06-12-2018 07:45 - Mauritanie : Aziz choisit ses hommes pour 2019

Mauritanie : Aziz choisit ses hommes pour 2019

Afrimag - Le président mauritanien, Mohamed Ould Abdel Aziz, souffle le chaud et le froid. Certes, il laisse croire, à qui veut l’entendre, qu’il ne briguera pas un troisième mandat, mais il reçoit au grand jour le président d’une initiative censée collecter 1 million de signatures pour qu’il reste au pouvoir au-delà de 2019 ! Pour l’ancien général le dilemme est le suivant : peut-il quitter la présidence sans lâcher le pouvoir ?

A maintes reprises, Mohamed Ould Abdel Aziz a répété cette phrase qui en dit long sur ses intentions : « nous ne laisserons pas le pouvoir entre des mains qui ne sont pas sûres ». Entendez : « si je dois quitter la présidence, il faut bien que mon successeur soit un homme du sérail ». Quelqu’un qui ait partagé avec lui tout ce qu’il a fait de mal plus que de bien à ce pays.

Dans cette perspective, le président Aziz a déjà entamé la mise en place du Système qui lui permettrait de partir en toute tranquillité. Ou de rester aux commandes. Après avoir supprimé le sénat, en 2017, il a assuré la mainmise de l’Union pour la République (UPR), le parti au pouvoir, sur l’Assemblée nationale.

La centaine de députés issus de la formation présidentielle peut compter, le moment voulu, sur la trentaine d’autres élus de cette majorité diffuse qui obéit aveuglement aux « directives » du Chef.

En témoignent l’élection comme président de l’Assemblée du député de Zouerate, Cheikh Ould Baya, colonel à la retraite et ami personnel du président Aziz, ayant obtenu 118 voix contre 27 au candidat présenté par les islamistes de Tawassoul et soutenu par les autres formations du Forum national pour la démocratie et l’unité (Fndu).

Mais la grande surprise est venue de l’élection de Boidiel Ould Houmeid au poste de premier vice-président de l’Assemblée. Cet ancien ministre des finances de Taya, à la tête du parti «Al wiam» qu’il range lui-même dans ce qu’il appelle « l’opposition responsable » a rejoint la majorité présidentielle le jour où il devait sceller ce pacte d’alliance avec l’UPR ! L’oubli du parti au pouvoir de tous ses élus et ceux de ses alliés de la majorité pour porter Boidiel à ce poste de choix a fait du bruit au sein d’une majorité à laquelle le président Aziz applique la méthode LIFO (last in, first out), ou dernier venu, premier servi.

Ce choix controversé fait pourtant partie de la stratégie mise en branle pour que la majorité actuelle, renforcée par l’arrivée de « l’opposition modérée » (APP, Al wiam, ADN) remporte la présidentielle en 2019.

La maîtrise de l’Assemblée nationale fait partie, apparemment, de l’échafaudage qui permettrait à Aziz, devenu « ancien président » à continuer à s’impliquer dans les affaires courantes. Avec le contrôle du parti au pouvoir et le choix d’un dauphin dont le profil se dessine déjà sous les traits du général Ghazouani, actuel chef d’état-major général des armées, une sorte de triumvirat serait le « modèle » mauritanien au montage « poutinien » de 2008.

Ce que l’actuel homme fort du Kremlin a élaboré a fait école chez son ami Erdogan et pourrait bien servir les desseins d’Aziz : la Constitution lui interdisant de concourir pour un troisième mandat consécutif, Poutine soutient en 2008 la candidature de Dmitri Medvedev à la présidence.

Une fois élu, ce dernier le nomme président du gouvernement. Dans la foulée, Vladimir Poutine prend la direction du parti Russie unie et restaure la toute puissance d’une URSS disparue suite à la chute du Mur de Berlin, en 1989.

Le syndrome de 2005

Mais Aziz n’est pas Poutine et la Mauritanie n’est pas la Russie. D’aucuns craignent que cette stratégie ne tourne au scénario auquel on assiste actuellement en Angola. Le 24 septembre 2018, Jose Filomeno dos Santos, fils de l’ancien président, a été placé en détention provisoire dans le cadre d’une affaire de détournement de fonds de 500 millions de dollars US.

Ayant quitté le pouvoir, après 38 ans de règne (1979-2017), Dos Santos a levé le dernier rempart de sa « protection » en cédant, le 8 septembre dernier, la présidence du Mouvement populaire de libération de l’Angola (MPLA), le parti au pouvoir, à João Lourenço, président de la République.

En Mauritanie, les « fidélités » sont au pouvoir, pas aux hommes. Le président Aziz l’a parfaitement compris, quand il a décidé de battre campagne pour l’UPR, et maintenir, à son plus haut niveau, une mobilisation qui a permis au parti au pouvoir de remporter les élections municipales, législatives et régionales du 1er et 15 septembre 2018.

Le défi maintenant est de maintenir le cap, jusqu’à l’élection, en 2019, d’un « président qui rassure ». Un successeur qui ne risque pas de lui rejouer le coup de Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi, en refusant son autorité de « bienfaiteur » (faiseur de président) ou, pire, en lui demandant de rendre compte d’une décennie de gestion sans partage du pouvoir.

Par Mohamed Sneïba Comité Editorial – Casablanca



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Commentaires (5)

  • grand pere (H) 11/12/2018 13:01 X

    Boidiel n'est pas un arabe noir ;c'est un haratin ou un maure noir.Il n'as rien d'un arabe. vous avez le complexe de l'arabité vous les mauritaniens.

  • Ahmedabdallah (H) 07/12/2018 03:21 X

    De tous les commentateurs de cridem, notre ami medabdul est le plus incohérent et le plus illisible: il aime tirer sur tout ce qui bouge, sans aucune analyse, ni rien du tout!

  • medabdul (H) 06/12/2018 09:44 X

    comment aziz a t'il fait plus de mal que de bien a ce pays? MOH SENEIBA tu es malhonnête (***).

  • Bertrand (H) 06/12/2018 09:16 X

    Et si Aziz voulait présenter ould Baya et laisser la présidence de l'Assemblée à un arabe noir noble de caractère et ayant du punch en l’occurrence Boïdiel. L'hypothèse est-elle envisageable messieurs les spécialistes du futur?

  • Mauvais Calcul (H) 06/12/2018 08:56 X

    Aziz vit des heures de doutes et de manque de sommeil sur son devenir de demain, il n’est plus sur de quoi que ce soit, alors qu’il a écarté ceux qui pouvaient faire l’affaire de son retour à la poutine qu’il souhaite lui seul d’ailleurs. A ce jeu à la Poutine ou à la Turc, Aziz n’aura qu’a essayé, il le regrettera amèrement, le jeu démocratique n’autorise pas sa pensée saugrenue d’être le seul mauritanien qui porte un pantalon et que les autres ne veulent rien, ces signatures ne trompent personnes surtout que les signataires n’ont aucune conviction politique. Avec 10 ans de pouvoir, les mauritaniens ont compris Aziz dans sa soif d’argent et de matériel, surtout la concurrence qu’il oppose aux autres dans leur domaine, Aziz n’est plus un président pour les mauritaniens, il est un commerçant, un homme d’affaire de haut niveau, qui veut tout avoir pour lui et sa famille, il a joué sur la fibre de la peur en utilisant Biram et les menaces terroristes pour faire ses affaires. Les mauritaniens ont découvert dans son deuxième mandat que le président cherche de l’argent comme eux et fait de la sécurité financière son combat. Le silence populaire des mauritaniens en dit long, s’il se croit intelligent et les autres des bourriques, il fait un mauvais calcul avec son entourage, il n’aura qu’à essayer de revenir, il sera choqué et une crise cardiaque pourra l’amener s’il ne fait pas attention.