19-07-2020 17:00 - Londres dénonce des «atteintes graves» aux droits des Ouïghours par la Chine

Le Figaro - Le chef de la diplomatie britannique, Dominic Raab, a accusé ce dimanche 19 juillet la Chine de commettre des «atteintes graves, choquantes aux droits de l'homme» à l'encontre de la minorité ouïghoure dans le Xinjiang, vaste région du nord-ouest chinois.
«Il est clair qu'il y a des atteintes graves, choquantes aux droits de l'homme», a déclaré Dominic Raab sur la BBC. «C'est profondément, profondément choquant».
Au sujet d'informations évoquant des «stérilisations forcées» ou des «camps de rééducation», il a souligné qu'elles «rappellent quelque chose que nous n'avons pas vu depuis très longtemps, et cela de la part d'un membre de premier plan de la communauté internationale qui veut être pris au sérieux».
«Nous voulons une relation sérieuse (avec la Chine) mais nous ne pouvons voir un tel comportement et ne pas le dénoncer», a-t-il ajouté.
Des experts et des organisations de défense des droits de l'homme accusent Pékin d'avoir fait interner jusqu'à un million de musulmans, principalement de l'ethnie ouïghoure, dans des camps de la région au nom de la lutte antiterroriste, ce que la Chine dément.
Ces déclarations du chef de la diplomatie britannique interviennent alors que les relations entre Londres et Pékin se sont fortement tendues depuis l'imposition par la Chine de sa loi de sécurité nationale à Hongkong et l'exclusion par le Royaume-Uni du géant chinois Huawei de son réseau 5G, après des mois de pression de Washington.
L'ambassadeur de Chine au Royaume-Uni, Liu Xiaoming, a prévenu sur la BBC que Pékin répondrait de manière «résolue» si Londres imposait des sanctions à des responsables chinois concernant le Xinjiang, à l'instar de ce qui s'est passé avec les États-Unis. «Il n'y a pas de stérilisations forcées des Ouïghours. Il n'y a pas de camps de concentrations dans le Xinjiang», a déclaré Liu Xiaoming, précisant que «ce n'était pas la politique du gouvernement» et que «la Chine considérait tous les groupes ethniques de façon égale».
Interrogé sur une vidéo virale qui montre des centaines de prisonniers, masqués, les mains attaché dans le dos et qui sont forcés à monter dans un train, l'ambassadeur Liu Xiaoming a expliqué que, «parfois, vous avez des transferts de prisonniers, comme dans n'importe quel pays».
«Je ne sais pas où vous avez obtenu cette vidéo. Les soit-disant agences de renseignement occidentales font de fausses accusations», ajoute-t-il. Cette vidéo, révélée l'année dernière, a été authentifiée par plusieurs chercheurs et agences de renseignement occidentales. Elle représenterait des prisonniers ouïghours dans la région du Xinjiang et daterait de 2018 ou 2019.
L'ambassadeur chinois s'est ensuite légèrement embrouillé dans ses déclarations. Pour expliquer qu'il n'y avait pas de «nettoyage ethnique» au Xinjiang, il a expliqué que la population avait plus que doublé en 40 ans en passant de 4 ou 5 millions à 11 millions, en omettant de préciser qu'il s'agissait de l'ensemble de la population et non de celle de la seule communauté ouïghoure.
Or, «selon les statistiques du gouvernement local de Xinjiang, l'augmentation de la population ouïghoure a diminué de 84% de 2015 à 2018», a répliqué le journaliste de la BBC. «Ce n'est pas vrai», a argué l'ambassadeur, sans répondre sur ce point.
Le 10 juillet, la Chine avait annoncé des représailles contre Washington, au lendemain de sanctions américaines contre plusieurs dirigeants chinois accusés de réprimer la minorité musulmane ouïghoure.
Dominic Raab a également indiqué qu'il informerait lundi les députés britanniques sur «les mesures supplémentaires» que le Royaume-Uni comptait prendre au sujet de Hongkong et sur les conclusions d'un examen du traité d'extradition avec le territoire. En ce sens, le Royaume-Uni a dénoncé comme une violation manifeste «de l'autonomie de Hongkong la loi sur la sécurité nationale imposée par la Chine à l'ancienne colonie britannique, qui prévoit d'y punir les activités séparatistes, 'terroristes', la subversion et les ingérences étrangères».
En réaction, Londres a déjà promis d'étendre les droits à l'immigration, et, à terme, l'accès à la citoyenneté britannique pour des millions d'habitants du territoire, une mesure dénoncée par Pékin comme une «ingérence grossière» dans ses affaires intérieures.
Le Figaro avec AFP