08-07-2014 15:30 - L’éditorial de La Nouvelle Expression : Présidentielle, Abdel Aziz … Poutine
La Nouvelle Expression - Le 21 juin 2014, c’était le scrutin présidentiel en Mauritanie. Il y a eu deux vainqueurs : le camp du boycott et celui de la participation à cette élection au score énigmatique. Ce dernier (le camp de la participation) se divise en deux sous-camps ; le sous-camp d’un satisfecit sans saveur et celui d’une contestation amorphe : l’autre routine de la Mauritanie électorale.
Et le perdant !? C’est bien le peuple mauritanien qui est le grand perdant. Un peuple perdu, égaré, ahuri voire tétanisé par son élite. Un peuple qui n’a jamais su chercher à donner ou à comprendre le sens du bulletin électoral. Le peuple mauritanien est très loin de comprendre, voire de capitaliser le résultat du boycott.
Un peuple affamé et d’immaturité politique comme le peuple mauritanien sous le joug du képi n’est peut être «boycottiste» mais s’abonne au camp de l’indifférence et de l’insouciance sur le devenir du pays.
Pour le Mauritanien, le vote, ce droit civique, est devenu du fifrelin ou la chose des autres, ceux des belles voitures et des valises d’argent : les espèces sonnantes et trébuchantes qui orientent et désorientent le citoyen dans son choix politique. Ces militants de la fraude indirecte (argent comme arme politique) ont couvert, une fois encore, la démocratie électorale mauritanienne d’opprobre.
Sans scrupule, les tenants du déshonneur mauritanien ont débloqué des centaines de millions pour acheter les consciences des citoyens pour le prince du moment. Du déjà vu. Les hommes en kaki n’étaient pas en reste ; comme cet officier supérieur et cet universitaire dans leur localité en Adrar qui ont voté à la place de plusieurs dizaines de citoyens de cette cité tribalisée. Des méthodes d’une époque qu’on pensait révolue. Hélas…
Ainsi le langage des urnes a été inédit pour la Mauritanie et les mauritaniens : 81,94% pour Mohamed Abdel Aziz ! On se croirait en Irak de Saddam Hussein ou en Russie de Poutine… URSS, où es-tu ? Un score annonciateur du déclin du système car il exprime la manifestation de l’apogée et le dégoût d’une époque de la dictature.
Avec ce score, on semble clore un cycle politique de ce système qui a pris en tenaille la Mauritanie depuis quelques décennies ; système de dictature parce que consacrant une démocratie tronquée par des élections avec électeurs fantômes et urnes bourrées à 100%... Le spectre de Kobeni qui, il y a quelques années, avait boosté la victoire du tyran Maaouya, a plané sur l’élection du 21 Juin 2014.
Le 21 Juin, comme les précédentes élections en Mauritanie, a vu et connu des moments intenses de bourrage d’urne dans plusieurs localités : la fraude comme mode d’emploi. Les Mauritaniens n’avaient que leurs yeux pour pleurer devant cette farce de mauvais goût qui a trop duré et qui s’est muée en règle électorale pour la perpétuation du système honni qui tire la Mauritanie vers le bas.
Quand est-ce que la mauvaise gouvernance, qui a jeté la Mauritanie dans le chaos en favorisant la culture de l’incivisme, du particularisme primaire et du dédain, cesserait-elle pour que s’instaurent la stabilité, la paix sociale et la cohésion presque à jamais perdue ? Combien de temps la Mauritanie continuera-t-elle à attendre le bon samaritain pour la sortir des chemins de l’incertitude et des lendemains qui chantent mal ?
Jusqu’à quand l’élite de ce pays privilégiera-t-elle la triche et l’intérêt de son ventre ?
Pauvre pays où l’opinion n’est rien puisque l’essentiel du peuple est réduit en bétail électoral qui ne vote ni par conviction ni pour un meilleur devenir mais suivant le bon vouloir des bergers maniant le bâton et distribuant quelques herbes !
Et on dit qu’on est dans le 21ème siècle ! Et on se dit que ce pays est indépendant depuis plus de cinquante ans et qu’à sa tête se trouve celui qui est, aujourd’hui, à la tête de l’Union Africaine…
La Mauritanie a connu plusieurs élections rocambolesques ! Mais jamais de mémoire d’urne le score d’un vainqueur au premier tour n’a atteint les 80%. Mais avec Mohamed Ould Abdel Aziz et par la force du reniement, de la fraude indirecte et parfois classique on en est arrivé à ce résultat. Un résultat qui, pourtant, n’enthousiasme personne car étant plutôt synonyme de ce que l’on voit habituellement dans les pays ayant hérité du Goulag.
Mseykiin ! Les Mauritaniens ne sont pas encore sortis de l’auberge. Qu’Allah Sauve la Mauritanie et les Mauritaniens. Amin.
Camara Seydi Moussa