25-06-2024 07:00 - La diabolisation comme arme de destruction politique

La diabolisation comme arme de destruction politique

Onde Info - On entend ici et là, que le candidat à la présidentielle de juin, Biram Dah Abeid ne peut pas diriger la Mauritanie. On lui reproche de tenir un discours extrémiste, violent, pourfendeur et dézingueur qui détruit tout, y compris de l’unité nationale.

Ce sont ces mêmes personnes qui ont diabolisé des années durant, le leader charismatique de la cause négro mauritanienne, Samba Thiam en le taxant de raciste, d’anti Beydane pour le rendre épouvantable et infréquentable.

Idem pour Ibrahima Moctar SARR de l’AJDM/R parce que, lui aussi, a toujours su trouver les mots justes, adéquats et appropriés mais acerbes pour qualifier le système, pour le décrire, le décrypter et le mettre à nu sans complaisance. Les maux ont peur des mots. La dénonciation finira toujours par vaincre l’injustice et la dictature.

Dans une histoire récente, de l’autre côté du fleuve aussi, on a vu des gens de la même espèce tenir les mêmes propos contre les leaders du Pastef, en l’occurrence Ousmane Sonko, le qualifiant d’extrémiste, dangereux pour le Sénégal. Incapable de diriger ce pays au risque de le conduire vers le chaos.

En dépit de tout ce qu’on a dit d’Ousmane Sonko et du Pastef, les Sénégalais ont résisté en refusant de se faire manipuler. La page, Macky SALL et ses acolytes est tournée de la plus belle des manières par les urnes : l’alternance dans sa forme la plus achevée et complète. La rupture est désormais effective avec à la clé un changement générationnel, un nouveau Sénégal est en gestation.

En vérité, ceux qui tiennent de tels propos, ici et ailleurs, ont quelque chose en commun. Ils sont soit au pouvoir, proches du pouvoir ou bénéficient des avantages du pouvoir (du système) qu’ils entendent préserver à tout prix, y compris par la diabolisation, la mystification, la calomnie, la manipulation…

Quant aux victimes de ces campagnes obscènes et diffamatoires, elles présentent généralement les mêmes similitudes : elles s’opposent à un système mafieux, à un pouvoir discrédité, souvent à la dérive, et qui entend éliminer par toutes sortes de méthodes déloyales et anti démocratique ses adversaires.

Ainsi, les véritables challengers sont traqués, combattus, souvent par « la main représailles » du pouvoir : les forces de défense et de sécurité. Et comme ces genres de pouvoirs ont pour slogan et morale » la fin justifie les moyens « , ils mettent en branle toutes sortes de stratégies, de plans machiavéliques et macabres pour arriver à leurs fins.

Il ressort de ces deux exemples que pour déboulonner un système politique arbitraire, discriminatoire, autocratique et inique, il faut des mots forts, un discours virulent.

Une telle attitude est une réponse à la violence et ne saurait être considérée comme de la violence. Il n’y a pas plus de violence que les violences policières, l’usage disproportionné des grenades lacrymogènes etc. Quid de la corruption qui compromet l’avenir des générations futures en contribuant grandement à la paupérisation.

Il n’y a pas plus violent qu’un système politique mafieux qui détruit et exclut systématiquement tous ceux qui ne sont pas du sérail, du clan, du cercle fermé, un univers constitué exclusivement de quelques privilégiés, qui sont aux commandes du pays depuis l’indépendance.

Si bien que l’égalité des chances n’est qu’un vain mot. L’école ne sert plus à grand-chose. D’ailleurs, elle a cessé d’être un ascenseur social depuis qu’elle a été décrétée Républicaine. Les diplômes, la compétence et les études ne sont plus considérés comme des vecteurs de réussite sociale. Il vaut mieux décliner le nom de son père, son patronyme : Ould Velanne, de telle tribu…

Pour briser ce système oligarchique (militaro-féodalo- tribalo-raciste), une telle véritable machine à fabriquer les inégalités, la corruption, les injustices de toutes sortes, en contradiction avec l’Etat de droit, la république, la démocratie et de l’islam, il va bien falloir « dégainer » des mots forts, des « missiles » en dénonçant avec force et vigueur.

Dans cet exercice de diabolisation, on joue sur les peurs et elle prend toutes les formes. On va fouiller dans les origines sociales, familiales, dans le parcours scolaire, académique où professionnel de l’opposant pour chercher la petite bête. Si tout est clean. C’est rarement le cas d’ailleurs, en effet qui cherche finira toujours par trouver.

Ainsi, vous conviendrez avec moi, que Biram est victime d’un faux procès du genre : « il va déstabiliser le pays, il va le vendre au diable, il n’a point d’expériences dans la gestion de État » etc. Cependant, en dépit des nombreuses campagnes de déstabilisation, de coups bas, et toutes sortes de stratégies utilisées, depuis l’ère Mohamed Ould Abdel Aziz pour éliminer l’homme, il résiste vaillamment.

Et comme requinqué plus que jamais, il donne du fil à retordre au pouvoir en créant une situation inédite dans le pays où la réélection du président sortant fait douter plus d’un.

A mesure qu’on s’approche du scrutin du 29 juin, le scepticisme est de mise quant à la victoire du pouvoir ; à en croire les échos de la campagne et la mobilisation des citoyens plutôt favorables au changement, à la mise à mort du système politique en place depuis plusieurs décennies.

Mais, en Afrique, l’issue d’une élection est toujours mystérieuse. Que d’acteurs visibles mais surtout invisibles interagissent pour faire basculer le suffrage des électeurs du côté qu’ils n’ont souvent pas choisi. La sécurisation des votes est dès lors essentielle et constitue tout l’enjeu de cette présidentielle.

Seyré SIDIBE



Les articles, commentaires et propos sont la propriété de leur(s) auteur(s) et n'engagent que leur avis, opinion et responsabilité


Source : Onde Info
Commentaires : 3
Lus : 1449

Postez un commentaire

Charte des commentaires

A lire avant de commenter! Quelques dispositions pour rendre les débats passionnants sur Cridem :

Commentez pour enrichir : Le but des commentaires est d'instaurer des échanges enrichissants à partir des articles publiés sur Cridem.

Respectez vos interlocuteurs : Pour assurer des débats de qualité, un maître-mot: le respect des participants. Donnez à chacun le droit d'être en désaccord avec vous. Appuyez vos réponses sur des faits et des arguments, non sur des invectives.

Contenus illicites : Le contenu des commentaires ne doit pas contrevenir aux lois et réglementations en vigueur. Sont notamment illicites les propos racistes ou antisémites, diffamatoires ou injurieux, divulguant des informations relatives à la vie privée d'une personne, utilisant des oeuvres protégées par les droits d'auteur (textes, photos, vidéos...).

Cridem se réserve le droit de ne pas valider tout commentaire susceptible de contrevenir à la loi, ainsi que tout commentaire hors-sujet, promotionnel ou grossier. Merci pour votre participation à Cridem!

Les commentaires et propos sont la propriété de leur(s) auteur(s) et n'engagent que leur avis, opinion et responsabilité.

Identification

Pour poster un commentaire il faut être membre .

Si vous avez déjà un accès membre .
Veuillez vous identifier sur la page d'accueil en haut à droite dans la partie IDENTIFICATION ou bien Cliquez ICI .

Vous n'êtes pas membre . Vous pouvez vous enregistrer gratuitement en Cliquant ICI .

En étant membre vous accèderez à TOUS les espaces de CRIDEM sans aucune restriction .

Commentaires (3)

  • ahznar (H) 25/06/2024 14:14 X

    Vous avez touché du doigt là où il fait mal. En effet on se rend compte quand le climat politico social est en pleine ébullition certains politiques ont toujours du mal à agir dans les limites de l'acceptable à savoir attaquer en règle les lois discriminatoires et s'opposer fermement à l'injustice,à la corruption,au racisme et à l'esclavagisme (toujours actuel) Comme semble vouloir le démontrer la population actuelle en particulier la jeunesse - à l'image des autres continents-l'élégance démocratique s'entend d'abord sous l'angle d'un comportement républicain vertueux,d'une attitude citoyenne responsable et d'un échange de propos contradictoires mais respectueux. Le cas du Senegal que vous avez cité par ailleurs hautement apprecié aux quatre coins du monde est à la fois une leçon à apprendre et pour l'afrique et pour le Maghreb. Le plus desolant c'est de constater combien des soit disant opposants depuis des decennies crachent sur Abeid pour... bien sûr recevoir la recompense attendue !! Ainsi va le pays des milles et un poetes.

  • abdoull (H) 25/06/2024 08:25 X

    voilà en quelques mots, le vrai visage de la Mauritanie. c'est une analyse brève qui touche exactement là ou il fait mal dans ce pays.

  • pyranha (H) 25/06/2024 08:22 X

    Comme toujours analyse parfaite menée par un professionnel. Le Senegal et la Rim étant voisins étroits il faudrait effectivement que des points communs apparaisdent.D'ailleurs n'eut été la facilité de diviser les citoyens Mauritaniens par le pouvoir , ce mm pouvoir aurait disparu depuis longtemps.merci Sidibe aux analyses très pointues.