11-08-2020 15:51 - Lettre n°1 à la vénérable mère de Ghazouani. Par Pr ELY Mustapha

Lettre n°1 à la vénérable mère de Ghazouani. Par Pr ELY Mustapha

Pr ELY Mustapha - Chère mère,

Tenant ma promesse faîte ici même, je vous écris à propos des faits et actes de votre fils Mohamed ould Ghazouani dans le cadre de sa fonction de Président de la République. En effet, cette lettre qui ne sera que la première de plusieurs autres, se fonde sur le fait indéniable que vous êtes le témoin privilégié des engagements de Mohamed Cheikh ould Ghazouani.

Ce statut de témoin privilégié, que vous représentez je l’ai démontré dans mon article publié en Août 2019 et intitulé « De la mère en général. De la mère du Général. De la mère patrie en particulier » (https://mere-et-patrie.blogspot.com/2020/08/de-la-mere-en-general-de-la-mere-du.html ).

D’autre part, le 10 juillet 2020, j’avais informé votre honorable fils, notre président en cours, que si ses actes ne correspondent pas aux promesses qu’il a tenues devant le peuple mauritanien et devant vous, je vous écrirais à ce propos. Voir ce message au Président Ghazouani intitulé « Général Ghazouani, je le dirai à ta vénérable mère » (https://haut-et-fort.blogspot.com/2020/07/general-ghazouani-je-le-dirai-ta.html ).

Chère mère,

Sachant que le « Paradis est sous le talon des mères », celui de votre fils est sous le vôtre et le devenir de la mère-Patrie est entre ses mains. Vous comprenez donc que si je vous prends à témoin c’est pour le bien du peuple, ici-bas et pour le sien dans l’au-delà. Convaincu que le meilleur guide, même de ceux qui guident, ne peut être que le cœur d’une mère.

Aussi, je commencerai cette lettre, en vous informant que votre fils, notre président, a gagné quelques points dans l’opinion des défenseurs de l’indépendance des pouvoirs dans l’Etat, et que sa déclaration de ne s’ingérer ni dans les affaires du législatif, ni dans celles du judiciaire a été appréciée par ceux qui depuis longtemps réclament, ce statu quo de l’Exécutif.

Toutefois, en remaniant son gouvernement, il ne s’est pas posé la question : « qu’est-ce que la nouvelle équipe gouvernementale, va apporter au développement du pays que celle qui l’a précédée n’a pas pu faire, en un an ? »

Hélas ! La question de la valeur ajoutée gouvernementale, tant attendue a cédé la place à des arbitrages locaux, et moins à l’intérêt du pays.

Ainsi fut la reconduction de ministres qui, depuis des années, occupent une fonction et qui maintiennent le secteur dont ils ont la charge, dans un sous-développement et une médiocrité notoire… Il en est ainsi du secteur de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, qui est le plus carent de toute la planète, diplôme de complaisance, niveau médiocre, entrainant chômage et paralysie de tous les secteurs d’une économie à forte demande de compétences et de ressources humaines capables de prendre à bras-le-corps les défis du savoir et du savoir scientifique, technologique et industriel.

La médiocrité due à la qualité de l’enseignement, de son contenu et de sa dispense, a fait que le ministère de l’enseignement supérieur est responsable depuis des décennies du marasme économique et social du pays par son incapacité à fournir des compétences viables au services du développement.

Chômage, désespoir, tel est donc le lot des promotions du système éducatif mauritanien. A force de conserver des décideurs qui enfoncent l’enseignement supérieur et la recherche scientifique dans la médiocrité, le pays et se porte mal. Et il est déjà même probable que nos étudiants sentent déjà le poisson et confondent licence universitaire et licence de pêche.

N’est-ce pas votre fils, président, qui dans son discours électoral a bien dit :

« Je comprends l’attente légitime de nos familles qui se sont sacrifiées pour que leurs enfants obtiennent des diplômes pour pouvoir intégrer la vie active, et l’impatience de tous ceux qui, avec ou sans qualification, cherchent à travailler pour vivre dignement. Je partage pleinement leurs préoccupations et m’engage à leur apporter les solutions appropriées dans le cadre de mon programme. »

Le maintien au gouvernement de responsables qui n’ont pas fait leurs preuves, correspond-t-il à cet engagement solennel ?

Et comme vous le savez, vénérable mère, la promesse est une dette. Et Dieu recommande de souscrire à ses engagements.

Chère Mère,

Je ne sais pourquoi, Ghazouani, conserve des équipes ministérielles perdantes. On ne garde que celles qui gagnent, tout bon coach vous le dira. Et pourtant, votre fils, reprend les mêmes et recommence…. En bonne mère, vous le savez tout comme un bon médecin, qu’il est recommandé pour une bonne santé d’aérer le local dans lequel on s’enferme, dût-il être une présidence.

Mais, diriez-vous, pourquoi fait-il ça ?

Hélas ! il est Président, mais il doit aussi jouer avec les forces du moment. Ainsi, si des ministres traversent les gouvernements et dont le bilan est négatif et que le Président les conserve, à chaque remaniement, c’est soit qu’il n’y peut rien, soit qu’on les lui impose.

Car je ne crois pas qu’éduqué à la bonne foi, à l’intégrité morale et à la responsabilité vis-à-vis de celui pour lequel il gère les hauts intérêts, le Peuple, il puisse continuer à conserver des responsables qui lui portent préjudice.

Alors ? En fait, nos gouvernements africains font l’objet d’un « hacking » manifeste et la Mauritanie, elle-même n’y échappe pas.

Dans ces gouvernements certains des ministres, sont adossés à des « sympathies » externes, qui ne disent pas leur nom. « Sympathies », par lesquelles, ils perpétuent des intérêts de pays frères et amis dans la stratégie et l’action du gouvernement (dans l’enseignement supérieur, les affaires étrangères, l’éducation, l’économie etc.).

Ces pays frères et amis, le font savoir souvent de façon informelle, et conditionnent leurs bons rapports, leur aide et leur coopération au maintien de tel ou tel à un poste spécifique. Ainsi celui-ci, c’est « l’homme de la France », Celui-là c’est celui des saoudiens, celui-là des Emiratis, celui-ci …etc. Ceci vaut aussi pour les « poulains » des organisations financières et monétaires internationales.

Sinon, par exemple comment concevez-vous, que nous conservons des ministres carents et que l’on requiert même des ministres de régimes précédents, de l’autre bout du monde aux frais de la nation, pour occuper des postes-clefs, tel que le ministère de la Justice ? L’explication, n’est ni dans le cœur, ni dans la raison mais dans la compromission qui fait que l’on privilégie un équilibre d’intérêts limité dans le gouvernement aux intérêts supérieurs, ceux de la nation.

Ainsi, en tant que Président, votre fils, bien que militaire ne pourra pas prendre les armes contre cela. Il est forcément prisonnier de la compromission qui est l’essence même de la politique. Mais le peuple continuera à en souffrir.

Chère mère,

Vous qui avez été témoin privilégié des promesses solennelles de votre fils, ne l’avez-vous pas entendu, ce jour-là, dire haut et fort :

« Je sais que la pauvreté multidimensionnelle subsiste encore dans notre société malgré des efforts immenses pour l’éradiquer. »

Sa ferme volonté de combattre la pauvreté, aussi honorable soit-elle, n’est cependant pas, comme il doit la concevoir comme des aides, des dons et des soutiens éphémères aux pauvres, mais comme l’éradication de la véritable pauvreté, qui empêche toute richesse, celle de l’ignorance, du bigotisme et du fatalisme. La pauvreté de l’esprit.

Et pour combattre cette pauvreté, il faut que ceux-là mêmes qui président à son éradication dans tous les secteurs de leur portefeuille (Education, enseignement, science et culture), aient la capacité personnelle, scientifique, technique de le faire.

Les gouvernements en tourniquet, ne feront que tourner sur eux-mêmes et leur résultat restera, longtemps et toujours le tournis qu’ils impriment à un pays qui, sur le chemin du développement, a déjà perdu tous ses repères.

Chère mère,

Je ne saurai terminer cette lettre, qui n’est que la première de bien d’autres, sans vous demander, avec le même chapelet, que vous aviez le jour où votre fils fit ses promesses, de réciter pour ce pays, autant de fois que votre vénérable personne le pourra, les saints versets du Siège pour exorciser la mal gouvernance qui ronge l’esprit des décideurs de ce pays et de demander à Dieu, d’aider votre fils à tenir ses promesses face à ces décideurs.

Avec les respects dus à votre vénérable personne.

Pr ELY Mustapha



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Commentaires (3)

  • CLNMYN (H) 12/08/2020 13:17 X

    Lemrabott Ould Bennahi a eu sa gratification suite a l’enquête de ces dix dernières années du pouvoir de mohamed abdel aziz

  • nabuchodonosor (H) 12/08/2020 00:45 X

    Le choix des Ministres doit être motivé uniquement par la compétence et la capacité à réaliser les engagements electéraux du Président élu. L'enseignement supérieur jouit d'un bilan plutôt positif malgré les critiques de certains lobbies nationalistes et salafistes. Pour être plus objectifs, il convient de faire deux évaluations: la première à mi-parcours du mandat (en 2022) et la deuxième en fin de mandat (en 2024). On pourra alors comparer de manière sereine les réalisations et les echecs. D'ici là chacun est libre d'y aller avec ses sentiments

  • Marrakech (F) 11/08/2020 16:15 X

    Je ne comprends pas cette volonté de procéder à un soi disant équilibrage ethnique dans le choix des membres du gouvernement : un ministre harratine ou beydane ou soninké va t-il favoriser sa communauté d'origine ? Est-ce cela que l'on souhaite ? Le seul impératif est que, dans ce gouvernement, chaque ministre ait à coeur de servir l'intérêt national et ce qui est important ! Certains ministres n'ont été désignés que par qu'ils appartiennent à telle ou telle famille, telle ou telle ethnie et ils sont notoirement incompétents, sans idée, sans projet sauf celui de garder son poste le plus longtemps possible ... Il faut dépasser ces clivages qui sont un blocage, la Mauritanie reste enkystée dans des querelles intestines minables et interminables souvent exacerbées par le pouvoir en place car il faut "diviser pour régner" si l'on se réfère à Machiavel. L'examen critique des années Aziz est un premier pas mais il n'est pas suffisant. Le départ d'Aziz n'a résolu aucun problème, il faut cesser ces atermoiement, se mettre réellement au travail et affronter courageusement les vrais problèmes de la Mauritanie sans les nier ou les amoindrir : l'esclavage, l'éducation nationale, la répartition des richesses, l'accès à l'eau potable, la politique sociale et sanitaire, la démocratie,...