12-08-2020 22:00 - Libre opinion/radioscopie d’un chef d’état : Ould Ghazouani....

Chighali Mohamed - Ould El Ghazouani a donc renouvelé la confiance à certains éléments
de l’Equipe de Ould Cheikh Sidiya et s’est séparé de ceux dont les
noms ont été cités dans des affaires ou des dossiers soumis à
l’enquête de la commission parlementaire qui a rendue ses conclusions.
Comme beaucoup s’y attendaient le président, « muet » mais pas sourd
et pas aveugle s’est « débarrassé » de tous ceux qui sont, selon le
rapport de la commission parlementaire mêlés de près ou de loin aux
dossiers dit de « gabegie ».
Je disais dans un article précédent que le président Ould Ghazouani
dirige le pays inspiré de la prudence du caméléon.
En effet depuis
qu’il est arrivé au pouvoir, le président pris au piège dans des
difficultés inimaginables héritées d’une gestion catastrophique de
dix ans qui ont détruit le socle de l’économie, bradé le patrimoine
foncier, et instauré une tradition de corruption à tous les niveaux de
l’état avance lentement et surement. Pour sortir de cette situation
inconfortable il s’est donc inspiré de la prudence du caméléon.
Le caméléon est un reptile. Il ne se déplace généralement que
lorsqu’il se sent hors de danger. Cet animal a la faculté de changer
de couleur pour se confondre à son environnement. Il avance lentement
en s’assurant qu’il pose la patte bien au bon endroit.
Mais avant de
soulever sa patte, il s’agrippe fortement à la branche par ses
trois autres pattes. Dans cette position, par précaution
supplémentaire il roule sa queue autour de la branche.
Avant de se
déplacer, il regarde tout autour de lui. Ses yeux sont indépendants
l’un de l’autre. Ils peuvent faire des balayages de 380 degrés, chacun
indépendamment de l’autre et en sens inverses.
Il n’avance que si
tous les paramètres lui confirment la possibilité de progresser. Son
arme de défense est redoutable mais il ne l’utilise que s’il est
attaqué par surprise. Il crache alors un liquide qui neutralise son
agresseur.
Inspiré de cet animal mystique, dont la peau, les os et la chair
sont par ailleurs des remèdes en médecine traditionnelle, Ould
Ghazouani est allé lentement et surement pour apporter un soin
palliatif au mal de notre société.
Lentement, surement et une seule chose à la fois.
Arrivé au pouvoir, Ould El Ghazouani a tout d’abord nettoyé
l’environnement dans lequel il allait évoluer. Histoire de commencer
par le commencement. Il a donc « désinfecté » le Basep.
Ensuite il a
mis en place un gouvernement formé sur la base d’éléments hérités de
l’ancien régime ajoutés à de nouveaux venus. Mais « le choix » porté
sur les ministres hérités de l’ancien n’a pas été faite de manière
fortuite.
Ghazouani a gardé volontairement des éléments essentiels
qui lui étaient utiles pour jeter un regard dans le rétroviseur de son
prédécesseur. Calcul d’intérêt intelligent.
Sa décision de garder ces responsables visés par des enquêtes a été
très critiquée. Mais le président avait agi surtout pour « presser les
citrons ». Mis en confiance, ces responsables ont « coopéré ».
Ce
qui signifie qu’ils ont « contribué » à mieux faire connaitre par des
« déclarations » devant témoins, –les ministres en conseils-, les
contours de certaines questions « ambigües » de la gestion passée,
relatives notamment à la pêche, l’énergie, et l’habitat.
Comme par minuterie, le nouveau président a réglé les événements
qui se sont succédés en sorte qu’ils aboutissent à cette journée
fatidique du 09 août 2020 qui a séparé les « graines de l’ivraie ».
L’Exécutif ne s’interfère pas dans le travail de la commission parlementaire.
« L’Exécutif ne s’interfère pas dans le travail de la commission
parlementaire. » Cette phrase du président s’ajoute à une autre qu’il
a prononcée au cours de la conférence de presse discriminée accordée
seulement à certains de nos confrères.
Répondant à une question
relative à l’impartialité de l’exécutif, il avait dit : « … je ne
suis pas le parquet. Le parquet est une institution qui dépend du
pouvoir judicaire qui lui est souverain.
Ce que je puis vous
assurer, c’est que je n’essayerais d’aucune manière d’entraver le
travail du parlement ou celui de l’autorité judiciaire. Mon rôle est
plutôt celui d’essayer de renforcer et d’appuyer leur indépendance.
Je crois que l’exécutif lui a un autre rôle et il doit le jouer. Et on
doit essayer de contribuer à faire jouer l’autorité de ces
pouvoirs qui sont souverains et indépendants.
Le rôle de chacun doit
contribuer à nous habituer d’être dans « un jeu » qui correspond à ce
qui doit être dans toute démocratie. »
Histoire de sortir d’un environnement malsain et puant.
Le président de la République, l’a répété plus tard à un des proches
du président Ould Abdel Aziz : « l’exécutif n’influera pas sur le
travail de la commission ». Pas parce que le président se dérobe
devant ses responsabilités d’ami des « uns » et des « autres » de sa
mouvance, mais pour se disculper et éviter de s’ingérer dans une
tourmente qui n’est en fait –on s’est est rendu compte- qu’une
affaire d’un cercle fermé de très proches de l’ancien président qui
ont mis à mal tout le pays.
Gardien de la constitution et des
valeurs républicaines, le nouveau chef de l’état nous envoie donc un
message clair. L’exécutif qui est « dans un autre rôle » concède
désormais au pouvoir judiciaire son entière indépendance.
Propos réconfortants de la part d’un chef d’état qui, aux élections
qui l’ont porté au pouvoir, avait fait le consensus de tous ceux qui
pillaient le pays.
Ces « gros bonnets » aux cols blancs s’étaient
investis financièrement et physiquement pour le porter au pouvoir,
croyant à ce que disait Ould Abdel Aziz dans sa campagne de soutien :
« Ould Ghazouani sera le prolongement de mon programme qui n’a pas été
achevé ».
Une fois encore Ould Abdel Aziz, doté d’une faculté de
glisser entre tous comme une anguille, avait semé le doute dans les
esprits de « ses complices » et des « moufsidines » qui avaient
compris par « prolongement de mon programme », la poursuite par Ould
El Ghazouani de la gabegie, de la corruption et du détournement des
deniers publics.
Aujourd’hui, avec la mise en place d’une nouvelle équipe
gouvernementale, et aussi avec son éloignement de tous ceux qui sont
aux yeux des citoyens du pays la cause du mal, Ould Ghazouani se
dédouane et donne une preuve concrète et sans ambiguïté qu’il se
retire d’un cercle dans lequel il a évolué entrainé par son passif
d’officier militaire « incontournable ».
Certains pensaient que la mise en place de la commission d’enquête
parlementaire n’était qu’une chasse à l’homme « ciblée » lancée
pour franchir les barrières des systèmes de défenses empêchant
d’atteindre Mohamed Ould Abdel Aziz l’ancien président de la
République qui, par des coups bas avait déclaré la guerre à son ami
de longues dates, le seul qui pouvait hélas lui éviter le choc
violent qu’il ressent à présent.
233 engagements pris. Promesse difficile à tenir avant 2029.
Maintenant, tous les mauritaniens dans leurs diversités, dans leurs
différences politiques et sociales, toutes tendances confondues,
commencent à croire à l’homme élu «parait-il » par des vols de
consciences, des fraudes, et l’injection de milliards dans une
campagne orchestrée par des hommes d’affaires dans le seul but et
l’espoir de le voir « prolonger » cette distribution inéquitable de
richesses qui ne profitait qu’à un cercle fermé. Comme on le voit, le
temps a rattrapé tous ceux qui s’étaient trompés de calculs.
Solidairement ou individuellement les voilà qui font face à une
justice à laquelle l’exécutif accorde toute son indépendance.
Mais
encore plus grave pour eux, ces pilleurs en séries et en bandes
organisées font face comme on le voit à la rage de tous les citoyens
d’un pays saigné mortellement dans son économie et sa souveraineté.
Dans son livre vert, -(dont je me sépare jamais d’une copie pour
suivre le président à la trace), Ould El Ghazouani a pris 233
engagements devant l’histoire, devant le peuple et prenant à témoin
sa mère, une sage religieuse qui lui donné son éducation honnête,
pieuse et morale. C’est à cette tâche qu’il se livre par des
manœuvres très difficiles.
Coincé entre un héritage économique et financier malade, une
opposition qui hésite à lui faire entièrement confiance, un peuple qui
attend tout et tout de suite, Ould Ghazouani qui s’inspire de la
prudence du caméléon va poursuivre son chemin en évitant de tomber
dans les pièges d’un système dont les éléments sont de véritables
reptiles venimeux adaptables à l’environnement de tout pillage et
toute gabegie qui leur est favorable.
Mais -je crois-, qu’ils
feraient mieux de se résigner et d’essayer de comprendre que
l’environnement dans lequel ils évoluaient jusqu’ici, ould El
Ghazouani s’en est éloigné par des actes posés qui vont plutôt dans
le sens de l’intérêt de tous les citoyens de ce pays.
Les vacances se terminent donc pour beaucoup. Et peut être même pour
Ould Abdel Aziz, celui qui a régné onze ans en maitre incontesté sur
ce pays en vendant pour « s’acheter » dans les activités d’une
entreprise familiale à capital « illimité » dont le siège social
avait été élu au palais « du peuple ».
Mohamed Chighali
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