24-04-2023 14:30 - Des titres insidieux dénués de tout rapport avec les dépositions des comparants

Des titres insidieux dénués de tout rapport avec les dépositions des comparants

« L’arnaque pour la construction d’une usine de montage des avions qui n’a jamais vu le jour », «Brahim ould Gadda : « J’ai reçu de Mohamed ould Abdel Aziz 7 milliards à majorité de l’euro et du dollar » ; « Les enfants de ould Msabou ont étudié à Paris aux frais de la société » ; « Hassana ould Ely regrette de ne pas avoir licencié ould M’sabou ».

Tous ces titres sont suggestifs ; ils tendent à mystifier l’opinion publique nationale et internationale, à influencer le cours de la justice au détriment de l’ancien président de la république, en faisant pression sur des juges bien mal en point devant un dossier dont le caractère politique ne cesse de s’étaler au grand jour.

Ce sont des titres qui altèrent, dénaturent volontairement et à dessein la teneur des dépositions des déclarants auxquelles ils renvoient, mais dont les auteurs souhaitent voir le lecteur adhérer au contenu par la technique de suggestion.

Prenons la déposition de l’ancien ministre Hassana ould Ely :

Entendu sur la vente du gisement de Fdérik, l’ancien ministre Hassana s’est d’emblée exclamé : « Les ventes de gisements sont plus compliquées qu’on ne le pense ! » avant de conclure après un exposé détaillé des circonstances factuelles qu’il n’y a jamais eu vente du gisement en question.

Poursuivant sa déposition, l’ancien ministre allait déclarer qu’en ce qui concerne les avions en kit, les parties ont constitué une joint-venture qui est restée lettre morte, le partenaire étranger ayant retiré sa quotité légale du capital souscrit qui lui a été restituée par la banque domiciliataire.

Toujours concernant les avions en kit, l’ancien ministre s’est largement étendu sur diverses anomalies constatées lors des différentes rencontres avec le partenaire étranger, qui l’ont amené à douter de son honnêteté, et l’ont conduit à mettre fin à toute relation avec celui-ci, avant de conclure en substance que l’achat des avions en kit est resté un projet mort-né.

L’ancien ministre Hassana a de surcroît levé le voile sur les bourses allouées aux petits enfants de l’ancien président , en précisant qu’il était d’usage que la SNIM accordât des bourses aux enfants des employés parmi lesquels figurait le beau-fils de l’ancien président, monsieur Msabou ; que d’ailleurs un budget de 500.000.000 d’ouguiyas (anciens) était annuellement affecté à cet effet depuis la création de la MIFERMA, ancêtre de la SNIM, et que cette pratique ne s’est jamais démentie ; il reste à préciser que monsieur Msabou était expatrié, et le seul parmi les expatriés à être père d’enfants en âge d’être scolarisés, qu’en outre le montant litigieux en ce qui le concerne portait sur la somme dérisoire de 2700 euros. Tout ça pour ça !

L’ancien ministre apportera une précision de taille, affirmant que monsieur Msabou n’a jamais figuré parmi les prestataires de la SNIM, en martelant : « la SNIM ne traite pas avec des intermédiaires, vend à ses prix et pose ses conditions à ses clients ».

Il serait sans doute édifiant pour l’opinion nationale et internationale de revenir sur le témoignage du général à la retraite monsieur Ahmed ould Bekrine, alors directeur de la sûreté nationale, lorsqu’il reçût la visite d’une délégation du ministère de l’habitat l’informant qu’une partie du terrain abritant l’école de police, terrain faisant partie du domaine privé de l’Etat, allait faire l’objet d’une cession, et qu’il en a été informé par l’ancien président à la suite d’un appel téléphonique.

Qu’il y a-t-il de répréhensible dans le fait qu’un bien relevant du domaine privé de l’Etat fasse l’objet d’une cession à des personnes physiques ou morales ? Rien dans la loi ne s’y oppose, ni en Mauritanie, ni ailleurs ; ici comme ailleurs, la gestion du domaine foncier de l’Etat comprend entre autres, la gestion des concessions et cessions du domaine privé de l’Etat dont le terrain abritant l’école de police fait partie.

Le patrimoine immobilier de l’Etat n’est ni plus ni moins qu’un actif que l’on gère comme tous les actifs ; il se vend, s’échange, se loue, s’hypothèque en cas de besoin, se cède et se concède sous certaines conditions.

La cession par l’Etat d’un de ses actifs immobiliers est une opération si courante qui n’offusque qu’en Mauritanie, alors que dans tous les pays du monde, et chaque jour que Dieu fait, les Etats cèdent en milliards de dollars certains de leurs actifs immobiliers, en donnent d’autres à bail emphytéotique, procèdent à des échanges……..etc.

En l’espèce, le terrain de l’école de police relevant du domaine privé de l’Etat, point n’est besoin d’une procédure de déclassement comme le soutiennent certains ; la vente s’opère par adjudication publique ; cette vente peut s’opérer par le service des domaines ou sous la supervision du ministre des finances, au-delà d’une certaine superficie. Interrogé sur le caractère légal de l’opération , le général est resté droit dans ses bottes, en déclarant qu’il ne lui appartenait pas d’en apprécier la légalité, encore moins l’opportunité, mais que selon son entendement, les autorités concernées avaient sans doute pris les mesures à cet effet. Cela a le mérite de la clarté !

Quant à l’échange téléphonique rapporté comme ayant eu lieu à ce propos entre l’ancien président de la république, en sa qualité de chef suprême des forces armées, et le général en sa qualité de directeur de la sûreté nationale, il ne constitue en soi ni un délit, ni un crime.

Revenons à la déposition de monsieur Brahim ould Gadda ; l’article qui l’a abordée omet à dessein de préciser que dans sa déclaration, l’intéressé a décrit ses relations avec l’ancien président de la république comme teintées d’animosité, tout en admettant qu’elles n’ont jamais concerné un quelconque marché public ; qu’il avait été discriminé sous la législature de l’ancien président, subissant de plein fouet une concurrence déloyale de la part de certains opérateurs économiques nationaux alors que lui, disposait de financements internationaux en toute transparence qu’ils rapatriaient et injectaient au profit de l’emploi en Mauritanie comme pour flatter son égo de patriote.

Par la suite , monsieur Brahim ould Gadda , donnant libre cours à sa pensée sur la discrimination dont il faisait l’objet sous la législature de l’ancien président de la république, en vînt à décrire comment il avait été amené à acheter pour le commissariat à la sécurité alimentaire des quantités astronomiques de denrées alimentaires dont la qualité a été déclassée au débarquement pour justifier la non-exécution par l’acheteur du contrat de vente, ce qui l’obligeât à faire des dépenses supplémentaires en produits de conservation (fumigation), avant de se résigner à vendre la marchandise à la fondation de la SNIM pour un prix dérisoire.

Monsieur Brahim ould Gadda a reconnu que depuis 2009 jusqu’en 2019, il a reçu des montants de provenances diverses pour le financement des campagnes à caractère politique de l’ancien président et collectait à ce titre les montants affectés à ces campagnes.

Monsieur Brahim ould Gadda n’a pas non plus nié qu’il avait été privé de sa liberté lors de l’enquête préliminaire, ce qui laisse entendre que ses déclarations lors de cette enquête dont il ne faisait que rapporter fidèlement la teneur devant la cour criminelle, avaient été extorquées.

Une telle déposition ne saurait valoir un témoignage probant, du fait même de l’animosité de son auteur à l’encontre du prévenu, et aussi du fait qu’elle est extorquée par la contrainte.

Que vaut une déposition faite sous la contrainte et l’animosité envers le prévenu ?

Quant à l’audition de monsieur Kharchy, elle a dévoilé que la seule relation entre lui et l’ancien président a consisté pour le premier à promettre au second la vente d’un immeuble ; par la suite monsieur Kharchy s’est rétracté en renonçant à la vente, et il a présenté à la cour le titre foncier attestant sa propriété de l’immeuble en question qui n’a jamais fait l’objet d’un quelconque acte translatif de propriété.

C’est le lieu ici de préciser qu’un titre foncier est une présomption irréfragable de la propriété du terrain par le titulaire du titre ; dès lors, on peut s’interroger sur le doute entretenu dans l’esprit de la cour sur le droit de propriété de monsieur Kharchy pour qu’elle en vienne à le remettre en cause; si les mentions d’un titre foncier peuvent être remises en cause sans égard pour les droits du propriétaire tels qu’‘ils apparaissent à travers le bordereau analytique, cela veut dire que plus personne ne devrait se sentir en sécurité dans ses biens et son patrimoine immobiliers.

Il n’est point besoin de revenir sur la déposition de l’ancien ministre de l’éducation qui n’a fait que rapporter son opinion sur la cession des écoles, ce qui en soi ne saurait s’élever au rang de témoignage, car le témoin doit rapporter des faits, et non se limiter à émettre son opinion personnelle, son sentiment sur ses faits ; être pour ou contre ne contribue en rien à l’éclairage de la justice.

Interrogé sur la question de savoir si la cession envisagée lui semblait légale, il a répondu que cela relevait du ressort du ministre des finances.

*Avocat à la Cour

*Ancien membre du conseil de l’ordre.

Par maître Taleb Khyar ould Mohamed Mouloud.*





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