09-12-2019 11:54 - Ousmane Wone fait appel au soutien des organisations de défense des droits de l'homme

WANE Moussa -
La présente note a pour objet de faire un bref rappel de la situation de Monsieur Wone, victime d’une détention arbitraire et dont le procès, émaillé par des violations flagrantes des lois et procédures, s’apparente à un déni de justice.
Rappel des faits :
Dans l’objectif de redresser la société qui traverse des difficultés se traduisant par un déficit de plus de 2Milliards d’ouguiyas, Monsieur Ousmane Wone, Ingénieur de formation, a été nommé Directeur Général de l’Etablissement National d’Entretien Routier (ENER) en 2015.
Dès sa prise de fonction, il s’est attaqué résolument aux causes de la quasi-faillite de l’entreprise (suppression des dépenses inutiles, résiliation des contrats de complaisance, refus d’octroi de prébendes, réduction drastique du train de vie de l’entreprise) ce qui a provoqué l’ire de certaines personnalités proches des cercles du pouvoir qui n’ont pas hésité d’actionner tous les leviers visant à ruiner sa personnalité et le faire virer de l’entreprise.
Des dénonciations calomnieuses à son encontre ont fini par provoquer des missions de l’Inspection Générale d’Etat (IGE) dont les équipes ont séjourné à l’ENER pendant une année et demi, chose jamais vue en Mauritanie. Selon les témoignages rapportés, les inspecteurs ont utilisé toutes sortes de méthodes avilissantes (provocation, intimidation, humiliation devant les subordonnés) pour l’amener à se plier.
Finalement, n’ayant pu parvenir à leurs fins, les inspecteurs d’Etat ont rafistolé un rapport, sans preuves, faisant état d’un détournement de 23 Millions d’anciennes ouguiyas. Il est bien évident que les écarts de gestion qu’on lui reproche dans ce rapport ne sont que des prétextes fallacieux car il s’agit principalement de :
Menues dépenses pratiquées dans toutes les entreprises de Mauritanie et qui figurent au budget de l’ENER, adoptées par le Conseil d’Administration et approuvées par ses deux tutelles (Ministère de l’Equipement et Transport et Ministère des Finances),
Salaires distribués à des prestataires externes, suite à l’ordre du gouvernement l’intimant d’utiliser tous les moyens pour accélérer la cadence des travaux de l’entretien routier en vue de les finir avant la tenue du sommet arabe.
C’est à la suite de ce rapport qu’il a été arrêté le 16.10.2017 et son dossier figure parmi les premiers cas soumis au Tribunal criminel spécialisé dans les crimes relatifs à la gabegie, nouvellement créé.
Comme le dossier d’accusation n’était pas consistant, l’Inspection d’Etat a transmis au juge d’instruction une demande complémentaire tendant à ajouter sur le montant initial d’autres montants pour charger d’avantage le prévenu. En application de la procédure, le juge d’instruction a convoqué les parties pour les confronter sur les faits nouveaux. A trois reprises, le représentant de l’Inspection Générale ne s’est présenté. En pareil cas, la nullité de la demande d’information devrait être prononcée et celle-ci ne peut plus être invoquée comme fait nouveau et retenue dans la suite du procès. Malheureusement ce n’est pas le cas comme on le verra dans la nouvelle tournure que vient de prendre le procès.
Le déroulement de son procès :
Le déroulement du jugement de Monsieur Wone au niveau du Tribunal criminel spécialisé dans les crimes relatifs à la gabegie est inquiétant d’autant plus que tout se passe comme si l’on veut maintenir le prévenu en otage. En effet :
Lors d’une première audience tenue le 29 Novembre 2018, le Tribunal avait décidé de ne pas rendre de verdict, se contentant de se donner un délai supplémentaire aux fins de recueillir l’avis d’experts.
Une deuxième audience a été convoquée le 29 Octobre 2019 à l’issue de laquelle le Tribunal, encore une fois, ne rendit pas de verdict, s’accordant cette fois un délai de 15 jours pour le faire. De plus, avant l’expiration de ce délai, le Président du Tribunal prit le 06.11.2019 une ordonnance à travers laquelle il ordonna à l’Inspection Générale d’Etat d’apporter des précisions sur des éléments essentiels du dossier d’accusation et sur les montants complémentaires déjà rejetés à l’instruction.
Conclusion
Il ressort clairement de ce qui précède que le Tribunal a de sérieux doutes quant à la fiabilité du dossier d’accusation. Et pourtant, le code de procédure pénal mauritanien prevoit que « le doute profite à l’accusé ». Il s’agit là d’un principe élémentaire que les tribunaux appliquent depuis toujours. En refusant d’appliquer ce principe au profit de Monsieur Wone, le Tribunal fait preuve d’un inadmissible déni de justice à son égard.
Monsieur Ousmane Wone est en détention depuis plus de deux ans sans qu'aucune preuve de sa culpabilité soit versée au dossier d'accusation. Il est clairement victime d'un emprisonnement abusif et 'une violation de ses droits fondamentaux.
Monsieur Wone fait appel au soutien des organisations de défense des droits de l'homme afin que s'arrête sa détention abusive.