10-02-2016 15:51 - Chambre de commerce : sondage et prémices du changement

Chambre de commerce : sondage et prémices du changement

Startup Leaders - A quelques mois du renouvellement des instances dirigeantes de la Chambre de Commerce, d’Industrie et d’Agriculture de Mauritanie (CCIAM), prévu en octobre 2016, l’heure est au bilan. C’est dans cette perspective que les « startup leaders » ont commandité un sondage pour éclairer les milieux économiques sur plus d’une décennie de gestion par l’équipe sortante.

Et il faudrait comprendre « l’équipe sortante » dans le sens réduit du terme dans la mesure où ni les membres du Bureau Exécutif de la CCIAM, ni ses commissions spécialisées n’ont été réellement associés à la gestion de cette institution consulaire bien « qu’il vaut mieux être plusieurs sur une bonne affaire que seul sur une mauvaise. » comme le disait si bien Tristan Bernard.

L’intérêt de ce sondage est de permettre également aux candidats potentiels à la nouvelle mandature (octobre 2016) de mettre de l’ordre dans leurs cartes tout en modulant leurs ambitions pour la présidence de la CCIAM en fonction de la perception de cette dernière par ses adhérents et le monde des affaires.

Il est important de signaler ici que pour corroborer ou contredire les allégations des opérateurs économiques satisfaits ou déçus par le bilan de l’équipe sortante, ledit sondage a couvert le personnel même de la Chambre de commerce pour avoir une idée sur les potentialités réelles de cette institution aux infrastructures imposantes.

Un premier mandat réussi

Les résultats de sondage sont éloquents et montrent que 80% des acteurs des milieux économiques sont unanimes pour louer l’esprit créatif de l’actuel Président de la Chambre de commerce, qui a sorti une chambre de commerce moderne et opérationnelle des cendres de l’ancienne chambre qui avait brillé par son invisibilité.

En effet, tout au long de ce mandat, plusieurs extensions et des équipements modernes ont permis l’émergence d’un cadre idoine pour toutes les activités en faveur de la promotion et du développement du secteur privé.

Durant cette période de grâce, la Chambre de commerce avait d’ailleurs abrité un nombre incalculable d’ateliers et de séminaires organisés par l’institution elle-même ou par d’autres acteurs des secteurs public ou privé.

En effet, durant le premier mandat assez long (6 plus 2 ans de bonus), la Chambre de commerce s’est distinguée dans le match-making en organisant de grandes rencontres de dimension internationale avec plus ou moins de réussite.

Pour réaliser de telles performances, la volonté seule ne suffisait pas, il fallait bien mobiliser des moyens financiers ! Ce qui amène tout observateur averti à s’interroger sur la solvabilité providentielle de la Chambre de commerce.

En procédant par élimination, le sondage montre que les recettes de la Chambre de commerce ne proviennent ni des cotisations de ses membres, ni des services sous forme d’expertises vendus aux adhérents.

L’essentiel des recettes de la Chambre de Commerce est tiré de la fameuse taxe sur le tonnage de 150 UM, obtenue par le Président de la Chambre de commerce après des chemins bien tortueux. Quant aux autres recettes de la Chambre telles que la subvention de l’Etat (30 millions UM), le Registre du commerce…elles ne représentent que peu dans l’assiette des recettes de la Chambre de commerce.

Un second mandat sabbatique

Durant cette période s’étalant d’octobre 2011 à nos jours, les opérateurs économiques interrogés sont plutôt sceptiques, puisque 30% seulement sont satisfaits des activités de promotion du secteur privé menées durant ce second mandat sabbatique.

Le vocable revient à un opérateur économique à la verve caustique. Contrairement au premier, le second mandat a été, semble-t-il, un long chapelet de faits et de méfaits marqué par une véritable course aux missions à l’extérieur.

Pourtant, avec la taxe sur le tonnage, véritable jackpot, toutes les voies étaient ouvertes aux responsables de la Chambre de commerce pour créer une vraie Chambre consulaire dotée d’un organigramme moderne, avec des cadres triés sur le volet mais également de bons conseillers autour du Président lui-même.

D’ailleurs, tout avait bien commencé puisque le président avait eu la bonne intuition de s’entourer de certaines personnalités de notoriété publique à la compétence reconnue, et bien d’autres non moins compétentes. Toutes ces personnalités, à un moment donné, ont apporté leurs touches, mais très vite ont fini par jeter l’éponge.

Puisqu’aucune de ces personnes n’a souhaité s’exprimer sur son départ de la Chambre de commerce, nous avons du mener notre petite enquête de façon très indépendante. Au finish, il semble que le mobile de leur départ, le plus partagé, est le manque de volonté des dirigeants de la Chambre de commerce d’opter pour le changement en mobilisant les moyens financiers et humains nécessaires.

Dans une envolée lyrique, d’autres opérateurs, très amers contre le mode de gestion de l’équipe dirigeante ont comparé la Chambre de commerce à un Musée, et ont qualifié ses activités de saupoudrages sans impact réel sur le secteur privé. « L’exécution du budget de ces dernières années montre que plus de 45% du budget ont été dépensé en frais de missions et de déplacement…un ratio très élevé pour une institution publique », ont-t-ils déclaré.

Au niveau de la rubrique « protocoles d’accords » signés par la Chambre de commerce, un opérateur économique, très introduit, affirme que : « prés de 60 protocoles d’accord ont été signés par la Chambre de commerce avec des pays dans plusieurs régions du monde mais quand on pose la question aux responsables de la Chambre sur le bilan de ces protocoles, ils se perdent en conjectures…car finalement ces protocoles n’ont pas été concluants.

Ils n’ont pas plus de valeurs que le papier sur lequel ils ont été signés. Cela n’empêche pas les responsables de la Chambre de commerce de les afficher, bien visibles…pour amuser la galerie »


Du côté des jeunes entrepreneurs, « une dizaine de commissions spécialisées ont été mises en place au début de ce second mandat mais n’ont jamais pu mener à bien leurs missions, mal définies, et à cause d’un manque de collaboration évident des responsables de la Chambre de commerce très à l’aise dans leur fauteuils bien douillets et qui ont d’autres priorités. », avance un jeune opérateur économique.

80% des opérateurs économiques interrogés déclarent n’ayant jamais eu recours au centre de documentation (CIMDET) de la Chambre de commerce. Ce centre, jadis assez dynamique, a été rattaché à la Chambre de commerce pour son fonds de commerce, mais il n’est plus que l’ombre de lui-même avec des informations commerciales périmées.

« Et comment pourrait-il en être autrement si l’on sait que ce centre ne possède même pas une voiture de liaison pour chercher l’information ou mener une enquête ! », fait remarquer un agent du CIMDET. A la question subsidiaire « Quel est le profil du futur Président de la Chambre de commerce ? », 80% des opérateurs interrogés ont avancé qu’il doit être issu du milieu des Affaires et 60% estiment qu’il doit posséder une solide expérience dans les instances patronales.

A l’actif des responsables de la Chambre de commerce, il est à signaler qu’un projet d’appui aux petites et moyennes entreprises (PME) a été mis en place en collaboration avec l’Agence Française de Développement (AFD).

Ce projet a pour objectif de mettre à niveau les PME afin de leur permettre de répondre aux exigences du système financier et d’accéder au crédit. Les formations sont assurées localement par des cabinets agréés par défaut d’expertise interne à la Chambre de commerce. Ce projet est arrivé à terme sans avoir réellement d’effets multiplicateurs mesurables sur les entreprises ciblées.

La Chambre de commerce est également partie prenante dans un autre projet dit « Projet Compagnonnage consulaire », en phase de démarrage. Financé par l’Union Européenne, il permettra à un Consultant de faire quelques séjours à Nouakchott et d’établir un énième diagnostic.

De toute façon, un des préalables, avant l’appropriation de ce projet encore aléatoire, est d’abord la réconciliation de l’institution consulaire avec ses adhérents qui l’ont boudée depuis bien longtemps. En effet, déconnectés du milieu des affaires, les principaux responsables actuels, obnubilés par les voyages, sont passés à coté des missions traditionnelles de la Chambre de commerce.

Une bien maigre moisson en termes de projets pour une institution consulaire qui dispose d’un véritable pactole à savoir la taxe sur le tonnage qui, rappelons-le, n’a jamais été adoptée en conseil de ministres mais suivit un chemin tortueux avec la complaisance d’un Directeur du port d’une certaine époque.

Fin de l’Omerta !

Ainsi, de fil en aiguille, malgré un Président chevronné, la Chambre de commerce présente tous les attributs d’une simple caisse de résonance. Plongée dans l’apathie et l’immobilisme, avec peu de personnel qualifié, sans organigramme, la CCIAM est restée primaire se caractérisant par une gestion suivant une navigation à vue. Après plus de douze ans de gestion, l’équipe sortante n’a pas su développer les outils nécessaires pour fidéliser son personnel et encore moins ses usagers.

Où se situe donc ce ventre mou de la CCIAM ? Bien hardi celui qui pourra répondre à cette question ! Cependant, quelques signes avant-coureurs mènent au management administratif laxiste de la chambre consulaire.

Le dysfonctionnement de ce département n’a pas échappé à la sagacité d’un personnel peu motivé, et dont les rémunérations semblent être accordées, non pas en fonction d’une grille de salaires standard mais selon la tête du client.

Tout en travaillant sans grande ferveur, ils considèrent que leur condition peu reluisante est tout simplement une conséquence de la carence administrative de la CCIAM avec un SG, un SGA et un chef du personnel, ce qui a finalement pour corolaire une dispersion des décisions administratives.

Les gratifications pour fêtes accordées par la CCIAM à sont personnel méritent de figurer dans des manuels scolaires comme modèles de problèmes de « partage inégal ». En effet, à cette occasion, les auto-gratifications (non remboursables) que s’accordent les deux principaux responsables représentent 65% du total des gratifications.

« Une charité bien ordonnée… ! », comme le dit avec amertume un agent de la CCIAM. Des gratifications au prorata du salaire, variant de un million cinq cent mille à soixante mille, ce qui est tout simplement illégal. En effet, dans les institutions publiques, c’est le forfait (plus équitable) qui est la règle. C’est seulement à la CCIAM que les fêtes sont une occasion pour jouer à ce jeu de dés pipés !

Par ailleurs, il est clair que les dirigeants de la Chambre de commerce ont manqué de panache en privilégiant gérer une équipe réduite, développer le côté institutionnel de cette vieille structure en jouant sur le cérémonial et en passant l’essentiel de leur temps à voyager et à entretenir des relations épistolaires sans lendemain, et c’est le secteur privé qui a fini par trinquer.

« Les gens qui ont peu d’affaires sont de très grands parleurs ; moins on pense, plus on parle », c’est cette maxime de Montesquieu qui qualifie le plus cet état de fait, selon un opérateur économique.

Aujourd’hui, c’est la fin de l’Omerta, cette loi du silence chère aux familles siciliennes, et il était temps après plus de douze ans d’une gestion par un tandem qui n’y est pas allé avec le dos de la cuillère.

En effet, 75% des opérateurs économiques interrogés sont tous conscients de la nécessité impérieuse du changement à la tête de cette institution consulaire dont le bilan demeure controversé.

Le mot d’ordre des acteurs des milieux économiques est de mener les prochaines élections consulaires dans les délais requis et suivant les règles de l’art pour que le futur Président puisse prendre service début octobre 2016.

Les « startup leaders » militent pour l’investissement responsable, la justice sociale et la transparence dans la gestion des deniers publics. Nous travaillons pour imposer la norme SA 8000 dite « norme sociale » qui garantit le respect des droits sociaux.

Dans un pays pauvre comme la Mauritanie, nous travaillons pour réduire le gap entre les traitements et salaires de la hiérarchie et des vrais travailleurs qui mettent la main à la pâte. Les « startups leaders », forts d’une jeune équipe d’enquêteurs bénévoles, ont dressé une liste d’une vingtaine d’établissements publics dont la gestion est opaque…dossiers à suivre.



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Commentaires (5)

  • BAMAMADOUBOG12 (H) 10/02/2016 23:44 X

    En Mauritanie, il n’y a pas de secret ! A la Chambre de commerce, tous les travailleurs paient l’ITS, ce qui est tout à fait normal ; sauf le Président et le SG ! Sont-ils des supers citoyens, exemptés de l’ITS ? Y’a-t-il une complaisance de la part de la Direction Générale des Impôts

  • for mauritania2010 (H) 10/02/2016 19:26 X

    Cette chambre de commerce ressemble étrangement à sa consœur du Burkina Faso sous Compaoré…où les élections consulaires n’ont eu lieu qu’après la fuite de ce dernier ! Le Bureau Exécutif de la Chambre de commerce doit organiser dans les meilleurs délais des élections anticipées pour limiter les dégâts. Je suis sûr que pour les quelques mois qui restent les deux responsables de la CCIAM ont un agenda de voyages bien garni. De vrais collectionneurs de frais de mission…on ne peut voir ça que dans les Républiques bananières ! Un audit sérieux, c’est ce qu’il faut pour leur faire comprendre qu’on ne gère pas une institution publique comme on gère sa propre auberge.

  • Bougadoum (H) 10/02/2016 18:25 X

    Sans vouloir jeter l’anathème sur tout le monde, il faut être aveugle pour ne pas constater que la Chambre de commerce a servi de vache à lait pour les deux principaux responsables qui se sont refaits une santé financière en collectionnant sans pudeur des frais de missions injustifiés. Il ne se passe pas une réunion d’une heure de temps au bout du monde sans que l’on voit ce tandem, toujours en première, ce qui a complètement grevé le budget de cette institution consulaire. Avec des salaires mirobolants, ils ne se refusent aucun avantage en nature dans la mesure où même leurs téléphones portables sont ouverts et pris en charge par la Chambre de commerce. Les services compétents de l’Etat doivent se rapprocher des opérateurs téléphoniques pour faire la lumière sur cette gabegie.

  • Sid Selim (H) 10/02/2016 18:17 X

    Beaucoup de noms de candidats potentiels à la Chambre de commerce commencent à circuler mais c'est sans doute Monsieur Ahmed Hamza, ancien Président de la CUN,et actuel président de la fédération des Industries et des Mines qui le plus crédible. Brillant homme d'Affaires, anticonformiste, avec un riche agenda de relations; il est à même de redorer le blason de cette institution en hibernation depuis plusieurs années. Il a surtout l'avantage d'avoir beaucoup d'amis de tous les bords politiques. C'est en quelques sortes, l'homme du consensus.

  • Mouvement indignés RIM (H) 10/02/2016 16:54 X

    Un sondage assez proche de la réalité ! En vérité, la Chambre de Commerce n'est rien d'autre qu'une sinécure entre les mains de quelques individus. En passant devant cette institution, on remarque "CCIAM Business Center" mais en réalité, c'est une annexe louée par la Direction de la Normalisation. Il n'y a jamais eu de Business center...ce qu'une mise en scène comme la plupart des activités de la Chambre de Commerce.