01-02-2016 19:40 - Quand les médias publics passent à côté de l’essentiel
L'Authentique - Les médias officiels continuent de nous tympaniser les oreilles avec des affaires aussi scabreuses que le dialogue entre le pouvoir et les partis de l’opposition, tout en passant en silence autant d’autres problèmes assez importants qui alimentent toutes les conversations des salons, des rues, des marchés et des bureaux de Nouakchott : la hausse des prix des produits alimentaires.
Des manifestations des populations de plusieurs villes et villages de l’intérieur pour réclamer l’eau ou l’électricité aux agitations dans plusieurs établissements d’enseignement, comme récemment à l’université de Nouakchott, les officines du pouvoir ne rapportent rien.
Du prix du riz qui a doublé dans le commerce, du lait en poudre et de l’huile qui connaissent une pénurie sans précédent, les médias publics, ferment la bouche et les yeux. Au menu quotidien qu’il faut faire ingurgiter au peuple : l’information portant sur les activités des membres du gouvernement et le projet de dialogue entre la majorité présidentielle.
Tout le reste est futile. Et le reste, c’est le quotidien des plus difficiles des populations, les pénuries alimentaires de toutes sortes, la crise financière sans précédent, la montée du chômage qui touche tous les âges, la paupérisation effrénée des grandes villes, l’absence de l’Autorité…
Pourtant, à en croire le ministre chargé des relations avec la société civile, ministre de la communication dans les faits, le gouvernement a doté les médias officiels de tous les moyens et a accordé à leurs agents toute la liberté nécessaire pour l’exercice de leur ministère.
Seulement, le ministre ne s’est jamais interrogé pourquoi les leaders de l’opposition ne sont jamais invités dans les médias publics, pourquoi TVM a mis fin à ses émissions de débats et pourquoi tous ceux qui ne sont pas alignés au pouvoir n’ont aucune chance de parler aux Mauritaniens dans les médias publics alors que le bijoutier du coin, devenu faghih par la grâce des "méfaits" de Biram passe toutes les nuits à exercer du tapage nocturne sur les frais du contribuable !
Plus grave, les médias d’Etat qui traquent le kilo de riz et le quart de litre d’huile acquis par le citoyen après un long et pénible rang de quelques heures pour en faire une grandiose réalisation du pouvoir et une "preuve de l’intérêt que le Président, le premier ministre et le gouvernement portent aux citoyens", passent sous silence l’oppression au quotidien et la violence policière exercée, en toute impunité, par la police et les services de sécurité contre les citoyens qui expriment leurs opinions ou étalent leurs revendications. Ils passent surtout sous silence, le quotidien difficile de nos populations.
Communiquer dans la Mauritanie nouvelle ne se résume plus à faire de la propagande soft. Elle est plutôt un exercice cruel et cynique du mensonge !
Le ministre, assumant une charge au nom du peuple mauritanien et censé être à son service, ne voit certainement point que la presse publique, notamment Radio Mauritanie, soit instrumentalisée pour diffuser des émissions de propagande faisant l’apologie de l’esclavage et de la haine entre mauritaniens.
Il ne semble pas dérangé outre mesure, que toute une armada de laudateurs squattent les studios de TVM pour insulter, à longueurs d’heures d’émission, les acteurs politiques du camp adverse.
En laissant des "sans culottes" imposer le poison communicationnel aux Mauritaniens à travers les médias de masse public, le ministre rate le coach et dilapide la chance qu’il a eue dans l’histoire de notre pays. Celle de redresser ce secteur en faisant de lui un véritable service public résistant aux fluctuations des régimes et aux changements d’hommes.
Il y a quelques jours, le Premier ministre, à son tour, s’étant paré de tout l’habit d’apparat des grands cavaliers du développement avait exalté devant le Parlement, les "grandioses réalisations du Président Mohamed Ould Abdel Aziz en matière de développement".
C’était lors de son discours de présentation de politique générale. Et le Premier ministre de passer sous silence, les problèmes quotidiens que rencontrent les populations pour survivre, la hausse des prix, la problématique du carburant dans le pays, les tracasseries des militants des droits de l’homme, l’humiliation par la police de pauvres gens qui s’aventurent à exprimer leurs revendications dans des manifestations publiques, le traitement réservé aux journalistes par son administration.
Nous aurions bien voulu que le Premier ministre comme son ministre de la Communication, fassent preuve d’autorité et assument pleinement leurs charges. Nous aurions bien voulu les voir sortir du carcan pour dire la réalité du peuple.
Nous aurions bien voulu exiger le changement dans la gestion et au cas où ils n’étaient pas écoutés, rendre leur démission. Serait-ce trop leur demander ? Serai-ce exagérer dans ses fonctions quand on plaide pour un autre traitement des affaires du peuple ? Certainement pas… Seulement, n’est pas Taubira – la ministre française de la justice- qui veut.
Amar Ould BéjÃ
