Jeudi dernier, aux abords du marché central de Nouakchott, les passants étaient surpris par le comportement d’un piéton qui marchait la main à l’oreille comme s’il en souffrait.

Brusquement il s’arrête, gesticule, tourne sur lui-même et éclate de rire. Puis il reprit sa marche ; subitement il tend un doigt devant, commence à replier et tend le bras comme s’il mesurait à la coudée un fil invisible.

Tout d’un coup, il s’arrête et commence à parler à haute voix en fixant le ciel, le poing fermé. Visiblement, il n’avait aucune conscience de son environnement. Il marche en heurtant les passants qui s’écartent un peu apeurés ; il continue son chemin puis, n’y tenant plus, se laisse aller à un fou rire qui l’oblige à s’asseoir. Après il se relève et, continue son chemin, la main toujours collée à l’oreille.

Une fois la conversation finie, il ôte la main de l’oreille et, regardant autour de lui un groupe de passants qui le fixait, notre agité, d’une voix lente mais persiflant leur demanda « qu’est-ce que vous regardez ?!) Visiblement, l’homme a agi comme s’il se trouvait seul dans la rue.

Méfaits du Portable…

Le téléphone portable, s’il rend d’énormes services aux citoyens, leur imprime des comportements pour le moins surprenants. Certes aujourd’hui, cet outil est aujourd’hui indispensable dans la vie en société. Seulement, il est partout et à tout moment : dans les maisons, dans la rue, dans les commerces, dans les lieux de travail, dans des lieux de culte… et le comble, c’est que les usagers du Portable ne savent pas parler avec discrétion.

Au contraire, nombre d’entre eux s’époumonent très souvent en conversant, étalant sur la place publique, leurs intimités. Comme les Mauritaniens d’habitude curieux aiment bien s’occuper de ce qui ne les regarde pas, ceux d’entre eux que le hasard transforme en témoins d’une communication ne se privent pas d’écouter celle-ci. Quelques fois, on les voit même s’approcher pour davantage saisir le contenu des conversations.

A Nouakchott, le Portable sert aussi à la Frime ! Il arrive souvent qu’une personne qui cherche à se « faire voir » ou se « à faire entendre » en use : « allo Monsieur le directeur, Allo Monsieur le ministre… » L’homme qui parle est devant une assemblée qu’il veut prendre pour témoin de son influence.

A l’heure où la pression sociale se fait forte, le Portable est un bel outil de « défense ». Ceux qui ne veulent pas être interpellés par leur vis-à-vis le savent qui attendent d’approcher ce dernier pour coller le téléphone à l’oreille et faire comme s’ils sont en conversation avec un correspondant –fictif-. Le temps d’échapper à son vis-à-vis et le Portable est rangé !

Amar Fall