08-10-2015 13:12 - Aminetou Ely, une vie de femme rebelle

Aminetou Ely, une vie de femme rebelle

La Croix - Mariée à 13 ans, mère à 14 ans, cette enfant d’une grande famille traditionnelle mauritanienne s’est transformée en activiste féministe et anti-esclavagiste. Pourquoi elle ? Pourquoi Aminetou Ely fut-elle la seule rebelle parmi les huit enfants de sa grande famille conservatrice mauritanienne ? Aujourd’hui, à 58 ans, elle ne se l’explique pas vraiment. « Je suis née rebelle  ! »

Et le fossé ne s’est jamais refermé. « Ils me disent que je ne peux pas changer le monde », s’attriste-t-elle. Selon sa famille, ses combats pour l’émancipation des femmes et contre l’esclavagisme persistant en Mauritanie sont au mieux « une perte de temps ». Beaucoup veulent la faire taire.

Le chef des « Amis du prophète », un courant salafiste violent, a même édicté une fatwa de mort à son encontre en juin 2014, l’obligeant depuis à se déplacer en voiture et avec garde du corps dans Nouakchott, grâce au soutien financier d’ONG des droits de l’homme telles qu’Amnesty International.

Comment, moi, femme, puis-je parler  ?

Son crime  ? Avoir réclamé un procès équitable pour un jeune homme qui croupit pour apostasie en prison. « Comment moi, une femme, ai-je pu parler alors que pas un homme ne s’est publiquement exprimé  ? ironise-t-elle. Tout le monde a peur en Mauritanie à cause du salafisme extrémiste qui prospère sous la bienveillance des autorités. »

Depuis un an, sa plainte n’a pas été traitée. Et elle a dû envoyer aux États-Unis son fils de 18 ans, qui prenait publiquement sa défense, pour lui sauver la vie.

Celle que des ONG de plusieurs continents ont hissée au rang de candidate au prix Nobel de la paix garde sa révolte intacte depuis, qu’adolescente, elle s’échappait du domicile parental pour rejoindre les rangs des manifestants de l’opposition dans les rues. Son père alors la blâme et la frappe, et la police n’hésite pas à la jeter plusieurs fois en prison pour trouble à l’ordre public. « La lutte est un sacrifice »

À 13 ans, lorsqu’elle est mariée à un vieil ami de son père, elle voit dans ce départ du giron familial « une sorte de libération ». À 14 ans, Aminetou est mère d’une petite fille. Elle aura trois autres enfants de deux autres mariages qui ne durèrent pas non plus.

En 1991, lors des massacres contre les minorités noires, aux premières loges des manifestations, elle est de nouveau arrêtée et torturée. Trop harcelée par la police, elle achète un faux passeport et prend le nom d’Aminetou Mint el Moctar. « J’ai voyagé partout avec ce faux passeport  ! » sourit-elle, fière de son stratagème. Mais elle ajoute  : « la lutte est un sacrifice ».

Sa cause largement reconnue lui a valu le prix français des droits de l’homme en 2006, la médaille de chevalier de la Légion d’honneur et un prix du Héros américain pour son activisme contre l’esclavage en 2010. En 2009, elle fut classée parmi les 500 personnalités musulmanes les plus influentes par le centre royal jordanien d’études stratégiques.

« Notre société encourage l’impunité »

C’est sous sa fausse identité qu’elle crée, en 1999, l’association des femmes chefs de famille (AFCF), qui dispose depuis de six centres, deux dédiés aux enfants, quatre aux femmes, dont l’un spécifiquement pour les victimes de l’esclavage.

Cette année-là, elle assiste à un procès intenté par une jeune mère pour obtenir une reconnaissance de paternité pour ses deux enfants. La jeune femme était morte terrassée à l’annonce du verdict de refus.

« Nous vivons dans une société de totale impunité. Les femmes n’ont pas accès à la justice. Quand une fille est violée, c’est la faute de ses parents qui n’ont pas assumé leur parenté.

Le mariage précoce est, lui, censé protéger la famille et son honneur. L’arsenal de lois adoptées contre l’esclavagisme est uniquement une vitrine pour l’international. Les militants anti-esclavagistes sont arrêtés et il y a encore des enfants qui naissent esclaves en Mauritanie.».


D’autres femmes à ses côtés

À force de dénoncer la traite sexuelle des fillettes et des jeunes filles envoyées en Arabie Saoudite, elle perd en 2009 un emploi de directrice d’un projet de développement qui était financé par le Qatar. Mais elle a obtenu que quatorze filles, dont la plus âgée avait 14 ans, soient rapatriées.

D’après elle, environ 300 jeunes femmes descendantes d’esclaves seraient encore détenues abusivement en Arabie Saoudite.

Sa dernière victoire est l’annulation pour maltraitance à enfants de deux mariages de fillettes de 9 et 10 ans. Des femmes l’ont rejointe dans son combat. Elle les compte une par une en Mauritanie  : elles sont 12 782.

Marie Verdier



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Commentaires (3)

  • pyranha (H) 09/10/2015 07:53 X

    Diacks pour mohamed w.l le nom de démon et de cheitane c'est déjà élogieux .Même le bon Dieu ne l'a pas colle encore trouvé un non qui lui sied .Il porte tout ce qui dénature un être humain. Ce type est foncièrement raciste d’où contraire à toute bonne conduite d'un musulman le prophète protégeait mm ses ennemis.Ce type est envieux et haineux...j'aimerai voir comment il evolue au niveau des siens une vie minable.Ce type est ignorant .Ce type hait les savants et ceux qui prônent la bonne parole.Ce types est vicieux et Dieu detruira les vicieux et c'est un type qui ne changera jamais comme cheitane qui est tout le temps prêt à braver les interdits de DIEU.

  • Diacks (H) 08/10/2015 15:37 X

    Mohamed W.I, tu ne mérites pas le nom que tu portes du fait que tu es plutot un pur cheitan. Quand tu t'attaques à la personne de l'une des personnes les plus honnetes que compte ce pays, te ne fais que dévoiler ta nature de demon. (***).

  • mohamed w.l (H) 08/10/2015 14:20 X

    La Croix - Mariée à 13 ans, mère à 14 ans, cette enfant d’une grande famille traditionnelle mauritanienne mensonge mon fils est parti au usa pour le protéger mensonge il n as pas réussi et il profite pour faire l aventure au usa un reve pour tout les jeunes soyez honnête emprisonné 0our cause les événements de 1989 un faut passport mais elle ne croyait pas que l article sera publier en Mauritanie elle se déplace en voiture avec body Gard de peur d etre tue ou kidnappé par ls salfistes donner ce scénario hooliwood pour faire un film comme la petite afghane