01-11-2019 13:51 - Face à la fronde, le président irakien propose des élections anticipées
France24 - Pour tenter de calmer la fronde populaire en Irak, le président Barham Saleh a proposé jeudi d'organiser des élections anticipées.
Il a également précisé que le Premier ministre était prêt à démissionner si le Parlement s'accordait sur un remplaçant.
En évoquant une démission du Premier ministre et des élections anticipées, le président irakien Barham Saleh a cherché à répondre, jeudi 31 octobre, aux revendications populaires exprimées massivement dans la rue depuis le début du mois.
Le chef de l'État s'est adressé aux Irakiens à la télévision alors que le pays est secoué par un mouvement de contestation qui réclame le départ de l'ensemble de la classe politique, jugée inapte et corrompue. Les violences durant ce mouvement ont fait plus de 250 morts depuis le 1er octobre.
Le départ du Premier ministre n'est pas encore acté : Adel Abdel Mahdi "accepte de démissionner" si les blocs au Parlement se mettent d'accord sur un remplaçant. Il s'agit, selon les mots du président Saleh, d'assurer une transition "dans le cadre constitutionnel et légal qui empêchera toute vacance constitutionnelle".
Quel que soit le sort du Premier ministre Adel Abdel Mahdi, "je veux vous assurer qu'en tant que président de la République, j'approuverai la tenue d'élections anticipées dans le cadre d'une nouvelle loi électorale et sous la supervision d'une nouvelle Commission électorale", a déclaré le président Saleh. Cette nouvelle loi électorale doit être soumise au vote du Parlement "la semaine prochaine", a-t-il précisé.
La Constitution, votée en 2005, prévoit que le Parlement peut, à son initiative ou à celle du président de la République, retirer sa confiance au Premier ministre. Le cas d'une démission n'est toutefois pas évoqué, alors qu'en 16 ans, aucun Premier ministre n'a quitté son poste avant la fin de son mandat de quatre ans.
"Problème avec tous les partis au pouvoir"
Sur la place Tahrir de Bagdad, épicentre de la contestation, le discours du président ne semble pas convaincre. "Une démission d'Abdel Mahdi n'est qu'une partie de la solution. Le problème qu'on a, c'est avec tous les partis au pouvoir", a rétorqué à l'AFP Haydar Kazem, manifestant de 49 ans.
Le Premier ministre s'était déjà dit prêt mardi à démissionner si les principaux blocs au Parlement – celui du leader chiite Moqtada al-Sadr et celui de Hadi al-Ameri, chef des paramilitaires pro-Iran du Hachd al-Chaabi – se mettaient d'accord sur un nouveau gouvernement et un nouveau Premier ministre. Mais les deux blocs divergent encore.
En vertu du système compliqué de répartition des postes en fonction des confessions et des ethnies en Irak, le poste de Premier ministre revient à un chiite. Mais dans un pays où l'Iran et les États-Unis veulent étendre leur influence, le Premier ministre doit aussi convenir aux deux puissances agissantes, elle-mêmes ennemies.
Conditions de départ du Premier ministre
Les principaux blocs au Parlement et les membres de la coalition gouvernementale sont divisés. D'un côté, le populiste chiite Moqtada al-Sadr s'est montré au milieu des manifestants. De l'autre, Hadi al-Ameri, chef des paramilitaires pro-Iran du Hachd al-Chaabi, s'est aligné sur l'Iran pour qui le "vide" mène au chaos.
Or, un départ d'Adel Abdel Mahdi, un indépendant sans base partisane ou populaire, ne peut passer que par le Parlement qui peut lui retirer sa confiance et lui trouver un remplaçant.
Depuis lundi, cette Assemblée réclame qu'il se présente devant elle, en vain. Elle a accepté jeudi la condition posée par le Premier ministre, qui a exigé que la séance soit retransmise en direct à la télévision.
Dans le Sud, la mobilisation ne faiblit pas, selon des correspondants de l'AFP sur place. À Diwaniya, les étudiants sont sortis dans la rue, de même que les écoliers et enseignants en grève générale, ou encore les fonctionnaires.
Dans les villes de Hilla, Nassiriya, Samawa et Amara, de nouveaux rassemblements se sont aussi formés. À Bassora, des manifestants ont ces derniers jours bloqué la route menant au port d'Oum Qasr, suscitant l'inquiétude des autorités pour les importations, notamment alimentaires.
Avec AFP