05-07-2014 17:02 - Toile de fond. La chronique hebdo de Cridem : Quand Aziz fait la 'une' ailleurs.
En accordant sa première interview à la presse internationale dans les colonnes de l’hebdomadaire Jeune Afrique, au détriment de la nationale, le président Mohamed Ould Abdel Aziz a appliqué la méthode de ses vieux prédécesseurs du continent qui éprouvaient une sorte de délectation à faire la une des journaux occidentaux.
Cette presse occidentale nous l’avons tous remarqué en Mauritanie n’a pas concédé à l’élection présidentielle toute la « fougue » de la presse nationale qui elle a eu le mérite de couvrir tout son parcours, à commencer par ses fameuses « rencontres avec la jeunesse ». Lui-même avait un journal de campagne.
C’est donc dire que la presse locale qui véhicule une information de proximité est mieux lue où suivie que celle dite internationale parce qu’épousant la diversité des profils intellectuels d’un lectorat qui est concerné au premier chef ; le mauritanien.
C’est une commodité qui saute aux yeux. Aussi, lui accorder la primeur allait être une innovation qui l’éloignerait de la politique des boules puantes dans une Afrique mûre où l’opinion publique a totalement changé.
Le président dans son interview à Jeune Afrique fait tomber le masque sur le terrorisme, « nous avons stoppé la menace djihadiste ». Comment ? Il en a certainement la réponse mais rien ne semble encore calme dans ce vaste No man’s land qu’est le sahel, même si les garanties du président étaient relatives à son pays.
Toutefois dans ce contexte actuel caractérisé par une volonté de rupture, il aurait pu attendre sa réélection du 2 Août prochain pour faire une large sortie à l’internationale avec les nombreux invités qui feront certainement le déplacement sur Nouakchott.
Désormais, on peut voir que les urgences des organes internationaux sont ailleurs pendant que son deuxième mandat lui continue à faire les choux gras de la presse de son pays.
Le journal auquel il a accordé la une est connu pour une certaine vision du continent africain qui s’accommode d’intérêts, sous le couvert de la libre circulation des pensées et des opinions, il peut avec génie, soutenir un régime ou un homme d’Etat par sa capacité à briller dans l’art du faire –savoir en faisant savoir le faux et occulter le vrai à travers des interviews et autres dossiers qui font confondre l’information, l’analyse et le dirigisme de la pensée.
Promu président de l’Union Africaine, il n’a pas vu cet organe lui tendre le micro sur des questions aussi brulantes que celles qui secouent le sahel, lui qui pourtant semble montrer que sa présence est un pré requis nécessaire à la stabilité de la zone. Certes, l’hebdomadaire continental reste un grand journal et peut apporter à un dirigeant un soutien intelligent dont lui seul a le secret, l’actuel chef d’Etat égyptien sera certainement sa prochaine cible.
Ce journal s’érige aussi en sentinelle quand un chef d’Etat devient impopulaire au nom des règles de démocratie et de bonne gouvernance. De nombreux anciens chefs d’Etat africains peuvent bien en témoigner. Il n’a jamais donné la voix aux sans voix, mais à l’évémentiel.
Aussi, la concertation et le dialogue démocratique, silo de bonne gouvernance qui sont les véhicules de notre culture politique et même l’influx nerveux de notre société ne sont et ne seront portés que par notre presse nationale, l’exclure serait faire preuve de courte vue car c’est elle qui tient le haut du pavé.
ADN

