14-05-2025 11:11 - Dans un live Abderrahmane Weddady tire la sonnette d’alarme sur les réseaux de trafic en Mauritanie

Shems Maarif - Plusieurs mois après avoir fait sensation en évoquant une mystérieuse « Mendoza » lors d’une sortie médiatique en octobre 2024, l’activiste et chroniqueur Abderrahmane Weddady est réapparu ce mardi dans un live très attendu.
Lors de cette intervention, il a choisi de briser un long silence, invoquant « la force de l’État à laquelle il ne pouvait rien faire », avant d’aborder, sans détour, ce qu’il considère comme un des dossiers les plus graves et les plus sensibles du moment.
Selon Weddady, plusieurs sources convergentes – tant officielles que médiatiques – font état de l’existence de réseaux de trafiquants opérant sur le territoire national.
Il évoque notamment une alerte donnée par un pays ami, qui aurait signalé à la Mauritanie la présence d’un réseau de trafic de drogue actif sur son sol. Cette alerte aurait conduit à une série d’opérations qui ont permis de démanteler plusieurs groupes, également impliqués dans le trafic de faux billets.
Mais pour Weddady, l’un des volets les plus alarmants concerne le trafic de faux médicaments, découvert dans des entrepôts. « Ce ne sont pas de simples médicaments dissimulés, mais bien des faux médicaments. La manière dont ils étaient cachés en est la preuve », a-t-il déclaré, affirmant que ces substances représentent un danger bien plus insidieux que les drogues classiques.
Il a révélé qu’un pot-de-vin d’un milliard d’anciennes ouguiyas aurait été proposé à des agents de l’État pour étouffer l’affaire, ce qu’il considère comme une confirmation de l’ampleur du scandale.
« Le faux médicament tue plus que la drogue »
Dans une comparaison saisissante, Weddady a expliqué qu’il existe une différence morale entre un consommateur de drogue – qui agit en connaissance de cause – et un patient qui, en toute bonne foi, achète un médicament pour se soigner. « Ce dernier ne sait pas qu’il est en train d’aggraver son état. Cela rend les vendeurs de faux médicaments encore plus coupables que les trafiquants de stupéfiants », a-t-il martelé.
Il a dénoncé l’existence de réseaux bien organisés, aux profits colossaux : un faux médicament pour le cœur vendu 1500 MRO ne coûterait que 200 MRO à produire, dégageant une marge de 1300 MRO par plaquette. « Avec de tels bénéfices, corrompre un inspecteur devient un jeu d’enfant », a-t-il souligné.
Weddady a longuement abordé la question des produits psychotropes, qu’il lie directement à la montée de la criminalité dans le pays. Il cite un haut responsable de la police qui lui aurait confié que « dans chaque crime majeur, l’auteur était sous l’effet de ces produits ».
Le Tramadol, en particulier, serait devenu rare en pharmacie et prisé dans les rues. Ces substances, selon lui, transforment lentement mais sûrement les comportements des consommateurs jusqu’à un point de non-retour. « Tant que ces produits circulent, les crimes ne feront qu’augmenter », avertit-il.
L’activiste a fustigé la banalisation du scandale par certains cercles et le manque de suites judiciaires dans de nombreuses affaires de trafic. Il cite les exemples de l’avion de Nouadhibou, du bus intercepté à Nouakchott, et d’autres dossiers sensibles dont les principaux suspects n’ont jamais été inquiétés.
Il a également évoqué le climat d’injustice ressenti par la population lorsque les auteurs présumés de ces crimes sont libérés. « Des voix se sont élevées pour dire que les fonctionnaires qui ont refusé le pot-de-vin ont perdu, car les criminels seront libérés. C’est faux. Ces agents ont fait preuve de patriotisme », a-t-il répliqué.
Abderrahmane Weddady met en garde contre une perte de confiance dans les institutions si des sanctions exemplaires ne sont pas prononcées. « Laisser ces trafiquants en liberté, c’est envoyer un message aux jeunes : inutile d’étudier, le vrai modèle, c’est celui qui s’enrichit vite en vendant du poison », déplore-t-il.
Il a évoqué les exemples du Salvador ou de la Guinée équatoriale où les bandes criminelles, devenues trop puissantes, « paient tout, y compris les institutions ». Une situation qu’il appelle à éviter à tout prix en Mauritanie.
En fin d’intervention, Weddady a élargi son propos à la sphère politique, soulignant le manque de partis structurés capables de canaliser les revendications populaires. « L’absence de partis politiques forts affaiblit la démocratie et renforce les risques d’instabilité », a-t-il déclaré, citant les exemples de la Syrie et de l’Égypte.
Il a conclu en évoquant les élans de solidarité qui ont marqué certains drames récents, comme la mort de Soufi Ould Cheine et Oumar Diop, comme des signes d’une société civile encore vivante et vigilante.
Shemmaarif.info