27-08-2016 11:54 - Libre Expression | Maigre bac 2016!.. et la farce continue pour 2016-2017

Libre Expression | Maigre bac 2016!.. et la farce continue pour 2016-2017

Sidi Idoumou BOUDIDE - Jeudi 4 août, le ministère de l’éducation mauritanien a publié les résultats de la session complémentaire du baccalauréat 2016, toutes filières confondues. Contrairement à la première session, cette fois, le taux de réussite est très élevé : sur les 2891 candidats autorisés à participer à la session complémentaire, 2413 sont déclarés admis, soit un taux de réussite de 83.46%.

Rappelons que la première session avait permis à seulement 2667 des 45026 candidats d’obtenir ce diplôme, ce qui représente un taux de réussite très maigre: 5.92%.

On est bien en droit de se demander ce qui s’est passé entre les deux sessions pour qu’on passe d’un taux de réussite de moins de 6% à plus de 83% ? Comment nos candidats ont-ils réussi pendant un mois ce que 9 mois de labeur n’ont pas permis de réaliser?

A la publication des résultats de la première session, je me suis amusé à les trier à travers le filtre de la feuille Excel qui a porté les résultats publiés certains sites web locaux, afin de ressortir les résultats au niveau de chaque wilaya, le taux de réussite général, le taux de réussite au public et au privé, le taux de réussite par filière et par wilaya. Un ensemble de questions qui permettent de se faire une idée de la performance des uns et des autres au terme de cette année scolaire 2015-2016.

J’attendais les résultats de la session complémentaire pour faire une lecture des résultats définitifs, mais l’écart trop important entre les taux de réussite des deux sessions, m’a décidé à me contenter des résultats de la première session, qui me semblent plus crédibles.

Mon attention a été d’abord retenue par le fort taux de candidats privés et libres: sur les 45026 candidats, 30224 sont libres (candidats libres) ou privés (présentés par des écoles privées), soit un taux de 67.13%, tandis que 14802 candidats seulement viennent de l’enseignement public, soit un taux de 32.87%. Ces chiffres reflètent le manque de confiance en notre enseignement public.

Sentiment bien justifié. En effet, sur les 2667 admis en première session, 1835 sont des candidats privés ou libres, soit 68.80%, alors que seulement 832 admis à cette session sont présentés par l’école publique, soit un taux de 31.20%. Aussi, si parmi les 30224 candidats présentés en dehors des établissements publics, 16387 sont des candidats libres et n’ont enregistré que 399 admis en première session, soit un taux d’admis de 2.43%, les 13837 autres candidats non officiels sont issus des écoles privées, eux, par contre ont fait 1436 admis à cette session, un taux de 10.37%. Une performance qui, bien que piètre, surtout si l’on sait que certaines écoles privées n’acceptent de présenter que des candidats présélectionnés, est quand même bien meilleure que celle de l’école publique. Car l’enseignement public n’a enregistré en première session que 832 admis sur 14802 candidats, soit un taux de réussite de 5,62%.

Le classement par wilaya

Ce classement montre que les trois wilayas de Nouakchott ont fourni 27506 des candidats, soit 61.1%, suivies par les wilayas du Trarza : 4613 candidats (10.24%) et Dakhlet Nouadhibou: 2657 candidats (5.90%). Les autres wilayas ont présenté chacune moins de 4% des candidats. Les wilayas qui ont présenté le moins de candidats sont l’Inchiri : 339 candidats (0.75%), le Tagant : 513 (1.14%), le Guidimagha: 555 (1.23%),…

Les meilleurs taux de réussite en première session sont enregistrés dans les wilayas du Tiris Zemour : 11,3% (79 admis sur 700 candidats), Nouakchott-Ouest : 9.91% (844 admis sur 8518 candidats), l’Assaba: 7.85% (136 admis sur 1732 candidats).

Les taux de réussite les plus faibles sont enregistrés dans les wilayas du Guidimagha : 1.44% (8 admis sur 555 candidats), le Brakna : 3.4% (49 admis sur 1440 candidats), l’Adrar : 4.03% (28 admis sur 695 candidats), Nouakchott Nord : 4.11% (387 admis sur 9421 candidats).

Les candidats dans ces dernières wilayas sont-ils moins intelligents que ceux des autres wilayas? J’en doute. A méditer, en particulier par les parents d’élèves dans ces wilayas.

Le classement par série et par wilaya

Ce classement montre les résultats suivants :

Bac C (Mathématiques)

Candidats : 3418, soit 7.59% de l’ensemble des candidats au bac 2016. Admis : 18.13% (620 admis sur 3418).

Le meilleur taux de réussite au bac C est enregistré au Hodh ech charqi : 30.95% (13 admis sur 42 candidats), suivi du Tiris Zemmour : 30.50% (43 admis sur 141 candidats) et le Tagant : 25% (7 admis sur 28 candidats). Les plus faibles résultats sont enregistrés au Brakna et à Nouakchott Nord qui n’ont même pas présenté de candidats, précédés par le Guidimagha : un seul admis sur 23 candidats.

Généralement, dans notre système éducatif, après la 4e année de l’enseignement secondaire, les élèves les plus brillants sont orientés en 5e C. Apparemment, aucun des élèves du Brakna et de Nouakchott Nord n’a mérité cette orientation.

Bac D (Sciences naturelles)

22888 candidats, soit 50.83% de l’ensemble des candidats au bac de cette année. Admis : 5.41% (1239 admis sur 22888).

Les meilleurs taux de réussite sont obtenus par les wilayas de l’Assaba : 10.8% (80 admis sur 738 candidats), Nouakchott Ouest: 9.18% (439 admis sur 4782 candidats), la wilaya du Tiris Zemour : 7.17% (32 admis sur 446 candidats). Les résultats les plus faibles sont enregistrés dans les wilayas du Guidimagha : 1.5% (5 admis sur 334 candidats), l’Inchiri : 2.26% (32 admis sur 442 candidats) et Dakhlet Nouadhibou : 3.47% (46 admis sur 1326 candidats).

Baccalauréat LO et LM: (lettres originelles et modernes)

Candidats : 18720, soit 41.58% de l’ensemble des candidats au bac 2016. Admis : 4.31% (808 admis sur 13431 candidats).

Les meilleurs taux de réussite sont dans les wilayas de Dakhlet Nouadhibou : 8.13% (68 admis sur 836 candidats), Hodh el Gharbi : 6.31% (71 admis sur 1125 candidats), Assaba : 5.35% (49 admis sur 916 candidats).

Les résultats les plus faibles reviennent au Guidimagha: 1.01% (2 admis sur 198 candidats), Adrar : 1.81% (5 admis sur 276 candidats), Tagant : 2.66%, (8 admis sur 301 candidats), Brakna : 2.67% (15 admis sur 562 candidats).

Des résultats catastrophiques

Le taux de réussite au bac 2016 toutes sessions et toutes séries confondues est de 11.28%. Un résultat catastrophique ! Et chaque année, c’est le même mouvement de régression, la même chute, de 1974 à nos jours, indiquent les statistiques du bac du site web du ministère de l’éducation nationale: 1974 : 58.25%, 1980 : 56.02%, 1995 : 22.61%, 2010 : 21.04%, 2011 : 17.97%, 2013 : 16.08%, 2015 : 13.17%, et 2016 : 11.28% d’admis au baccalauréat…..

Des résultats honteux qui ne suscitent étrangement aucune réaction

C’est un résultat honteux! Un résultat qui n’émeut étrangement jamais personne, qui ne suscite aucune réaction. Personne ! Nulle part ! Rien ! Aucun ne se sent responsable.

Pire ! L’un de nos diplomates tente de nous faire croire que les 6% représentent 30%, en affirmant: "Le taux de réussite de 6% est un taux exact mais il n’est pas véridique, parce que nous avons opté pour la politique de la quantité, du primaire au secondaire, sans filtre, tout le monde passe jusqu’au lycée. Au collège seulement 40% réussissent à franchir l’examen, néanmoins 100% (tout le monde) continuent à passer jusqu’au baccalauréat. Donc si nous avions permis aux 40% seulement qui ont franchi le BEPC de participer au baccalauréat, nous aurions constaté que ce taux est en fait de 30%, ce qui équivaut au taux de réussite moyen au baccalauréat dans la sous-région."

Que nenni! Il suffit de jeter un coup d’œil aux résultats du BEPC de cette année pour réfuter ces allégations. En effet, les candidats à ce diplôme cette année sont au nombre de 51581 dont 13865 l’ont obtenu, soit un taux de réussite de 26,88%, et non 100% comme prétendu. Il est vrai que les repêchés (les admis qui ont obtenu une moyenne inférieure à 10) font 10426, c’est-à-dire 75,20% des admis au BEPC 2016.

C’est ce qui est arrivé, mutatis mutandis, au baccalauréat. Là, les repêchés (qui ont obtenu le baccalauréat cette année après avoir totalisé une moyenne inférieure à 10 leur permettant de participer à la session complémentaire) sont au nombre de 2413 soit un taux de 47,5% des bacheliers 2016.

Donc notre taux de réussite est, malheureusement, bien égal à lui-même. C’est bel et bien le taux exact et «véridique», et qui reflète «véridiquement» la réalité de notre système éducatif.

Et ce système n'a pas besoin de plus de comédie. Ni de faire semblant. Nous avons trop fait semblant pendant les dernières décennies, et, visiblement, on va continuer à faire semblant pour ouvrir une nouvelle année scolaire 2016-2017, dans les mêmes conditions : les parents vont faire semblant d’envoyer chaque 8 heures leur progéniture à l’école, le ministre va continuer à faire semblant, à jouer au ministre de l’Education Nationale, et tous les autres membres de l’orchestre continueront à jouer, pour qu’en juillet 2017, nous restions aux alentours de la barre des 10%.

Sources :

- http://www.saharamedias.net/

- http://www.education.gov.mr/

- http://www.aljazeera.net/

22/08/2016

Sidi Idoumou BOUDIDE




"Libre Expression" est une rubrique où nos lecteurs peuvent s'exprimer en toute liberté dans le respect de la CHARTE affichée.

Les articles, commentaires et propos sont la propriété de leur(s) auteur(s) et n'engagent que leur avis, opinion et responsabilité.


Commentaires : 6
Lus : 2537

Postez un commentaire

Charte des commentaires

A lire avant de commenter! Quelques dispositions pour rendre les débats passionnants sur Cridem :

Commentez pour enrichir : Le but des commentaires est d'instaurer des échanges enrichissants à partir des articles publiés sur Cridem.

Respectez vos interlocuteurs : Pour assurer des débats de qualité, un maître-mot: le respect des participants. Donnez à chacun le droit d'être en désaccord avec vous. Appuyez vos réponses sur des faits et des arguments, non sur des invectives.

Contenus illicites : Le contenu des commentaires ne doit pas contrevenir aux lois et réglementations en vigueur. Sont notamment illicites les propos racistes ou antisémites, diffamatoires ou injurieux, divulguant des informations relatives à la vie privée d'une personne, utilisant des oeuvres protégées par les droits d'auteur (textes, photos, vidéos...).

Cridem se réserve le droit de ne pas valider tout commentaire susceptible de contrevenir à la loi, ainsi que tout commentaire hors-sujet, promotionnel ou grossier. Merci pour votre participation à Cridem!

Les commentaires et propos sont la propriété de leur(s) auteur(s) et n'engagent que leur avis, opinion et responsabilité.

Identification

Pour poster un commentaire il faut être membre .

Si vous avez déjà un accès membre .
Veuillez vous identifier sur la page d'accueil en haut à droite dans la partie IDENTIFICATION ou bien Cliquez ICI .

Vous n'êtes pas membre . Vous pouvez vous enregistrer gratuitement en Cliquant ICI .

En étant membre vous accèderez à TOUS les espaces de CRIDEM sans aucune restriction .

Commentaires (6)

  • Vent de Sable (H) 31/08/2016 00:23 X

    Pas n’importe qui est habilité à traiter d’un thème aussi complexe qu’est le baccalauréat – et le système éducatif en général - en Mauritanie, surtout quand on est un pur produit de ce système. C’est plutôt aux chercheurs et analystes indépendants d’aborder un tel sujet de manière objective. D’ailleurs ; qu’est ce que c’est ces sources bidons citées en bas du texte (Aljazeera, saharamedia, education.gov) ? Des centres d’études ? des instituts spécialises? Cela s’appelle : la navigation à vue.

  • Herculus (H) 30/08/2016 12:30 X

    M. Zeusus/(***) : Inutile d’attaquer tes amis sans raisons. Lorsque, en ta qualité d’IDEN de Tidjikja, tu leur avais refusé l’accès à l’école où ils voulaient faire de la sensibilisation, leur demandant 60 000 ouguiyas pour cela, ils n’avaient aucun rond pour faire cette activité. Ils avaient décidé de l’organiser par leurs propres moyens, et Dieu sait combien ils sont limités. Inutile de déverser ton venin sur Sidi. Tu es en train l’attaquer inutilement. Tes dires n’entament en rien sa crédibilité. C’est un type honnête. Prends un peu de temps pour demander à tes collègues au ministère. Pendant tout le temps qu’il est resté responsable syndical et militant de la société civile, il est resté irréprochable, tout propre. Tu sais, il n’est pas très facile de se cacher derrière les pseudos, on commet souvent l’erreur qui trahit. Et, en ce qui te concerne, tu en commis plusieurs.

  • Zeusus (H) 27/08/2016 17:06 X

    C'est quoi la solution Mr Boudida? Depuis 2013 tu nous rabache les oreilles avec les mêmes piètres analyses. Ce n'est pas parce qu'on à une petite maîtrise d'excellence et qu'on est capable de faite quelques petits recoupement que toit est permis. En plus en tant que leader syndical et responsable de Comeduc ( votre vache à lait toi et tes amis - complices) votre responsabilité est engagée. T'en à marre de recevoir des leçons d'un Mr pas tout à fait propre.

  • hathlele (H) 27/08/2016 15:50 X

    Les chiffres ont parlé. C'est très bien@ Sidi Idoumou BOUDIDE de faire cette étude avec des preuves à l'appui. Maintenant, quelle est la solution? Comment élever le niveau scolaire des enfants? Devons nous faire appel à des Educateurs étrangers, rappeler tous les "détachés" aux autres Ministères pour les remettre au Ministère de L'Education? Devons - nous construire des nouvelles Ecoles primaires et secondaires? Comment avoir le maximum e bacheliers? Et quelles sont les ouvertures pour ses Sortants? Sidi Ould Bobba DG Collège Bir- Moghrein

  • cccom (H) 27/08/2016 13:48 X

    Boudide : Courage pour votre intérêt remarquable pour l’enseignement : La ressource humaine bien formée constitue 65% de la richesse potentielle (mines, agriculture, poissons...) dans chaque pays.Le systéme éducatif de loin le plus performant du monde est le systéme Oughoul El Ouahatt gratuit,,intensif (6900h/an en 3 ans au lieu de 4900h/an en 7 ans réducteur du cursus à 3 ans au lieu de 7 ans, réducteur du coût de l’Education de plus de 70%.qui a démontré durant 14 son pouvoir d’être réducteur du cursus secondaire à 3 ans en moyenne au lieu de 7 ans Son inconvénient est de sortir des sentiers battis pour assurer un nombre d’admis au Bac en 3 ans 7 fois plus élévés que le nombre d’admis en 7 ans ce qui fera un nombre de diplômés chercheurs impressionnant ^gés de 19 ans à trés court terme. Pour rémédier cette contrainte de diplômés chômeurs, j’ai sonné et continurai à sonner patiemment aux bureaux de tous les ministres (Education, Agriculture, Hydraulique..) , et au DG de la SNIM et bien sûr au Président de la République dans mes articles commentaires,et sur ma page https://web.facebook.com/cheikhany.ouldsidina/posts/10206957324114909?notif_t=feedback_reaction_generic¬if_id=1472297426728066 trés visitée pour pouvoir intéresser le pouvoir à la réforme la plus perfomante de l’Education concomitamment avec l’agriculture porteuse de dizaines de milliers d’emplois non rationnellement exploitée sur le fleuve par la valorisation des 6milliards de m3/an que nous déversons dans l’Océan ou offrons aux oiseaux migrateurs ou à défaut valoriser les 100 mégawatts dans le Nord pour sauver et développer le palmiers par l’irrigation de palmeraies modernes en irrigation localisée indépendante des pluies., cheikhany_ouldsidina@yahoo.fr expert en développement.

  • foutatoro (H) 27/08/2016 12:12 X

    Avec 11.28% de réussite au BAC peut - on objectivement parler de système éducatif ? Le système de santé ne se porte pas mieux. Quelle farce ce pays !!!