exemple sur vous et éviter dans l'avenir de nous inondé avec des articles frileux du genre " on ne doit pas réveiller les démons du passé pour ne pas attiser les rancœurs" avec cette façon de voir les choses , tous savent maintenant dans quel camp il se trouve (malheureusement depuis longtemps).

  • orphreynegro (H) 04/06/2011 07:21 X

    Aziz n'est pas moins et raciste que ses predecesseurs, rien qu'à voir la composition du gouvernement et les mesures individuelles prises en conseil des ministres pour savoir qu'il ne cherche pas la réconciliation. nationale;

    les inégalités perpetrées par Aziz sont criantes. s'il y'a une difference entre Aziz et taya; c'est une question d'epoque et de moeurs.

  • sammbasy (H) 04/06/2011 06:12 X

    Je ne pense pas que ce genre de problèmes puisse se règler avec des décisions du genre "sur instruction du président de la république". C'est des affaires qui demandent la participation de tous.

    Je ne pense pas aussi, comme l'a dit Oumèr que l'argent puisse compenser les douleurs des différents évènements.

    Je pense aussi qu'il faut dissocier les dossiers et les traiter cas par cas : le dossier des évènements de 81, 87, 88, 2003, 2004 me semblent relever du même cas, ils demandent à être "rejugés". Il s'agirait de tentatives de coup d'Etat de natures différentes... Faut-il récompenser les coups d'Etat ? C'est une très grande question.

    Le dossier de 89-91 doit totalement être dissocié des autres, car il est totalement différent. Ne pas le relever, mon cher Oumer, relève de l'hypocrisie : il s'agit d'un vrai génocide : plus de 500 militaires (503) froidement assassinés dans des casernes par leurs frères d'armes au seul motif de leur appartenance ethnique, en plus de centaines, sinon des milliers de civils froidement abattus par des brigades de la mort le long du fleuve (les fosses communes de Sori Male, Walalde et autres en témoignent). Ce dossier demande des enquêtes pour qu'on sache ce qui s'est passé, qu'on rende justice, et qu'on tourne ensemble la page.

    Il est dangereux de vouloir banaliser ce problème en le diluant dans d'autres dossiers de nature totalement différente.

    Enfin, Oumer, toi aussi tu as été, en 89, emporté par le vent du chauvinisme : en ce moment, parmi les journalistes, seul le Grand HABIB OULD MAHFOUD a su garder la bonne ligne.